Jeanne LAGARDE, responsable plaidoyer Afrique pour RSF : « La Guinée reste un pays prioritaire qu’il faut surveiller… »

CONAKRY-Reporter Sans Frontières (RSF) observe de près la situation de la liberté de la presse en Guinée. Cette organisation internationale qui a pour vocation la défense de la liberté de la presse et la protection des journalistes, dénonce les violences commises sur des professionnels de l’information et leur arrestation, ce lundi 16 octobre 2023 à Conakry. Elle exige l’abandon des charges retenues contre eux. Pour parler de cette actualité, Africaguinee.com a interrogé madame Jeanne LAGARDE chargée de plaidoyer Afrique pour RSF. Dans cet entretien, elle indique que la Guinée reste un pays prioritaire pour RSF qu’il faut surveiller.

AFRICAGUINEE.COM : Une manifestation pacifique de journalistes a été réprimée dans la matinée du lundi 16 octobre 2023 à Conakry. Comment Reporters Sans Frontières (RSF) réagi face à ces violences ?

JEANNE LAGARDE : On a vu effectivement qu’une manifestation pour protester contre le blocage de Guineematin.com a été réprimée dans la violence par les forces de sécurité. Nous, ce qu’on peut en dire, ce qu’on s’était entretenu avec les autorités guinéennes en octobre 2021, juste après le coup d’Etat. A l’époque, les autorités elles-mêmes s’étaient engagées de protéger la liberté de la presse pendant toute la durée de la transition. Mais on voit surtout que les autorités peinent à tenir leur promesse parce qu’on a vu 13 journalistes arrêtés violement. Certains journalistes ont été brutalisés, leurs matériels de travail ont été endommagés. Il y a une journaliste qui a été blessée au bras et qui n’avait pas eu accès aux soins. Et, les journalistes sont restés détenus pendant 7 heures au tribunal sans pouvoir sortir. Donc, on est assez désolé, on exige l’abandon des charges à l’encontre des journalistes et on réitère notre appel à ce que le site d’informations Guineematin.com soit de nouveau accessible.

En mai dernier, les principaux sites d’informations avaient été victimes de brouillages. Comment expliquez-vous cette situation ?

C’est assez difficile à expliquer. C’est vrai depuis le mois de mai dernier, on a vu effectivement une cascade de violations de la liberté de la presse sans précédent s’abattre sur la Guinée, on a vu une coupure d’internet des réseaux sociaux, des signaux des radios brouillés, des intimidations à l’encontre des médias, des médias qui ont été coupés… au point qu’une journée sans presse à vu le jour et qui avait permis de faire entrer les choses en ordre. Mais quelques semaines plus tard, on a eu deux sites qui ont de nouveau étés brouillés. Notamment Inquisiteur.net et Guineematin.com pour des raisons différentes. Nous, ce qu’on peut dire, ce qu’on va essayer de s’entretenir avec les autorités guinéennes dès que possibles sur ce sujet-là. En attendant, on a mis en place des sites miroirs qui sont des sites internet qui font qu’on puisse contourner cette censure et que les guinéens puissent accéder aux sites d’informations sans avoir besoin d’un VPN qui est souvent payant.

En plus des moyens que vous venez d’évoquer, est-ce qu’il y a d’autres mesures que vous envisageriez pour que ces restrictions s’arrêtent ?

Pour le moment, le contournement de la censure par la création d’un site miroir, permet de contourner la censure à l’instant T et d’aider le média concerné mais aussi plus ou moins d’envoyer un signal assez fort à ceux qui provoquent cette censure en leur montrant que cette censure parmi d’autres peut être contournée. C’est une des solutions à court terme. Après, à long terme, il faut effectivement engager des discussions avec les autorités. Et ça, on y travaille, c’est une de nos priorités.

La situation de la liberté de la presse en Guinée a connu une évolution en dents de scie depuis 2020-2021. Avec ces derniers développements, le tableau est plutôt en train de s’assombrir de plus en plus…

Oui effectivement, le tableau est plutôt sombre. On voit quand-même que la Guinée ces dernières années est plutôt ‘’stable’’. Dans le classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF chaque année, la Guinée occupait l’année dernière le 84e rang. Maintenant, elle occupe le 85è rang. Mais chaque année, on observe toujours de grosses violations de la liberté de la presse. Dès l’arrivée de la junte au pouvoir, on avait quand-même quelques signaux inquiétants. Après cela, ça s’est un peu calmé. Mais, c’est vrai que ça fait plusieurs années qu’on assiste à des violations de la liberté de la presse assez importante.

Même s’il faut quand-même le souligner, on n’a pas eu de cas de journalistes en détention arbitraire, alors que c’était le cas quand-même sous l’ancien régime d’Alpha Condé, où on avait eu des journalistes qui avaient été détenus alors même que les délits de presse étaient dépénalisés dans le pays. Effectivement, la Guinée reste un pays prioritaire qu’il faut surveiller. RSF continue de faire le monitoring et à rappeler les autorités à l’ordre quand il est nécessaire et à parler publiquement de tout ce qui est violation de la liberté de la presse.

Quel est votre dernier message ?

Juste pour rappeler que RSF continue à veiller, et à avoir des contacts avec des journalistes et des associations sur place pour être proche des violations de la liberté de la presse. On garde un œil très attentif. Encore une fois, pour faire le parallèle avec ce qui s’est passé hier, on exige l’abandon des charges à l’encontre des journalistes qui étaient présents à la manifestation qui ne faisaient que leur travail. Et on appelle également à la reprise du site Guinéematin.com, qui est un site d’informations qui n’a pas vocation à être victime de la censure.

A suivre…

Oumar Bady Diallo

Pour Africaguinee.com

Créé le 17 octobre 2023 18:35

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