Bah Oury : ‘’L’abrogation du code des collectivités de 2017 est un point positif…’’

Bah Oury, leader de l'UDRG

CONAKRY- Le 6 aout dernier, des dirigeants de plusieurs coalitions de partis politiques et de faitières de la société civile se sont retrouvés à Conakry en vue d’harmoniser leur démarche sur la conduite de la transition. Ces acteurs politiques qui réclament une participation effective à de véritables concertations avaient annoncé un mémorandum qu’ils entendaient déposer aux autorités de la transition. Près de dix jours après cette annonce où est-ce que nous en sommes ? Africaguinee.com a interrogé Bah Oury, l’un des leaders politiques porteurs de cette initiative. Le président de l’UDRG donne également son avis sur le décret du 9 aout pris par le chef de la junte guinéenne. Pour lui, l’abrogation du code des collectivités de 2017 est un point positif. Un des rares acteurs politiques qui apprécient la décision du colonel Mamadi Doumbouya.

AFRICAGUINEE.COM : Où en êtes-vous dans la préparation du mémorandum que vous comptez adresser au Gouvernement de la transition ? 

BAH OURY : Le mémorandum que la conférence des coalitions politiques et des faitières a initié depuis quelques jours est en voie de finalisation. A l’heure actuelle, les équipes chargées de sa mise en forme sont en train de faire leur travail.

Quelles seront les grandes lignes de ce mémorandum ?

Les grandes lignes concernent les propositions de la Conférence par rapport aux décisions gouvernementales concernant le budget des élections et des hypothèses de travail concernant les législatives et les présidentielles qui sont intégrées dans ce document. De ce point de vue, les décisions, sur le plan financier, sur le plan de l’orientation politique sont extrêmement importantes. D’où la nécessité pour la conférence des coalitions de faire des propositions alternatives et de dire ce qu’elle pense par rapport à certains types de décisions que le gouvernement entend mettre en œuvre dans le cadre du retour à l’ordre constitutionnel. Mais de toute façon, si tout se passe bien, d’ici la fin de la semaine, vous aurez l’intégralité de ce mémo.

Quel budget serait-il raisonnable pour le retour à l’ordre constitutionnel ?

Le mémorandum fait état de la nécessité de mettre en place s’il le faut un comité ad-hoc pour essayer d’envisager des mesures correctives ou des mesures d’ajustement par rapport à ce budget pour nous permettre d’être dans le clou. Et d’envisager d’autres moyens d’économiser de l’argent, de sursoir à certaines activités qui paraissent onéreuses et qui ne sont pas indispensables. C’est donc échanger sur toutes ces questions et faire des propositions pertinentes aux autorités sans pour autant perdre de vue que la communauté internationale pourrait réagir favorablement pour apporter son concours dans un second temps. Mais quoi qu’il en soit comme on le dit chez nous : ‘’lorsque quelqu’un te lave le dos, lave-toi le ventre’’.

C’est la meilleure manière d’être respectée et de garder une maitrise des actions indispensables concernant la destinée de notre pays. Je réitère encore, la transition guinéenne est une affaire des Guinéens principalement, ce n’est pas une affaire de la communauté internationale bien qu’elle nous apporte son secours dans la mesure de ses disponibilités et la pertinence des propositions. Mais il est de la responsabilité des autorités de la transition guinéenne de mener convenablement ce processus pour que la Guinée retrouve une stabilité constitutionnelle normale et un profil d’évolution politique et de gouvernance qui lui permettrait de s’éloigner de ces éternels recommencements.

Réagissant sur votre démarche sur Africaguinee.com, le ministre de l’administration du territoire a indiqué qu’il vous a toujours écouté par rapport vos inquiétudes sur la conduite de la transition. Est-ce insuffisant, selon vous ?

Ce qu’il a dit est vrai. Depuis un certain temps, à notre demande, c’est ce qui se passe. Mais il faut le préciser que le cadre du dialogue tel qu’il a été mis en place avec ses différentes structures n’ont pas permis de manière statutaire et organique un niveau de discussion élevé pour être suffisamment informé à bonne date de l’évolution de la transition. C’est à notre demande qu’il (ministre Mory Condé) a pris l’initiative de rencontrer les présidents des coalitions politiques. Mais ce que nous demandons, c’est une participation effective à des véritables concertations qui nous permettent d’apporter et de suggérer des points de vue susceptibles nous faire avancer collectivement. Parce que nous sommes des partenaires de la transition, le CNRD, le Gouvernement, les faitières de la société civile, les forces sociales, globalement nous sommes partenaires dans le cadre de la mise en œuvre de la transition guinéenne. Et par conséquent, nous devons, de manière régulière et officielle avoir des niveaux de concertation susceptibles à chaque pas de faire émerger ce qui est le mieux en tenant compte des erreurs du passé.

Il ne faudrait pas qu’on laisse la gestion de manière solitaire au gouvernement au risque de se retrouver à des impasses dû à des obstacles budgétaire, politique qui risquent de peser lourdement aussi bien sur le temps que sur les finances que la Guinée, pour le moment, n’en a pas.

A présent parlons de ce Décret du colonel Mamadi Doumbouya qui stipule que désormais, les chefs de quartiers et districts seront nommés par des gouverneurs. Quelle lecture faites-vous de cette décision ?

En 2017, j’ai été l’une des rares personnalités politiques à m’insurger contre ce genre d’initiatives qui allaient impacter la décentralisation en Guinée. Je leur avais proposé, texte à l’appui qu’il faut laisser nécessairement les quartiers s’autogérés dans la mise en place de conseils de quartiers émanant des associations des jeunes, des associations des femmes, des autorités morales de la localité, des personnes ressources des quartiers et autres à travers des listes qui pourraient être de genre des pétitions, de manière à ce que le conseil de quartier ait une légitimité locale dans son quartier. Et, ceux qui recueilleront par ce billet-là le soutien le plus massif seront installés comme conseils de quartier.

La proposition que nous avions faite à l’époque c’est que le maire de la commune valide la décision des populations à travers le choix d’un conseil de quartier qui recueille le plus grand nombre de voix au niveau des chefs quartiers. Cela aurait pu avoir l’avantage de respecter les histoires locales et puis d’assurer une implication de proximité la plus large en conférant aux conseils de quartier une notoriété, une légitimité réelle pour épauler l’action de la commune et les actions de l’administration de manière générale.

Si le schéma, tel qu’il est indiqué actuellement va dans ce sens, on le salue, parce que ce sera une avancée et une stabilisation du vivre ensemble et de la cohésion dans nos quartiers.

Mais ce Décret ne parle pas d’élections. C’est des nominations par des gouverneurs, ce qui est contradictoire à votre proposition…

C’est possible, mais l’arrêté que le ministère de l’administration du territoire va établir pour accompagner le Décret permettra certainement d’expliciter un certain nombre de choses. Mais quoi qu’il en soit, en termes d’élection, d’une manière ou d’une autre, l’essentiel ce que le conseil de quartier doit être et avant tout une émanation des chefs de familles des quartiers.

A supposer que cet arrêté du ministre ne réponde pas à vos attentes, qu’allez-vous faire dans ce cas ?

On attendra d’avoir une idée exacte de l’arrêté. Si c’est quelque chose, de par sa pertinence peut apporter solution temporaire avant l’adoption par le CNT un nouveau code des collectivités et de loi de la décentralisation, donc une gestion transitoire sans heurts ou violences, pourquoi pas ? Si par contre ça créait une confusion supplémentaire ou risque de créer la confusion ou du vivre ensemble, à ce moment-là nous aviserions.

Pour certains politiques, cette décision du colonel est une stratégique qui lui permettrait dans le temps d’en faire un instrument politique en vue de rester longtemps au pouvoir. Qu’en pensez-vous ?

D’ores et déjà la loi organique qui a été abrogée ainsi, dès 2017 j’avais exprimé mon désaccord de manière formelle. Son abrogation est un point positif à mes yeux. C’est vrai qu’il y a une méfiance des guinéens vis-à-vis de toute décision qui pourrait avoir un impact dans la gestion du processus électoral. Les réactions dont vous faites allusion montrent qu’en fait, ceux qui avaient élaboré la loi organique en 2017 avait une certaine volonté de confisquer le pouvoir en ayant une mainmise sur les quartiers pour des manipulations électoralistes. Donc ça confirme la raison pour laquelle, en ce moment-là, j’avais exprimé mon désaccord.

Dans le contexte actuel, nous sommes dans une transition. Et, la transition est un engagement vis-à-vis du peuple de Guinée et vis-à-vis de la communauté internationale. De ce point de vue, il est clair, ni le CNRD, ni les membres du gouvernement, ni le CNT ne seront une partie prenante dans le cadre des élections à venir. Maintenant, si certains pensent que tout texte peut être violé n’importe comment, cela veut dire que c’est eux, dans leur tête facilitent la voie à culture de révisionnisme, de mauvaise gouvernance institutionnelle dont ce pays est habitué. Il y a des cotes d’honneurs et d’éthique que tout gouvernant doit respecter pour ne pas être dans une dynamique qui peut s’assimiler à une forme d’indignité. Vous avez vu l’histoire de nos ces dernières années ; tous ceux qui ont, d’une manière ou autre n’ont pas respecté leur engagement vis-à-vis du peuple de Guinée ont eu à le regretter.

Interview réalisée par Siddy Koundara Diallo

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 664 72 76 28  

Créé le 15 août 2023 12:38

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