Jean Marie Doré : ‘’ Si j’étais le porte-parole de l’opposition…’’ (Interview exclusive)

Jean Marie Doré, leader de l'UPG

CONAKRY- Dans le bras de fer entre le pouvoir du Président Alpha Condé et l’opposition guinéenne, l’ancien Premier Ministre Jean Marie Doré vient de donner son avis. Dans cet entretien exclusif accordé à notre rédaction, l’ancien Chef du Gouvernement de transition propose une piste de solution pour une sortie de crise en Guinée. Sans langue de bois, le leader de l’Union pour le Progrès de la Guinée, Jean Marie Doré, revient aussi sur les prochaines consultations électorales, notamment la présidentielle du 11 octobre prochain. Exclusif !!!

 

AFRICAGUINEE.COM : Honorable Jean Marie Doré bonjour !

JEAN MARIE DORE : Bonjour Monsieur Diallo !

Depuis l’annonce du calendrier électoral par la CENI, l’opposition et le Gouvernement sont à couteaux tirés. Quelle analyse faites-vous de cette situation ?

Il appartient à la CENI de fixer la date du scrutin. Maintenant la question qui est posée, c’est : ‘’est-ce que la CENI a bien fait de l’annoncer maintenant ? ‘’ Je dis sur le  plan juridique « oui » parce que les  élections doivent avoir lieu dans un délai qui n’excède la durée qui reste du mandat du Président de la République. Il a dit que si on dépasse la date des élections  qui lui reste dans la légalité républicaine, l’opposition va dire qu’il est devenu illégitime. C’est une situation qui peut prêter à beaucoup d’interprétations  qui  ne me paraissent pas essentielles.  Parce que M.  Alpha Condé est devenu président légitime le jour où  (le 21 décembre 2010) il a prêté serment au Palais du Peuple. Donc entre le 11 octobre et le 21 décembre, il faut voir s’il y a moyen de faire reculer la date du 11 pour ne pas dépasser la date de prestation de serment du président de la République. Tout cela est discutable dans un cadre où il y a la confiance entre les acteurs.

L’opposition de son côté n’avance pas avec des propositions. Ça c’est une erreur. Quand on est dans une situation comme celle où se trouve l’opposition, on vient avec des propositions pour caler la discussion dans des  limites gérables, compréhensibles par l’opinion publique. Parce que nous sommes tous tributaires de l’opinion publique. Il s’agit de convaincre l’opinion publique que nous défendons la vérité.

Le  président ayant répondu à l’appel de l’opposition par le mandat qui est donné au Premier ministre et au ministre de la Justice de conduire le dialogue, il faut que l’opposition rentre dans la salle avec des propositions et faire la publicité autour de celles-ci  pour persuader qu’elle ne refuse pas le dialogue. Parce que  sinon nous nous trouverons dans une situation un peu loufoque. Nous avons toujours réclamé le dialogue, on nous le propose, et nous disons que « non », on ne viendra pas, il y a des préalables. Ce n’est pas comme ça. Ce qu’il faut faire dans le contexte guinéen maintenant, le Gouvernement est en train de montrer partout ses arguments, il appartient à l’opposition de faire des contrepropositions pour présenter à l’opinion. Mais ne pas refuser catégoriquement d’entrer en matière. Parce que chacun compte sur des forces dont je ne connais pas les contours, mais il faut faire très attention pour ne pas manquer la cible. La cible, c’est l’intérêt de la Guinée.

Aujourd’hui le pays est profondément mouillé dans le vase. Les bailleurs de fonds n’ont plus confiance à la Guinée,  le chômage chez les jeunes comme chez les adultes augmente dans des proportions que je  ne peux pas chiffrer. La misère est devenue  criarde dans la rue. Les taudis remplacent les belles villas d’antan. Tout cela interpelle notre responsabilité et notre sens du devoir. C’est ce qu’il faut voir.

L’opposition exige le gel des activités de la CENI et l’annulation du calendrier électoral avant de participer au dialogue. Qu’en dites-vous ?

Il faut présenter cela avec des argumentaires autour de la table et prendre à témoin l’opinion publique. Vous dites : « il faut qu’il annule tout » ! Or c’est son devoir de préparer les élections. Je crois qu’après, ça ne marche pas.

Si j’étais le porte-parole de l’opposition, je démontrerai que la date fixée est modifiable en plusieurs ponts. Et je vais démontrer dans la salle que c’est modifiable avec le code électoral, avec la constitution. Mais je ne peux pas dire que je n’entre pas en matière de discuter. Comment peut-on connaitre votre positionnement si vous n’entrez pas en matière. Il faut rentrer en matière pour invalider l’argument de l’autre. Je ne comprends pas cette rhétorique de l’opposition qui  tend à devenir vaine. Vous croyez que le Gouvernement est  aveugle. Il voit que l’unité de l’opposition est de façade, que ça ne correspond plus à rien. Les deux premiers partis en force de l’opposition c’est : l’UFDG et l’UFR. Puis il y a les seconds couteaux comme Kouyaté, ensuite le tiers-Etat qui est formé de toute la nébuleuse que nous connaissons qui crépissent dans les medias par la force de l’argumentation. C’est ça !

Pensez-vous qu’il est possible d’inverser l’ordre des élections proposé par la Commission électoral national indépendante ?

Tout est une question de négociation. Négocier ne veut pas dire qu’on doit arriver au point que j’ai fixé à  mon vis-à-vis. Lui aussi ne doit pas croire que je vais accepter comme ça. Il arrivera un moment où on va dire qu’on fait des concessions. Je vous démontre : par le passé, en 1993, Lansana Conté avait fixé la date des élections le 14 décembre. Nous avons dit non. Nous avions présenté des arguments qu’on peut bien faire les élections en décembre mais pas le 14. Parce que le délai qui nous ait donné était trop court pour que l’on puisse se préparer matériellement et politiquement. Nous nous sommes mis d’accord avec le président Conté pour faire venir Amadou Toumany Touré qui venait de quitter ses charges de son premier mandat. Il est venu et nous a tous persuadés d’accepter le 19 décembre. Parce que dans cette affaire, il y a aussi la fierté. Vous ne pouvez pas aller à des négociations puis revenir les bras-ballants. Cela finit par créer des frustrations qui peuvent faire déraper le raisonnement normal. Le Gouvernement devrait prendre conscience de ça.

Mais je pense qu’il faut aller dans la salle. C’est dans la salle qu’on va démontrer le péril que fait courir le pays (…), cet écartèlement de la même Guinée en des directions aventureuses. Parce que tout ce que l’on dit là, ce n’est pas la réélection d’Alpha Condé qui est importante, ce n’est pas l’élection de M. Cellou Dalein Diallo qui est importante, ni celle de Sidya, ni celle de tartempion. C’est le maintien de la Guinée, son développement, son équilibre social, psychologique et sa marche en avant pour valoriser ses thèses concernant l’exploitation de ses ressources naturelles et son industrie, ses relations commerciales. Mais si tout ça est cassé, c’est quelle Guinée il faut ?

N’oubliez pas que la démocratie est fondée sur le débat. Sans débat, il n’y a pas de démocratie (…). Je ne dis pas que c’est la solution miracle d’aller au dialogue. Mais elle permet d’adoucir un peu la situation dans laquelle nous nous trouvons. Une situation qui ressemble à  un bateau ivre où le gouvernail ne répond plus aux commandes du commandant de bord.

Dans une de vos interventions vous aviez accusé M. Sidya Touré d’être à l’origine de ce blocage actuel. Pouvez-vous être un peu plus explicite ?

Lorsque nous avons négocié à Ouagadougou, il fallait décider dans notre mémorandum, par quel bout il fallait commencer les élections. Il y avait eu l’unanimité moins celle de Sidya. Or, obligatoirement, nous devrions rester unis.  Si par une certaine raideur de la majorité, on rejetait la proposition de Sidya et que lui seul présentait un mémorandum séparé, ça affaiblirait profondément et gravement la position des forces vives. Mais je pense que ça c’est du passé. Il ne faut pas tout le temps rabâcher la même chose. Je pense que  chacun a tiré les leçons de cela.

Pendant longtemps encore en Afrique, s’il faut aller à des élections, il ne faut pas commencer par les élections présidentielles. Parce que le président élu disposera des moyens colossaux pour influencer la suite. C’est humain. Qui peut reprocher honnêtement à Alpha Condé de ne pas chercher à se maintenir dans les  limites de  deux mandats ?

Quel est votre avis sur la proposition de candidature unique de l’opposition à la présidentielle du 11 octobre?

Ça, c’est de la foutaise. Il n’y a pas de  candidature unique. Vous voyez ça où ? Raisonnablement vous pensez que chacun des partis créés pour conquérir le Pouvoir va se présenter devant ses militants dire comme M. Cellou est plus intelligent que moi, je vais céder pour qu’il soit candidat unique. Ça ce sont des histoires. Je ne vois ni  Cellou, ni Sidya en train de renoncer pour l’autre. La base de chacun s’y opposerait avec violence. C’était des discours pour amuser la galerie et donner une certaine dynamique. Mais c’est impossible qu’il y ait une candidature unique dans le contexte de maintenant.

Comment votre formation politique, l’UPG, se prépare pour les élections présidentielles du 11 octobre?

Il n’ya pas deux manières de se préparer. Il faut restructurer et assainir le circuit du fonctionnement du parti pour que chaque élément organisationnel et autre soit en mesure de prendre le contact quotidien avec la population pour expliquer le bien-fondé de notre programme, de nos méthodes de travail et notre façon de voir l’avenir de la Guinée. C’est le fond de toute campagne électorale.

Serez-vous candidat ?

Mon parti va aux élections. Il  ne peut pas rester en marge des élections. Et si son choix se porte sur moi, volontiers, je serais candidat.

 

Interview réalisée par Diallo Boubacar 1

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 655 31 11 12

 

Créé le 11 juin 2015 11:33

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