Cas « Guineematin.com » : Nouhou Baldé tire la sonnette d’alarme…

CONAKRY-Depuis un mois dix jours, le site d’informations Guineematin.com est quasiment inaccessible en Guinée. Pour pouvoir surfer sur le site, il faut énormément de « gymnastiques ». Il faut soit, passer par un VPN ou utiliser le site miroir développé par reporter sans frontières.  L’administrateur général de ce média en ligne tire la sonne d’alarme. Nouhou Baldé que nous avons interrogé explique comment il a constaté cette censure. Il interpelle les autorités et la presse guinéenne. Entretien !

AFRICAGUINEE.COM : Votre site d’informations « Guineematin.com » est difficile d’accès depuis un peu plus d’un mois. Dites-nous comment cela est arrivé ?

NOUHOU BALDÉ : En effet, depuis plus de 40 jours le site d’informations Guineematin.com est censuré en République de Guinée. Personnellement, c’est le 15 août qu’on m’a alerté. Ce sont des confrères journalistes qui m’ont appelé pour me dire que le site avait des soucis, mais à l’époque je pensais que c’est eux qui avaient des soucis. Je les conseillais de changer de navigateur, d’opérateur de redémarrer leurs appareils. Finalement, j’ai compris que c’est sérieux. Puisqu’il y a eu plusieurs appels et des écrits des personnes qui se plaignaient. Voilà comment j’ai été informé.

J’ai contacté mon webmaster qui m’avait fait des captures d’écran pour me montrer que le site n’avait pas de problèmes. Au final, je me suis rendu compte qu’il y avait des problèmes sur mon ordinateur. C’est ainsi j’ai écrit aux hébergeurs qui ont fait une triangulation pour déterminer à quel niveau où se situe le problème et après ils m’ont suggéré de voir avec les fournisseurs d’accès d’internet en Guinée parce que selon eux le problème se trouve en Guinée. J’ai donc pris contact avec les fournisseurs d’accès à internet en Guinée. Quelqu’un que j’avais contacté m’avait aussitôt dit qu’ils ne feraient pas ça. Il m’a dit qu’ils n’avaient aucun intérêt à bloquer l’accès aux sites d’informations, qu’au contraire ils veulent que les sites d’informations soient visités, que les gens viennent consommer leur data. Et deuxièmement, c’est illégal. Mieux, s’ils font ça, la victime peut porter plainte et si elle gagne le procès, ça va leur coûter beaucoup d’argent. Mais il m’a donné des conseils et m’a dit qui est-ce qu’il faut voir pour avoir beaucoup d’informations. C’est ainsi que j’ai poussé mes investigations. Finalement, un technicien qui se trouve dans une société de téléphonie de la place a vérifié pour moi et m’a informé par après qu’il y a effectivement un blocage. Il m’a dit que ce n’est pas les opérateurs de téléphonie et ni les fournisseurs d’accès à internet qui sont derrière.

Ce contact m’a dit de voir avec les services de l’Etat parce que selon lui ça doit être au niveau de l’ARPT (autorité de régulation des postes et télécommunications) ou de la GUILAB (guinéenne de large bande). Encore, j’ai contacté des connaissances à l’ARPT. Un ami m’a annoncé la mauvaise nouvelle. Mais tout ça je voyais des amis, je ne faisais pas de façon formelle, je contactais des amis à moi qui peuvent me faire confiance, qui peuvent investiguer et me dire ce qu’ils ont constaté. Quand j’ai compris que c’est des dirigeants qui ont décidé de censurer le site Guineematin.com, j’ai contacté l’AGUIPEL (association guinéenne de la presse en ligne). Du 15 au 21 août, je faisais des démarches sans bruit. Parce que pour moi, c’est une mauvaise communication de dire que Guineemation.com est inaccessible.

Honnêtement, je ne voulais pas communiquer là-dessus mais quand on m’a prouvé réellement que si on n’actionne pas au niveau supérieur ça ne marchera pas alors j’étais dans l’obligation de partager l’information avec mes collègues, c’est ainsi donc j’en ai parlé avec LAGUIPEL qui a partagé l’information avec beaucoup d’autres journalistes et le 28 août, c’est-à-dire une semaine après LAGUIPEL a déposé une plainte à la HAC (haute autorité de la communication) et le 29 août la HAC a écrit à l’ARPT. A ce niveau, je remercie le président de la HAC et tous les commissaires parce qu’il y a eu une célérité. Cette plainte de la HAC qui pointe du doigt l’ARPT visait X et l’ARPT a répondu à la HAC le 4 septembre pour l’informer qu’elle a reçu la lettre et qu’elle était en train de mener ses investigations. Mais depuis ce jour jusqu’aujourd’hui aucune information et aucune communication officielle ne sont sorties.

Quelles sont les conséquences de ce blocage notamment sur l’audience et sur les revenus ?

C’est extrêmement grave ! Je ne le souhaite pas, mais ça peut amener une entreprise à fermer et cesser ses activités. Je rappelle qu’il y avait avant nous, un site d’informations qui en avait été victime et qui avait fini par fermer, c’est Conakryactu.com créé par le journaliste sénégalais, Check Yérim Check, il avait fait des papiers ici sur l’ancien ministre de la défense. Personne n’a pris une décision pour demander à Yerim de sortir de Conakry ou à arrêter de travailler à son site, mais puisqu’il écrivait pour la Guinée et les guinéens et le site n’était plus accessible en Guinée donc il a fini par fermer. Aujourd’hui c’est extrêmement compliqué, je n’ose même pas évoquer les statistiques tellement que c’est grave. Vous constatez qu’en Guinée soit on utilise un VPN ou on utilise le site miroir créé par Reporters Sans Frontières pour lutter contre la censure justement pour pouvoir visiter Guineematin.com. Mais malheureusement, plus de 60% de nos lecteurs sont en Guinée et l’écrasante majorité de ces lecteurs ne sont pas forcement des gens qui sont dans les bureaux, des gens qui ont des diplômes, ce sont des citoyens lambda qui même pour installer un VPN peut paraitre très compliqué et moi-même je ne retiens pas le site miroir pour dire à tout le monde.

Nous travaillons mais nos lecteurs se demandent encore qu’est-ce qui se passe, est-ce qu’on continue à travailler ? Tous nos travailleurs sont là, j’ai même pris deux autres stagiaires pour renforcer l’équipe. Donc, nous travaillons et je ne veux pas qu’on donne raison à ceux qui nous veulent malheur, à ceux qui veulent qu’on ferme mais la vérité c’est très compliqué.

Que comptez-vous faire maintenant ?

C’est de rassurer tous les confrères journalistes qu’on n’a absolument rien fait de repréhensible ! Pour preuve même, il n’y aucune plainte émise contre nous. Les méchantes personnes, les lâches personnes qui veulent nous créer des problèmes, elles sont lâches ces personnes parce qu’elles ne sortent pas leurs visages, elles n’assument ce qu’elles font, ces lâches personnes-là veulent justement nous isoler, nous détruire et sans doute se retourner contre d’autres qui croient pouvoir continuer à travailler de façon libre et indépendante dans ce pays. Parce qu’on n’a absolument rien fait de repréhensible, on n’a reçu aucune plainte. Donc, je demande à la presse guinéenne de bien vouloir accepter de participer à cette campagne contre la censure et de savoir qu’on est tous concerné.

Quel message avez-vous à lancer ?

C’est d’abord réitérer l’appel à tous les journalistes que Guineematin.com n’est coupable de rien, sinon on aurait reçu une plainte. Donc, nous ne devons pas laisser les gens nous dicter ce qu’ils veulent dans ce pays. Il y a des lois qui régissent le fonctionnement de notre métier, il y a des principes que nous respectons. Depuis 9 ans nous sommes là et on n’a jamais reçu une plainte parce que je précise que la seule fois qu’on avait été suspendu durant une semaine sans travailler pendant ces 9 ans, c’était lorsque la HAC nous avait suspendu en 2020. Même cette suspension, l’opinion est témoin qu’elle est intervenue une heure après la fermeture des bureaux de vote le 18 octobre de 2020, on nous reprochait de vouloir publier des résultats qui n’existaient nulle part. Donc, on nous punissait pour des préjugés parce qu’on n’avait rien fait. Ce pourquoi on m’avait personnellement appelé pour demander que la page Facebook de Guineematin.com arrête faire le direct sur des opérations de dépouillement qui sont publiques, c’est la loi qui le dit. Donc, c’est la seule fois qu’on a été sanctionné et tout le monde sait que cette sanction était illégale. Donc, pendant 9 ans jamais le moindre problème légal, vous ne pouvez pas retrouver un article où on a été confronté à un citoyen, à un administrateur, à une quelconque institution pour dire qu’on a violé tel principe ou tel principe jusqu’à présent. Et aujourd’hui on utilise juste la force, on fait de la dictature pour nous faire taire. Nous ne devons pas laisser passer ça.

Entretien réalisé par Oumar Bady Diallo

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 666 134 023

Créé le 26 septembre 2023 10:10

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