Zoom sur Neene Laouratou Diallo : Une femme modèle qui allie enseignement coranique et agriculture…

TIMBI-MADINA- Dans la société guinéenne, des femmes et filles se distinguent dans divers secteurs. Ces braves dames sont souvent dans l’anonymat. Tout au long de ce mois mars, dédié aux Droits de la Femme, nous braquons les projecteurs sur ces « amazones » de l’ombre.

Notre correspondant dans la région de Labé a partagé le quotidien de l’une d’entre elles. Il s’agit de Neene Laouratou Tenkoun Diallo, basée à Timbi Madina, zone de production agricole par excellence. Elle a commencé cette activité d’abord en tant que prestataire dans des champs à Timbi-Madina depuis le début des années 2000. C’est un travail qui consiste à faire des taches dans les zones de production contre une rémunération. Aujourd’hui, elle est maître de son destin.

Âgée de 53 ans, cette femme mariée est mère de 7 enfants. Elle réussit sa vie sans bruit. Chaque matin, elle dirige une équipe d’au moins 600 femmes.  A côté de ses activités agricoles, Neene Laouratou tient une école coranique où elle n’enseigne que des femmes. C’est de là qu’elle encourage ses disciples à partir travailler auprès d’elle dans les champs pour rapporter le prix du pain à la maison sans tendre la main aux maris.

Dame Laouratou a convaincu même des femmes qui vivaient à Conakry ou au Sénégal voisin de rentrer et travailler au lieu de patauger dans la misère des grandes villes. Grace à ça, elle a construit une maison à la sueur de son front. Elle a aussi eu les moyens de se doter d’un champ personnel d’environs deux hectares de pomme de terre. Africaguinee.com est parti sur les traces de Neene Laouratou. Tout le long du mois de mars, les femmes seront à l’honneur sur notre médium.

« Je suis prestataire de champs, depuis plus de 20 ans.  Je dirige les activités depuis environs 10 ans dans ce champ de plus de 30 hectares à Koubi. Je travaille ici au compte d’Elhadj Moussa, mais parallèlement à ici, j’ai mon propre champ, donc productrice également.  Le gros du travail revient aux femmes du début de la campagne à la récolte, nous avons notre main partout. Nous défrichons, nous faisons le binage, les engrais, semer, nous revenons pour l’entretien, présentement c’est la récolte. Nous mettons dans les sacs et les hommes mettent dans les magasins.

Le travail nous fait vivre en tant que femmes. Au-delà des femmes officiellement répertoriées, d’autres viennent de loin pour gagner leur quotidien. Parfois nous sommes débordées. Aucune femme ne rentre sans être payée. A la fin du travail, nous nous réunissons autour de l’agent payeur. Chacune de nous a droit à un sceau de pomme de terre en plus de la rémunération journalière. Ceci vous permet de rentrer en famille le cœur rempli de joie. Mais cette quantité de pomme de terre est à trier une fois à la maison, les plus grosses, nous pouvons les revendre le jour du marché, celles qui ont été touchées par les machines on les consomme, les plus petites on les garde pour la semence dans nos champs personnels. On ajoute cela à ce que la fédération va nous donner à l’occasion des campagnes », explique-t-elle.

 « Depuis que j’ai commencé ce travail, je n’ai fait que grandir avec les autres femmes réunies autour de moi. La chance que j’aie eue, mon mari est d’accord avec moi, mes enfants vont tous à l’école à mes frais, tout vient des champs. J’en suis fière. C’est un travail qui est garanti, chaque jour tu sais où travailler le matin, avoir un peu d’argent et rentrer à la maison. Tu n’as aucune inquiétude comme une femme qui porte un plateau de banane qui fait le tour de la ville sans trouver de clients. A force de venir ici j’ai eu l’expérience de faire mon champ, chaque campagne je travaille sur un hectare à mon compte personnel. A Timbi-Madina presque tout le monde vit des travaux champêtres. Nous n’avons rien à chercher ailleurs. L’autre fierté, quand je quitte les champs je rentre dans ma propre maison familiale, c’est le fruit du travail » déclare Neene Laouratou Diallo avec fierté.

Mamadou Yero Camara, organisateur dans les activités champêtres de Timbi-Madina connait mère Laouratou depuis l’an 2000. Il l’a remarquée par ses actes de bravoure :

« C’est en l’an 2000 que mon chemin s’est croisé avec celui de Neene Laouratou Tenkoun. Dans son travail, jamais elle ne fait de laisser aller, elle aime le sérieux. Très honnête et ne triche pas dans le travail. Il y a des femmes plus âgées qu’elle ici mais c’est elle la présidente, plus de 600 femmes lui rendent des comptes. En dépit de l’âge, elle est très dégourdie et attachée au travail, c’est ce qui paye. Elle est plus engagée que les jeunes dames et filles. L’esprit de management est en elle, vous le savez partout les femmes se réunissent nous enregistrons des discussions et des cris, mais avec elle tout est calme, c’est le travail et le respect mutuel entre elles.

Les femmes viennent contentes et rentrent contentes, aucune plainte ne nous parvient ici encore moins de bagarres. Elle équilibre le travail pour tout le monde, elle-même travaille très dur, elle est le bon exemple, quand tu la vois la main la pâte, tu n’as aucune raison de t’arrêter. Certains jours, 6heures trouvent les femmes ici. Elle a réussi à construire la maison familiale chez elle pour la famille. Au-delà du courage, elle est visionnaire. Elle a même ses propres hectares de terre où elle cultive à son compte. Elle a des machines, elle aide ses enfants dans les études. On ne cherche pas mieux », explique Yéro Camara, proche collaborateur de Laouratou Diallo.

Je suis également maitresse coranique

A côté des champs où elle gagne de quoi nourrir la famille, Neene Laouratou est une enseignante de l’école coranique. Elle transmet le savoir à de nombreuses femmes dans le foyer coranique qu’elle a créé.

  « J’ai un foyer coranique à la maison, à Tenkoun précisément. Nous nous réunissons en tant que femmes pour lire le coran et partager les principes islamiques. Je fais lire les femmes et j’écris pour les enfants et les initie aussi à l’écriture. Les temps de pause aux champs sont consacrés au coran en famille avec les femmes. Il faut que les femmes acceptent de rester dans leur foyer et sortir travailler avec tout le courage pour mieux vivre. Elles pourront éduquer leurs enfants sans problème. Un moment, les maris vont délaisser, les charges reviendront aux femmes », conseille Neene Laouratou Diallo.

Binta Diallo, jeune dame vivait ailleurs avec son mari. De retour au village pour un court séjour, elle fut encouragée par Neene Laouratou dans ce travail de prestataire de champs. Depuis elle a convaincu son mari de la laisser vivre à Timbi-Madina car elle y tire profit :

« Neene Laouratou n’est pas une femme jalouse, elle tient à ce que les femmes ne soient pas un fardeau pour les maris. Je fait partie des femmes qu’elle a encouragée à venir travailler. Avant, quand je venais à Timbi, je la voyais manager les femmes vers les champs. Elle me dit de ne pas continuer à rester là à me rendre propre et belle et garder la maison, car il y a un petit moment pour être belle et propre mais le plus grand temps, il faut être sale et endurant, cette saleté rendra plus belle après (…). Les personnes qui travaillent dur portent des tenues qui les identifient à tout moment. Je l’ai suivie, j’ai compris la prestation de champs c’est un revenu garanti pour les femmes contrairement au commerce.

En sortant de chez toi le matin, tu connais déjà combien tu dois ramener le soir avec des tubercules aussi. Neene Laouratou a partagé ce bonheur avec moi. Elle pourrait garder le secret pour elle seule, mais elle a un cœur d’or. Plus de 600 femmes travaillent ici, le plus grand nombre est encouragé par elle. Je suis là maintenant avec la permission de mon mari qui est fréquent aussi bien qu’il travaille ailleurs, la vie est merveilleuse ici et moins couteuse. A côté, la vieille mère initie les femmes au coran. Une femme aussi courageuse je n’en ai jamais vu », témoigne Binta Diallo.

Houssainatou Diallo, 49 ans est à la fois disciple coranique et voisine de Neene Laouratou qui lui a été utile dans tous les sens. Elle vivait au Sénégal :

« C’est à travers le foyer coranique que j’ai découvert Neene Laouratou pour la première fois après mon retour en Guinée. Elle a commencé par m’enseigner le coran, puis de me dire qu’un sac vide ne peut se tenir. Et celui qui a faim ne peut non plus apprendre. Elle me dit aller dans les zones de production. J’ai suivi, mais il n’y a pas de regret, je tire profit comme toutes les autres femmes. C’est difficile parfois de se lever entre 5H et 6h du matin pour venir travailler dans un champ. Mais il faut transpirer pour bien vivre. Hadja Laouratou est une guide, elle n’aime pas une femme paresseuse. C’est maintenant que je regrette pourquoi je suis resté longtemps à Dakar alors que je peux travailler sur place et réussir. Si nous devons être matinales aux champs, nous allons à l’école coranique dans l’après-midi, les jours où nous n’avons pas de travaux champêtres nous lisons le coran matin et soir. Nous vivons de ce travail avec nos familles. Hadja Laouratou sait rassembler vraiment », témoigne cette dame.

La production de la pomme de terre dans le Fuuta constitue un gagne-pain ponctuel pour les femmes et beaucoup d’autres acteurs. Ces femmes, souvent commencent par la prestation, à la longue elles deviennent productrices et emploient d’autres femmes à leur tour avec l’accompagnement de la fédération des paysans du Fuuta en termes de semences, d’engrais et autres intrants. Ces aides de la fédération sont remboursables à la fin des récoltes, soit, en pomme de terre directement, soit, par argent après-vente.

Alpha Ousmane Bah

De Retour de Timbi-Madina

Pour Africaguinee.com

Tel : (+224) 664 93 45 45

Créé le 13 mars 2024 13:34

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