Elles excellent dans les chantiers en staff-masticage : Le parcours inspirant de Habibata et Maimouna…

LABE-Elles ont décidé de prendre leur destin en main. En déperdition scolaire, Habibata, Maimouna et d’autres jeunes filles tracent le chemin de leur destin lentement mais sûrement à Labé, principale ville de la Moyenne Guinée. Elles font le staff-Masticage (plâtre), un métier souvent réservé aux hommes. Dans les chantiers, elles attirent des clients et d’autres admirateurs (non pas par leur beauté), mais par la qualité de leur travail. Africaguinee.com a suivi ces femmes et a partagé leur quotidien dans les chantiers à Labé.

De nos jours, le plâtre sert désormais de plafond à la place des isorels et contreplaqués. Il est beaucoup plus sollicité avec son adhérence au mur comme au bois. Ces jeunes filles sont pour la plupart repêchées en plein déperdition scolaire, d’autres ont eu des vies de couple très difficiles. Elles ont eu une seconde chance, de nos jours elles se forment dans les écoles professionnelles publiques appelées Post-Primaire.

Habibata Barry, 19 ans, est tombée dans le staff-masticage par un hasard de choix. De nos jours, la jeune fille est sollicitée un peu partout à Labé. Elle garde une certaine fierté avec ce métier souvent reconnu aux hommes.

« Tout est parti de rien. J’étais à la maison à ne rien faire, j’ai vu une tante qui partait s’inscrire pour une formation professionnelle, je l’ai suivie pour m’inscrire. Trois (3) mois après, j’ai été rappelée. Je suis venue au Centre de formation professionnelle de Labé, où on m’a fait savoir que je suis retenue dans la filière staff-Masticage. J’ai foncé alors que certaines filles estimaient que ce n’est pas le bon choix. Nous avons commencé les cours, les premiers pas ont été vite compris en classe mais 60% c’est la pratique dans les chantiers. Ce qui traduit la maitrise en 6 mois pratiquement. J’ai suivi les maitres avec d’autres filles. Aujourd’hui, je suis en mesure de faire un chantier toute seule comme là où vous me trouvez là. Nous travaillons dans des chantiers d’hôtels, de boites de nuit, de bâtiments à usage d’habitation. J’ai un travail de mélange de pate, de moule, de mesure.  

C’est toute une gymnastique, c’est très salissant, mais point de découragement. La première fois après le travail de sol, le maitre me dit d’aller au toit de la maison, j’ai tremblé. Dieu merci aujourd’hui, je suis fière de moi-même. Ce qui a beaucoup aidé à la formation, les maitres nous parlent en langue parce que beaucoup ne maitrisent le français, le fait de nous parler en langue a fait évoluer vite la compréhension. Ils expliquent en français ensuite en Pulaar. C’est pourquoi la pratique est devenue plus facile. Le métier me tient à cœur maintenant, j’avais abandonné l’école en 10ème année. En fait mon mari ne tenait pas à ce que j’étudie aussi, le mariage n’a pas marché finalement. Je suis rentrée dans ma famille, je suis restée là à m’interroger sur ce que je dois faire, et le destin m’a conduit là. Je pense que ce travail me fera vivre. Je suis beaucoup respectée et admirée dans le travail. Ça me donne des avantages s’il s’agit de choisir, les propriétaires des chantiers préfèrent me donner que de donner aux garçons » explique Habibata Barry.

Maimouna Baldé 21 ans a aussi la main dans la pâte aux cotés de Habibata Barry à Ndiolou Ndantary. Elle est à ses premiers pas dans le monde de plâtre. Elle focalise toute son attention sur la pratique pour comprendre le circuit.

« Je viens de commencer. C’est le début qui est difficile, je m’adapte progressivement. Je suis les détails de près dans le processus. Le travail consiste à mélanger, il y a aussi une partie de  menuiserie qui consiste à installer l’échafaudage sur lequel on doit s’arrêter pour travailler. Dans certains chantiers nous faisons même le bois avant de commencer le plâtre. Le staff-masticage se greffe aux bois, notre spécialité c’est le staff mais dans d’autres cas, on s’occupe du bois. C’est un travail qui exige endurance, parce que déplacer les planches et autre demandent des efforts physiques. Donc, il faut s’engager à fond pour y arriver. Mais tout dépend de la passion que nous avons pour apprendre », explique l’apprenante.

Thierno Samba Diallo est fier de ses élèves. Il confie que ses apprenties font montre de courage et de détermination.

« Ce n’est pas donné à toute femme de faire le masticage, celles que vous voyez-là ont compris quand nous leur avons expliqué la portée et l’importance de ce travail. Du coup, elles ont eu l’amour du métier d’où le résultat que vous avez là en face. De la théorie à la pratique, elles s’en sortent mieux. Les dessins et les explications ouvrent l’esprit mais la main à la pâte, je vois les filles plus ouvertes à la compréhension facile. Je vois combien de fois elles sont hantées par la passion. Ici, il suffit que je pense à une idée, elles terminent vite, c’est comme si elles ont fait plusieurs années avec nous, pourtant c’est entre 2 et 6 mois. Nos cours passent mieux et vite avec elles », témoigne ce maitre staff-masticage.

De Ndiolou, nous voilà dans un autre chantier situé dans la haute Banlieue Ouest de Labé. Là, nous rencontrons Mariam Diallo et Binta Diallo avec leur maitre. La passion de d’apprendre est bien perceptible. Elles font l’essentiel du travail sous la supervision de leur maitre qui suit déjà plusieurs chantiers à la fois. Mariama Diallo témoigne :

« Nous apprenons tout à la fois. Il y a peu de théorie et beaucoup de pratique. La plupart du temps, nous sommes dans les chantiers. La première chance que nous ayons, nous sommes passionnées du travail que nous exerçons. Nous pouvons monter et descendre sans problème aux toits des maisons. Il fallait trouver quelque chose à faire parce qu’un être humain doit vivre de sa sueur. C’est un travail organisé qui demande du temps, du moulage des lisses au montage, l’opération est longue. Nous sommes habituées déjà en tant que femmes. Bientôt je vais travailler à mon propre compte. Présentement les maitres ne font que des petites orientations mais le gros du travail. C’est à nous de le faire, il n’y a pas ce qui rend plus fier qu’un métier. Tu sors travailler et le soir tu rentres avec un acquis. Au début, c’était gênant pour moi, mais maintenant je remercie le bon Dieu » confie Mariama Diallo.

Sa camarade Binta Diallo est à son deuxième mois. Elle assimile vite les cours. « Dès le premier jour, je suis venue dans la pratique. J’apprends vite ce travail, nous sommes régulièrement dans les chantiers. Pratiquement nous rentrons le soir, faire le ménage pour nous reposer. Le lendemain encore nous sortons comme les hommes de la maison en direction des chantiers. Mon rêve est d’avoir mon atelier et travailler à la longue pour moi-même vraiment. C’est un métier d’avenir les gens migrent du plafond vers le plâtre. La vitrerie et le staff-masticage sont en vogue. Apprendre ces deux métiers ouvre des portes que vous soyez hommes ou femmes », dit-elle.

Ces deux apprenties sont surveillées par maître Ibrahima Sory Diallo. Ce dernier explique ses rapports avec elles.

« Je montre aux filles ce que je sais, elles fournissent de l’effort pour bien s’appliquer. Certaines filles n’ont fait que 2 mois et 2 semaines d’abord. Je peux m’asseoir aux chantiers suivre de loin ce qu’elles font. Bientôt elles seront seules parce que la période d’apprentissage n’est pas de longue durée (…). Ces filles-là ne pouvaient rien apprendre si elles restaient à la maison. Je pense qu’il y a du travail c’est la main-d’œuvre qui manque », explique Maître Diallo.

Ces jeunes filles et femmes en déperdition scolaire sont repêchées par le centre d’apprentissage post-primaire pour une meilleure aptitude dans un corps de métiers. Elhadj Baaba Traoré, directeur du centre d’apprentissage post-primaire reste marquée par le ratio dominant des femmes dans ces métiers reconnus aux hommes.

« Comme vous l’avez compris pour intégrer le CFP, la Santé communautaire ou l’ENI, il faut avoir le niveau du brevet au moins et le Bac. Nous au Post-primaire, nous avons pensé avec le département de l’enseignement technique et professionnel d’où nous relevons et les partenaires il y a une couche à l’abandon, c’est ceux et celles qui arrêtent l’école au niveau primaire n’ayant pas l’examen d’entrée en 7ème Année ou le brevet. Nous redonnons la chance à cette catégorie à apprendre un métier de quelques mois pour affronter la vie. Là, les filles dominent. Nous leur apprenons la couture, le carrelage, le staff-masticage, la mécanique engin deux et trois roues, l’électricité bâtiments, la coiffure et la restauration. Nous sommes fiers d’avoir diplômés au moins 2000 apprenants qui vivent du fruit de leur métier appris à l’école ici et dans les chantiers où nous les conduisons.

Pour le cas spécifique du Staff-masticage(plâtre) les filles prédominent. Dans toutes les filières d’ailleurs les filles dominent partout. Les jeunes doivent savoir qu’aujourd’hui il n’y a pas de plus important qu’un métier, au lieu de se lancer dans la conduite de moto taxi, apprenez un métier durable. Voyez le courage de ces jeunes filles qui font un excellent travail dans les chantiers. Une dame confiait tout à l’heure il n’y a pas de plus beau quand une femme apporte du soutien à son mari à travers un revenu issu de son métier. C’est une très bonne leçon même pour les enfants » explique Elhadj Baaba Traoré, directeur des écoles post-primaires.

Alpha Ousmane Bah

Pour Africaguinee.com

Tel. (+224) 664 93 45 45

Créé le 30 mars 2024 15:12

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