Tougué :Immersion à Gourbaali où les habitants vivent de l’eau de marigot…

Des habitants de Gourbaali

TOUGUE- Gourbaali est un secteur du district de Sandakké dans la commune urbaine de Tougué. La bourgade n'a qu'un seul puits situé dans le bas-fond loin du village. Ses habitants s’approvisionnent en eau à partir d'une rivière. Comble de malheur, cette eau n’est pas propre à la consommation sans être, au préalable, filtrée et bouillie. A Gourbaali, un sceau d’eau est plus important qu’un sac de riz, ironisent certains de ses habitants.

Agée 43 ans, Fatoumata Diallo, à l’instar de ses congénères, se lève tous les jours dès l’aube pour aller à la recherche d’eau à la rivière pour ses besoins. « Inutile de vous dire que nous souffrons à cause du manque d’eau. Nous nous approvisionnons au marigot », témoigne cette mère de famille consciente du risque de boire cette eau qui est impropre à la consommation. La quadragénaire confie qu'elle a souvent des douleurs abdominales.

« C’est un risque pour notre santé. Nous n’avons pas le choix. Moi, par exemple, j’ai une santé fragile. J’ai souvent des maux de ventre à cause de l’eau de la rivière que nous buvons. Il n’y a qu’un seul puits situé dans le bas-fond qui n’est pas fermé. A part ça, c’est l’eau de marigot. L’eau contient des petites particules et des chenilles. Nous sommes obligés de filtrer l’eau à l’aide d’un tissu avant usage. Nous n’avons ni puits, ni forage. Celui qui nous aidera à en avoir un dans ce district, nous aura rendu un meilleur service. Je vous dis l’unique recours, c’est la rivière qu’il pleuve ou qu’il neige. Tout le monde n’a que la rivière pour se procurer de l’eau », raconte Fatoumata Diallo que nous avons suivie sur le chemin de la rivière.

Adama Oury Diallo est obligée de parcourir plus d’un kilomètre à pied avant d’arriver au puits. « Nous, parents, avons moins de problèmes, l’inquiétude c’est beaucoup pour les enfants qui ont un organisme faible. Avec cette eau, ils sont souvent malades. Nous n’avons aucun autre moyen de trouver de l’eau potable. A chaque fois que nous partons à l’hôpital, les agents de santé nous disent que c’est les ténias à cause de l’eau que nous buvons. Mais, à défaut la mère, on se contente de la grand-mère. En saison pluvieuse, les rivières coulent. Par contre, en saison sèche, l’eau stagne. Nous continuons à venir nous y approvisionner. Même pour avoir cette eau impropre, il faut venir tôt. Ceux qui viennent en dernière position, ne trouvent que de la boue. C’est un véritable calvaire. Si vous laissez bouillir l’eau, elle change de couleur et devient rougeâtre. Nous en souffrons. Nous serons très heureux que les autorités nous viennent en aide pour nous sortir de cette souffrance »,  lance cette autre femme.

Avant d’aller dormir, Fatoumata Diaraye Diallo apprête ses seaux auprès de la porte de sa maison afin de pouvoir aller au marigot dès l’aube. Elle se réveille au premier appel du muezzin direction au puits ou au marigot. Elle témoigne : « Tout le village, d’est en Ouest, c’est ici qu’on vient puiser. Nous sommes nombreux dans le village. Il faut traverser la brousse avant le lever du jour. C’est la première chose à faire avant quoi que ça soit. C’est des jardiniers qui ont creusé ce petit puits au bas-fond pour arroser leurs potagers. C’est ici qu’on se débrouille. Nous savons que cette eau n’est pas propre mais qu’est-ce que vous voulez s’il n’y a rien d’autre ? Gourbaali n’a jamais connu une pompe ou un puits amélioré. Depuis toujours, c’est à la rivière. Nous sommes vraiment inquiets pour notre santé ».

Comme on dit ici, « il est plus facile de voir les larmes du chien que trouver de l’eau ». Les ressortissants ont pu construire un centre de santé. L’infirmière Yaamo Haba explique que pour tout besoin d’urgence ou d’accouchement, c’est l’eau de rivière qui est utilisé.  

« L’eau est difficile à trouver dans ce village. Quand vous en trouvez aussi, il y a tout un travail à faire derrière afin de pouvoir l’utiliser. Il faut filtrer d’abord, ensuite la bouillir et filtrer encore pour s’en servir. Je suis les femmes au marigot tôt le matin pour chercher l’eau. A mon retour, je m’occupe des patients. Les soins demandent de l’eau surtout pour les femmes qui viennent accoucher. Nous sommes obligés d’aller chercher de l’eau d’abord parce qu’il n’y a pas d’eau à l’hôpital. Si tu commences un travail sans eau c’est difficile. Il nous faut de l’eau ici pour pouvoir bien travailler », explique l'infirmière.

Je traite et empoisonne en même temps mes patientes

Docteur Georges Loua est le chef du centre de santé. Il regrette d’être obligé d'utiliser l’eau du marigot pour prendre en charge ses patients. « Par exemple, les femmes enceinte qui viennent pour leur consultation prénatale, quand je leur donne le Faf ou le SP, elles avalent ces produits avec l’eau de marigot. Ce n’est pas notre souhait, mais nous n’avons pas le choix. Cette situation est inexplicable. Je peux dire que je traite mes patients et au même moment, je suis encore en train de les empoisonner par manque d’eau potable. Nous relevons de Tougué centre mais c’est un peu loin, c’est environ 22km. Il faut que le gouvernement pense à donner de l’eau à ce village », interpelle Dr George.

Thierno Oumar Béla Bah, sage de Gourbaali confie que le calvaire est beaucoup plus insupportable entre mars et juin. « Entre les mois de mars et juin, nos peines s’accentuent. Pendant cette période, il n’y a pas d’eau. Vous trouverez les gens dans une situation difficile. Nous avons besoin d’eau pure pour notre survie », sollicite ce sage de Gourbaali

« Dans notre village », ironisent les habitants, un sceau d’eau est plus important qu’un sac de riz.  En plus de l’eau, Gourbaali manque de tout dans tous les secteurs socioéconomiques de base.  

Alpha Ousmane Bah(AOB)

De retour de  Gourbaali

Pour Africaguinee.com

Tel. (+224) 664 93 45 45

 

Créé le 22 mai 2021 11:20

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