Dénonciations à la Crief : « Une centaine de hauts commis de l’Etat sont concernés… », révèle Alsény Farenta Camara

CONAKRY-L’activiste Alsény Farenta Camara a décidé d’ouvrir un front devant la Cour de Répression des Infractions Économiques et Financières (CRIEF). Suite à ses premières dénonciations, le parquet spécial de la Cour anti-corruption a saisi l’Agence nationale de lutte contre la Corruption et de promotion de la bonne gouvernance (ANLC) pour mener des « investigations préalables » visant l’ex Premier ministre Dr Bernard GOUMOU et trois membres de son Gouvernement déchu le 19 février dernier. Dans un entretien accordé à Africaguinee.com, M. Camara a indiqué que son action s’inscrit dans le cadre de lutte citoyenne et du contrôle citoyen de l’action publique. Il confie qu’une centaine de hauts commis de l’Etat sont concernés.

AFRICAGUINEE.COM : Le Procureur spécial de la CRIEF a saisi l’Agence Nationale de Lutte contre la Corruption en vue de mener des « investigations préalables » suite à vos dénonciations. Quels sont vos premières impressions ?

ALSÉNY FARENTA CAMARA : Merci de l’intérêt que vous placez à cette lutte citoyenne qui s’inscrit dans le cadre du contrôle citoyen de l’action publique, à travers la moralisation des affaires publiques, la transparence budgétaire et la redevabilité dans la gestion et l’organisation des affaires de l’Etat.

C’est évident que les premiers pas de cette procédure de dénonciation portée auprès de la CRIEF est salutaire. Je pense qu’il y a une volonté d’aller au fonds du dossier, même si j’ai des réserves par rapport au courrier que le procureur spécial m’a envoyé, m’informant déjà de ce qui est en train de se passer au niveau de l’agence nationale de lutte contre la corruption.

Pourquoi vous émettez des réserves ?

J’émets des réserves dans la mesure où si je prends l’article 96 de la Loi portant Prévention, Détection et Répression de la corruption et les infractions assimilées, l’aliéna 1 nous indique que : toute personne peut porter des dénonciations auprès du procureur de la république ou de l’agence nationale de la lutte contre la corruption. Et l’article 2 nous dit que : lorsque le procureur est saisi avec tout ce qu’il faut, il saisit directement les officiers de police judiciaire pour l’ouverture des enquêtes.

Mais vous allez constater que cette fois-ci, le procureur n’a pas saisi les officiers de police judiciaire pour ouvrir l’enquête. Je ne doute pas de sa moralité mais plutôt, il a saisi l’agence nationale de la lutte contre la corruption. Moi en tant que citoyen et l’agence nationale de la lutte contre la corruption jouons le même rôle de dénonciateur. Donc, si c’est l’agence nationale de lutte contre la corruption qui mène des enquêtes, alors je crains qu’en tant que structure administrative, elle ne puisse vraiment conduire la procédure jusqu’au bout, bien que l’agence aussi m’a rassurée qu’elle va mener les investigations en toute intégrité. Donc, c’est ma crainte parce que selon l’article 96 de la Loi anti-corruption, le procureur qui doit saisir des officiers de police judiciaire, mais là, en l’occurrence, il a plutôt saisi l’agence nationale de lutte contre la corruption.

On parle d’enquêtes préalables, ça veut dire quoi concrètement ?

Je ne suis pas juriste mais j’essaie de lire les textes et prendre des initiatives en fonction des éléments de preuve que je dispose pour saisir les autorités judiciaires. Mais en ce qui concerne l’investigation préalable là je ne saurais le dire du point de vue juridique.

De quoi soupçonnez-vous ces personnalités ?

Ils sont soupçonnés entre autres de malversation financière, de violation du code des marchés publics, notamment le contournement des règles de mise en concurrence, de détournement de deniers publics, d’enrichissement illicite et de corruption aggravée.

Pour le cas du Dr Bernard Goumou, faites-vous allusion à l’attribution du marché relatif à la rénovation des Premiers ministres ?

Absolument ! Il s’agit de ce dossier parce que c’est un marché qui viole la procédure de mise en concurrence et qui viole gravement le code des marchés publics. Aujourd’hui, tout le monde est au courant que la corruption est endémique dans notre pays, elle aggrave l’injustice sociale et affecte de manière disproportionnelle les couches les plus vulnérables de notre pays.  Il faut que cela cesse.

Qu’en est-il de l’ex ministre de l’économie et des finances ?

En fait, c’est le mutualisme de corruption (présumée) entre lui et le premier ministre Dr Bernard Goumou. Le chef du Gouvernement d’alors a saisi le ministre de l’économie et des finances, Moussa Cissé qui a réitéré qu’il était sur la voie légale alors qu’ils étaient tous sur la voie illégale. Donc, ils ont contourné les procédures de mise en concurrence en violant le code des marchés publics.

Que reprochez -vous à Ousmane Gaoual Diallo et à Charles Alphonse Wright ?

L’ex ministre des télécoms, c’est l’attribution du marché pour la rénovation de son département, (ministère des postes, télécommunication et de l’économie numérique), évalué à 65 milliards GNF.

Pour ce qui concerne Alphonse Charles Wright, il se trouve que dans son département, le ministère de la justice et des droits de l’homme, il a commis pas mal de violations des règles de mise en concurrence autour des marchés publics. C’est le cas de la rénovation de Maison Centrale de Conakry.

Et d’ailleurs pour lui, ce n’est pas la seule procédure. Il y a d’autres procédures le concernant. Quand je vais finir de réunir les éléments probants, je saisirai le parquet spécial. Donc, d’autres sont en cours.

Le code des marchés publics prévoit des dérogations en matière d’attribution des marchés. Avez-vous tenu compte de ça avant ces signalements ?

Oui effectivement. C’est vrai, il y a des règles des dérogations mais également il y a un plafond. C’est-à-dire un seuil à ne pas dépasser. Lorsqu’on dépasse ce seuil, on est en porte-à-faux avec le code des marchés publics et de la loi. Donc, c’est dans ce sens que j’ai saisi la CRIEF pour qu’il y ait une manifestation de la vérité dans ces marchés douteux.

Quelle va être la prochaine étape ?

Même ce lundi 15 avril 2024, je serai à la CRIEF pour trois (3) autres dossiers. Il y a plusieurs départements ministériels et des régies financières qui sont concernés par cette démarche citoyenne pour pouvoir moraliser les affaires publiques, mais aussi amener les dirigeants à rendre compte de leur gestion aux citoyens dont ils sont les mandataires.

Voulez-vous dire que c’est le début d’une série ?

Il y a une centaine de hauts commis de l’Etat qui sont concernés par cette démarche citoyenne.

A suivre !

Oumar Bady Diallo

Pour Africaguinee.com

Créé le 15 avril 2024 12:12

Nous vous proposons aussi

TAGS

étiquettes: , ,

RAM

SONOCO

TOTAL

UNICEF

LONAGUI

cbg_gif_300x300

CBG

UBA

smb-2

Consortium SMB-Winning

Annonces

Recommandé pour vous

Annonces