Massacres du 28 septembre 2009 en Guinée: Une veuve interpelle Cellou Dalein Diallo (Interview exclusive)

Image d'archive

CONAKRY- C’est avec les larmes aux yeux que Madame Bah a témoigné sur les circonstances de la mort de son époux au stade de Conakry. Près de cinq ans après ces massacres survenus le 28 septembre 2009, Mme Bah, déplore le fait qu’elle n’ait toujours pas pu voir le corps de celui qu’elle aimait et dont elle attend inlassablement le retour. Madame Bah, épouse d’une des victimes des massacres du 28 septembre a exprimé son cri de coeur et sa deception face à la lenteur du dossier au niveau de la justice. Dans cet entretien, Mme Bah témoigne également sur les circonstances de la mort de son mari en 2009, mais aussi sur l'alliance annoncée entre Cellou Dalein Diallo et l'ancien chef de la transition guinéenne, Moussa Dadis Camara. Exclusif!!!

 

AFRICAGUINEE.COM: Madame Bah bonjour

Bonjour monsieur Diallo.

Comment comprenez-vous le rapprochement entre Cellou Dalein Diallo et Dadis Camara, soupçonné d’être impliqué dans les massacres du 28 septembre ?

Avant tout, je vous remercie de m’avoir donné l’opportunité de m’exprimer sur ce sujet. Moi je déplore fermement l’acte. J’aurais souhaité que M. Cellou Dalein, vue tout ce qui s’est passé au stade du 28 septembre, ne s’allie pas avec Moussa Dadis Camara. Je déplore fermement l’acte. J’aurais souhaité qu’on prenne en considération toutes les victimes afin que justice soit faite.

J’ai perdu mon mari au stade, je veux que justice soit rendue. Jusqu’à présent je me demande où il  se trouve. On n’a pas une trace de lui. Donc, j’aurais aimé que Cellou Dalein Diallo se mette devant nous les victimes que l’on se donne la main pour que justice soit faite.

Vous aimeriez que Cellou Dalein témoigne à charge contre Dadis au lieu de s’allier avec lui ?

Oui c’est ce que j’aurai souhaité puisque si les gens sont sortis ce jour là pour aller au stade, c’est parce que c’est eux les leaders politiques qui les ont appelés. Sinon personne n’allait se rendre au stade.  Donc, eux les leaders politiques devraient même devancer les victimes pour que la justice soit rendue. Mais si aujourd’hui lui (Cellou Dalein Diallo, ndlr) se permet de se rallier à Moussa Dadis Camara, ça nous donne vraiment… (Elle ne termine pas sa  phrase).

Etes-vous déçue ?

De  trop même ! C’est décevant. Et de lui (Cellou) et du Pouvoir en place. Près de six ans après les évènements, c’est comme si on vivait la même chose qu’en 2009. On se demande que faire.

Pourtant il y a eu plusieurs inculpations ces derniers temps, cela ne vous semble-t-il pas suffisant ? 

Pas du tout. Je souhaiterai que si les magistrats en charge de l’affaire ne peuvent pas faire l’affaire, mieux vaut qu’on interpelle la Cour Pénale Internationale. Trop c’est trop ! Près de six ans, on n’arrive pas (à  nous rendre justice). Mêmes les inculpations dont vous parlez, moi je me dis que ça ne sert à rien presque. Parce qu’ils sont là jusqu’à présent, ils occupent leur fonction.

Qu’avez-vous à dire à  Cellou Dalein Diallo ?

Je déplore qu’il soit rallié à Moussa Dadis Camara. On aurait souhaité qu’il ne se serve pas des victimes pour accéder au Pouvoir. Il devrait soutenir les victimes.

Pensez-vous que son alliance avec Dadis vise uniquement à accéder au Pouvoir ?  

S’il s’est permis de se rallier avec Moussa Dadis Camara, certainement c’est pour accéder au Pouvoir. C’est ma façon de voir. J’aurais vraiment souhaité qu’il n’abandonne pas les victimes. Que ça soit ici ou à l’étranger, il devrait parler des victimes et qu’il appelle à ce que justice soit rendue aux victimes.

Il dit quand même qu’il est solidaire des victimes et qu’il souhaite une justice équitable et indépendante !

Oui mais il faut joindre l’acte à la parole.

En quoi faisant ?

Avec son statut, il peut même frapper au bureau du Chef de l’Etat pour l’accélération du dossier. Parler à chaque fois des victimes dans ses discours et qu’il demande aux autorités de tenir compte des victimes. Parce que nous sommes fatigués d’attendre. Il faut que justice soit faite maintenant.

Cellou Dalein dit qu’on ne doit pas associer le dossier du 28 septembre à la politique. Qu’en dites-vous ?

Moi je dirais « non » puisque c’est après le 28 septembre qu’on a eu un président démocratiquement élu. Ce sont les morts qui ont amené un pouvoir civil. Donc, on ne devrait pas oublier les victimes. Il faut vraiment punir les coupables. Si lui, il dit qu’on ne doit pas mélanger les évènements du 28 septembre avec la politique, je dis non. Et puis, c’est Moussa Dadis Camara qui était au Pouvoir. La responsabilité lui revient. Même s’il y aura d’autres inculpations, mais il faut le regarder lui d’abord, parce que c’est lui qui était le président de la République. C’est aussi Cellou Dalein qui avait appelé les  victimes au stade. Donc, c’est deux choses qu’on ne peut pas dissocier. Elles vont de paires.

Quel souvenir avez-vous de votre époux quand il sortait pour aller au stade ?

Je n’étais pas à Conakry le 28 septembre. Mais à la veille (le dimanche soir) on avait parlé au téléphone. En sortant, d’après ce qu’on m’a dit, il était bien habillé, il ne partait même pas au stade, il partait à un baptême quand il est tombé dans ça. Le 28 septembre 2009 est un jour que je n’oublierai jamais de ma vie.  Et je vais pleurer durant toute ma vie. Jusqu’à présent je n’arrive pas à  me remarier.

Vous n’avez pas fait encore le deuil de votre mari ?

Je me demande où il se trouve.

Avez-vous des enfants ?

Non, on venait à  peine de nous marier.

Votre époux avait quel âge et comment s’appelait-il ?

Il s’appelait  Hassane Bah, il  était âgé de 36 ans

Comment vivez-vous son absence ?

Je la vis très mal. Il n’y a pas un jour où je ne pense pas à lui. Je n’arrive pas à l’oublier. C’est comme si quelque me disait à chaque fois qu’il  allait revenir. Je vis très mal son absence, mais c’est le destin. Je m’abstiens et je prie le bon Dieu de l’accueillir dans son paradis. Mais le jour où je verrai les  coupables arrêtés et jugés, cela ressemblerait pour moi au retour de mon mari. Et j’ai hâte de voir ce jour.

Aujourd’hui, comment gagnez-vous votre vie ?

Quand il disparaissait, j’étudiais, mais aujourd’hui j’ai fini. Ce n’est pas parce que j’ai  eu un bon boulot, mais par la grâce de Dieu et le soutien de mes parents, ça va.

Avez-vous un appel à lancer aux autorités du pays ?

Je vais dire aux autorités que nous les victimes des évènements du 28 septembre, nous souffrons beaucoup. Nous n’arrivons toujours pas à faire le deuil. Nous voulons qu’on nous aide à ce que justice soit rendue le plus vite que possible. 

Merci beaucoup Madame.

C’est moi qui vous remercie.

 

Interview réalisée par Diallo  Boubacar 1

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 655 31 11 12

Créé le 26 juin 2015 17:17

Nous vous proposons aussi

TAGS

étiquettes:

SONOCO

TOTALENERGIES

UNICEF

LONAGUI

cbg_gif_300x300

CBG

UBA

smb-2

Consortium SMB-Winning

Annonces

Recommandé pour vous

Annonces

logo-fondation-orange_3

Avis d’appel d’offre ouvert…

mercredi, 15 mai 24 - 11:36 am