Incertitude en Sierra Leone : « ça tire partout…ce qu’on vit est inquiétant », témoigne un habitant de Freetown

FREETOWN-Les nouvelles en provenance de la Sierra Léone ne sont pas rassurantes. Un couvre-feu a été instauré dans le pays après l’attaque qui a visé l’armurerie militaire de la caserne de Wilberforce. Le Président Julius Maada Bio annonce une opération combinée des forces de défense et de sécurité pour extirper les derniers « renégats en fuite ». Les populations sont invitées à rester cloitrées chez elles. Dans la capitale, la peur gagne les citoyens alors que la situation reste toujours confuse. Quelle est l’origine de ce mouvement d’humeurs ? Quelle est la situation qui prévaut sur le terrain ? Africaguinee.com qui a pu interroger des citoyens basés à Freetown lève le voile. Explications.

« Ce que nous vivons là est inquiétant. Différents corps de l’armée sont dans la ville (Freetown, ndlr). Le désaccord est visible entre eux. Tout est parti de la décision des autorités d’envoyer dans la capitale, des militaires qui étaient dans les régions. Cette décision n’a pas fait que des heureux parmi ceux qui étaient déployés à Freetown. Ceux qui sont là n’admettent pas la démarche. Ils se sont sentis affaiblis et se voient considérer comme des traitres aux yeux du Pouvoir. Ils sentaient qu’on ne tardera pas à se débarrasser d’eux. Du coup, ils se sont fait entendre.

Aujourd’hui, ceux qui sont venus occupent certaines parties de la ville. D’ailleurs, les deux factions chacune est maitre d’un endroit avec des hommes armés. On ne peut pas dire qui, des deux factions rivales, a défoncé le magasin d’armement de Wilberforce situé non loin de la résidence présidentielle appelée ‘PRESDENT LOGE’’. Il est différent du grand palais présidentiel. Les évènements ont débuté vers 2H du matin.

Des témoins ont indiqué que les assaillants ont voulu contrôler la résidence mais ils se sont heurtés à une forte résistance. Ils ont quitté, ensuite c’est la grande prison de ‘’Pademba ROAD’’ qui a été attaquée. Nous avons appris que des prisonniers ont été libérés dont des militaires qui étaient arrêtés il y a quelques semaines. Ce sont des hommes de rang appartenant aux différents corps d’élite en colère. Actuellement, ça tire partout. Des jeunes incontrôlés sont visibles dans certains quartiers de la banlieue. La psychose est grande » a expliqué Solomani Sankoh, un habitant de Freetown.

M. Jalloh, un guinéen d’origine et professeur de français à Freetown craint une tentative de coups d’Etat qui pourrait plonger le pays dans des lendemains incertains alors que l’inflation peine à être maîtrisée.

« La situation qui prévaut dans le pays est d’ordre économique d’abord. La crise ressentie est profonde alors que même la farine vient en partie de la Guinée. On n’a pas de minoteries ici. La moindre rupture de la production en Guinée, nous sommes les premiers à sentir ici. Ensuite, le président a lancé son projet de changement de billets de banque pour retirer les anciens, mais sa politique n’a pas abouti. Du coup, l’inflation gagne du terrain. En fait, ils ont injecté de nouveaux billets sans pouvoir retirer les anciens. C’est la cause principale de l’inflation.

Dans l’administration, dans l’armée, il y a des défauts de paiements, le pauvre citoyen lambda ne voit pas le bout du tunnel. En réalité, tout le monde souhaite la fin du régime. Dans l’armée, ça ne parle pas mais les humeurs ne sont pas bonnes. La cohabitation est difficile. Pour le moment, il est tôt pour parler de volonté de renverser le régime actuel, mais les deux factions militaires, chacun cherche à contrôler Freetown. Voici ce que nous vivons là depuis quelques jours. Nous avons appris que des véhicules sont vandalisées au centre-ville » explique ce professeur.

Cette situation d’incertitude intervient alors que la Sierra Leone n’a pas fini de penser ses plaies de ses deux décennies de guerre civile pendant lesquelles des milliers de morts ont été enregistrés.

Alpha Ousmane Bah

Pour Africaguinee.com

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