Cas des 7 milliards Us mobilisés pour la Guinée : Les « alertes et recommandations » de l’ex Premier ministre Kabiné Komara…

CONAKRY-La table ronde tenue à Dubaï sur le financement du Programme de Référence Intérimaire (PRI) s’est conclue par un engagement des bailleurs de mobiliser 7 milliards de dollars en faveur de la Guinée. Quels enseignements faut-il tirer de ce rendez-vous ? Que doit faire le Gouvernement pour décaisser les fonds ? En marge des travaux, Africaguinee.com a interrogé l’ancien premier ministre Kabiné Komara. Le banquier et consultant international a livré son analyse. Dans cet entretien, l’ex Haut-Commissaire de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) lance deux alertes tout en faisant des recommandations au Gouvernement.

La table ronde des bailleurs sur le financement du Programme de Référence Intérimaire s’est conclue par une enveloppe évaluée à plus de 7 milliards de dollars. Quelles leçons tirez-vous de ce rendez-vous ?

KABINE KOMARA : J’en tire trois leçons et deux remarques. La première leçon, ce que les documents étaient bien préparés et à temps, ensuite c’est bien présenté. Il faut féliciter le Ministère du Plan et les ministères sectoriels pour ce travail. La deuxième chose, ce que le gouvernement a été assez réaliste et stratège en présentant un programme sur trois ans mais en venant déjà avec le fait que lui-même a déjà financé les 70%. Alors cela montre l’engagement et le sérieux qu’ils ont par rapport à ce programme. C’est ce qui fait que le gap résiduel était de 4 milliards et demi sur le total du programme qui oscille entre 12 à 13 milliards de dollars était facilement analysable et compréhensible par les bailleurs de fonds. Parce que très souvent, les gens vont vers les bailleurs de fonds avec toute petite enveloppe sur laquelle eux-mêmes n’ont rien engagé.

Enfin la troisième leçon que je tire, ce que la plupart des bailleurs de fonds se sont engagés avec la conviction que ceci permettra à la Guinée de conduire la transition à terme. Puisque le programme comprend à la fois les investissements physiques, les études mais aussi le financement des activités liées à la transition sur le plan politique, l’organisation des élections et autres. Je crois que cela a un enjeu important sur lequel il faudra retenir que Dubaï n’a pas été seulement un cadeau mais Dubaï a été un engagement réciproque entre la communauté internationale et le gouvernement guinéen.

Maintenant les deux alertes que je fais, ce que premièrement, nous avons beaucoup de fragilité. Une des fragilités c’est sur le plan environnemental, beaucoup de nos investissements risquent de ne rien valoir demain si nous ne protégeons pas notre environnement, si nos forêts sont détruites. Si nos eaux sont taries nos barrages ne serviront à rien, l’agriculture ne sera pas productive et beaucoup d’activités. Donc, j’ai attiré l’attention des bailleurs de fonds pour qu’une attention particulière soit accordée à la protection de l’écologie en Guinée. Parce que protéger l’écologie en Guinée, c’est protéger les autres pays voisins. Parce que c’est de la Guinée que part la plupart les cours d’eau qui arrosent les autres pays de la région. La sécurité alimentaire du Mali, du Sénégal, du Libérai, de la Sierra Léone et même de la Mauritanie dépend des eaux venant de la Guinée.

La deuxième alerte c’est par rapport aux données. Pour faire des projets et prévoir l’avenir suppose que vous avez des bonnes statistiques. Nous attirons des gens pour des PPP (partenariat public-privé). Pour que le privé s’engage sur des engagements importants, il faut qu’il soit sûr que les données qu’il a recueillies ou qu’on lui donne sont des données fiables. Et là, nous avons un gap à rattraper. Le plus vite nous mettrons en place un recueil de données fiables, permanentes et continuelles, le mieux nous convaincrons les bailleurs et surtout nous attirerons des investisseurs privés dans les grands projets PPP que nous voulons faire. Que ce soit dans les routes, dans l’énergie et les chemins de fer.

Avez-vous des recommandations à formuler aux autorités ?

S’il y a une recommandation à faire, c’est l’accélération avec laquelle il faut décaisser (les fonds). Notre faiblesse a toujours été le taux de décaissement. Les projets mettent beaucoup de temps pour sortir de l’argent, les procédures de passation des marchés sont assez complexes. Or, nous présentons un programme intérimaire et il ne reste qu’un an et demi pour décaisser ces sommes qui ont été indiqués. Donc, il faut mettre des procédures pour alléger et en même temps mettre des comités de suivi de surveillance par bailleur de fonds pour que les sommes qui ont été annoncés soient disponibles à temps et que ces sommes soient engagées dans des projets de manière que ces projets se réalisent à temps de manière professionnelle.

Sur quoi selon vous le gouvernement devrait-il s’accentuer pour lever ces 7 milliards de dollars ?

Dans une réunion des bailleurs de fonds, il y a les annonces. Ensuite, il y a une deuxième étape qui est la mobilisation réelle. Entre l’annonce et la mobilisation réelle il peut se passer un temps fou, si d’abord vous n’avez pas des projets bien étudiés et deuxièmement si vous ne mettez pas en place un suivi rigoureux entre vous et les bailleurs des fonds. Parce qu’eux-mêmes aussi, ils ont leurs processus internes qui sont parfois très complexes. Donc, on doit les coller comme disent les footballeurs à la culotte pour que tous les bailleurs de fonds qui se sont engagés sur un projet donné, nous puissions aller avec lui, savoir qu’est-ce qui manque, décaisser à temps.

Les 7 milliards qui ont été annoncés ne seront dans nos caisses demain. Non. Il y a des étapes qui sont extrêmement complexes, si nous ne faisons pas un chronogramme de chaque projet de chaque bailleur de fonds pour que cet argent revienne à temps dans nos caisses et que les projets même soient lancés avec des appels offres et des suivis alors nous risquons vraiment de ne pas réussir ce que nous avons engagé.

Les annonces et les bonnes intentions partent des dossiers que vous avez préparés et présentés. Il se trouve que la qualité des dossiers est appréciée par tout le monde. Ce qui fait 50% de travail. Le reste des 50%, ce sont les autres étapes de procédure, de suivi et de décaissement.

Vous avez parlé du financement de certaines activités qui permettraient le retour à l’ordre constitutionnel. A quoi vous faisiez allusion concrètement ?

Certains bailleurs de fonds tel que l’Union Européenne et le PNUD se sont engagés à décaisser de l’argent pour le suivi, la constitution, des élections, tout le système logistique, la fourniture des consultants. Ça c’est extrêmement important parce que le volet ressource humaine et le volet d’expertise pour certaines taches est essentiel. Si on ne les a pas à temps naturellement il y aura de surplace.

Propos recueillis à Dubaï par Boubacar 1 Diallo

Pour Africaguinee.com  

Créé le 17 février 2024 20:01

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