Fourniture de plaques minéralogiques : les dessous d’un bras de fer en perspective…

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CONAKRY-Le 11 novembre 2021, le ministre des Infrastructures et des Transports Yaya Sow a sommé l’entreprise DSD Guinée d'arrêter avec effet immédiat et jusqu’à nouvel ordre toutes ses activités relatives à la fourniture de plaques minéralogiques neutres et sécurisées de véhicules et motocyclistes ainsi que de l’émission de vignettes. La décision fait suite à l’exécution de la mesure conservatoire recommandée par l’Autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP), suite à une saisine de l’institution par un recours des Établissements Yattassaye et Fils.

Alors que cette décision drastique continue de défrayer la chronique, nous venons d’apprendre que le vice-président de la société allemande DSD vient de débarquer à Conakry. Quels sont les tenants de cette affaire ? Comment DSD est-il arrivé en Guinée ? Pourquoi la société Yattassaye et fils avait été écartée par le ministère des transports à l’époque ? Africaguinee.com a enquêté.

Tout remonte il y a un an. Novembre 2020. A l’époque, dans le compte rendu du Conseil des ministres, le ministre des Transports d’alors, Aboubacar Sylla avait indiqué que son département en collaboration avec celui des Finances a négocié une convention pour la réalisation d'un projet en BOT «Build, Operate and Transfer, Construire, Exploiter et Transférer» avec la Société Allemande DSD Staatliche Documents pour l’immatriculation et la re-immatriculation du parc automobile de Guinée.

Dans la convention, il était prévu notamment la construction et l’équipement des 8 bureaux régionaux des transports terrestres, l’installation d’un système informatisé de gestion des titres de transport sécurisés. Le projet a démarré en janvier 2021.

Le Ministre avait précisé que ce programme, réalisé sous la forme de BOT, ne coute rien au Trésor public guinéen qui, au contraire, pourrait mobiliser des recettes d’environ 75 milliards GNF pour la première année de l’opération.

Pour l’aboutissement du processus des réformes d'immatriculation et de réimmatriculation, le ministère des Transports d'alors avait mis en place un système intégré qui comporte trois segments : 1er, l'établissement de la cartes crise et l'immatriculation proprement dite, 2e, la fourniture des plaques minéralogiques neutres et sécurisées et 3e segment concerne le volet emboutissage.

Pour le premier volet, le ministère des Transports a passé une convention de concession de service public avec une entreprise allemande qu'on appelle DSD qui a une filiale en Guinée. Tandis que le volet fourniture des plaques minéralogiques neutres et sécurisées était accordé à la société malienne Yattassaye et Fils. 

En ce qui concerne le volet emboutissage, la prestation revenait à une dizaine d'entreprises locales agréées par le ministère des Transports.

Alors comment cela se passe ?

Dans le contrat, la société Yattassaye et Fils importe les plaques et les revend aux établissements d’emboutissage.

Lorsqu'un propriétaire d'automobile ou de moto vient pour faire son immatriculation, il va dans un établissement d'emboutissage pour acheter la plaque. De là, il se rend au siège de DSD qui s’occupe de l’impression des numéros d'immatriculation sur les plaques.

Ce qui est arrivé, dans le cadre du lancement de ce processus, le ministre des Transports d'alors avait demandé à Yattassaye et fils d'importer une quantité importante des plaques automobiles et motocycles en vue du lancement du projet, prévu en janvier 2021. Une demande que Yattassaye n’était pas en mesure d’honorer.

“La quantité demandée c'était 50 mille plaques automobiles et 100 milles plaques motocycles. Le lancement de l'opération a été fixé au 4 janvier 2021. Malheureusement, il se trouvait que Yattassaye n'a pas pu importer dans le cadre du délai qui lui a été imparti des plaques de qualité et en quantité. La quantité stock qui a été importé par Yattassaye était, non seulement, insuffisante, mieux, on a trouvé qu’elle était non conforme aux spécifications techniques tel que prévu dans le cahier de charges et conformément aux échantillons qu'on a validés. Le ministère d'alors a dit qu’utiliser ces plaques importées par Yattassaye c'est dévoyer tout le processus. Il y avait donc une crise entre le ministère des Transports et Yattassaye.

Le ministère avait donc décidé – vu que nous avions perdu la moitié de l'année en train d'attendre des plaques sécurisées et conformes alors que Yattassaye n'est pas en mesure de le faire-, de demander à l'entreprise DSD Guinée qui avait soumissionné dans le cadre de ce processus et qui était arrivée deuxième derrière Yattassaye, d’importer le stock de démarrage. C'est à dire 50 mille plaques automobiles, et 100 mille plaques motocycles. C'est ce stock que DSD a importé en attendant que la crise avec Yattassaye soit terminée”, explique un responsable du ministère des Infrastructures et des transports sous anonymat.

Il s’agit d’un marché qui a été obtenu depuis 2014. Ledit marché de fourniture a été transformé en BOT après que l'Etat ait eu des difficultés pendant la période Ebola à payer l’argent pour amener les documents sécurisés.

De l’implication financière du marché…

« La démarche financière était de payer, en amont, 30% à l’entreprise et quand elle livre les documents sécurisés, les 70%. A l’époque, on avait appelé DSD pour lui dire que l’État ne pouvait pas payer et lui demander de transformer son marché de fourniture en BOT c’est à dire que DSD fournisse l’argent et le matériel pour la réalisation du projet. On a construit et équipés 7 centres dans les 7 régions à l’intérieur du pays. L'Etat n’a pas mis un centime dans ce projet. En retour, il reçoit 60% des recettes d’immatriculation et DSD n’a que 40%”, explique Moustafa Kaba de la société DSG Guinée.

S’agissant de l’importation des plaques qui, au départ, était exclusivement réservée à la Société Yattassaye, M. Kaba ajoute: “La société Yattassaye était chargée de donner les plaques. Puisqu’elle n’a pas satisfait à ses obligations contractuelles et on voulait démarrer le projet, c’est ainsi que l’Etat nous avait demandé d’envoyer un stock de démarrage. C’est à cette occasion qu’on a importé des plaques. Yattassaye s’en est plaint pour dire que c’est elle qui a le contrat alors que son exclusivité était déjà levée. En attendant que ce différend se règle, l’autorité a jugé utile de stopper toute importation des plaques. Les vignettes normalement c’est le ministère du Budget qui les vend. Pour écouler rapidement les vignettes, le ministère du Budget nous a approchés. Cela a été rendu obligatoire, vous ne pouvez pas vous immatriculer ou reimmatriculer si vous ne payez pas votre vignette. (…) On a dit qu’il n’y a pas de problèmes pour cela.

En 5 mois, nous avons donné près de 8 milliards Gnf à l’État alors que leurs recettes annuelles dans la vente des vignettes étaient de l’ordre de 2,5 milliards Gnf. Aujourd’hui, le ministère du Budget est très amer par rapport à cette décision du ministre des Transports. Nous leur avons donné 24h pour régler entre eux sinon on déconnecte de notre système la vente des vignettes. Mais nous continuons l’immatriculation. C’est seulement la vente des vignettes et l’importation des plaques qui sont suspendues au niveau de DSD. On nous avait donné une autorisation pour importer les plaques. Mais, le ministère des Transports nous a demandé d’arrêter l’importation puisque le ministère des Transports a annulé l’exclusivité de la société Yattassaye d’importer les plaques.

Au démarrage du projet, la société Yattassaye n’avait pas des plaques ou du moins celles qu’elle avait n’étaient pas homologuées par le département des Transports. Et nous, notre projet c’est en BOT, on avait investi près de 60 milliards Gnf et on attendait les plaques. A l’époque, on avait demandé l’autorisation d’importer les quantités des plaques nécessaires à la réalisation de notre projet. Le ministre nous avait autorisé. C’est ainsi que Yattassaye a rebondi sur ça pour dire qu’on lui a retiré son exclusivité dans l’importation des plaques, mais on a signé un contrat avec une autre société pour envoyer les plaques. Nous avons dit non, on n’a pas signé de contrat c’est une solution palliative. Quand vous aurez fini votre différend et que vous ramènerez les plaques, on se dessaisit pour continuer l’immatriculation. On ne s’est pas substitué ou annulé le contrat de Yattassaye”, souligne M. Kaba qui considère que la décision du ministre des Infrastructures et des transports est anormale.

“On ne trouve pas la mesure conservatoire normale parce que l’exclusivité avait été levée officiellement. Cela veut dire qu’on peut donner la possibilité à n’importe quelle société de commander des plaques. Notre société mère est basée en Allemagne. C’est elle qui nous a dit qu’elle pouvait nous fournir les plaques nécessaires pour nous permettre de continuer notre projet. En quoi ça dérange l’État si la même société qui fait les immatriculations importe les plaques ?”, déplore-t-il.

Moins d’une semaine après la décision du ministre des Infrastructures et des transports, le vice-président de DSD basée en Allemagne est arrivé à Conakry. Selon nos informations, il devrait être reçu en audience par le ministre Yaya Sow. Pour l’heure, nous n’avons pas entrer en contact avec les responsables de la société Yattassaye et fils.

Dossier à suivre…

 

Abdoul Malick Diallo

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 669 91 93 06

Créé le 16 novembre 2021 18:13

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