Sur les traces de Bah Sadio « djéré lêlé » : Documentaire exclusif d’Africaguinee.com…

LELOUMA- On vous l’avait annoncé il y a un mois.  L’enquête documentaire de l’artiste Amadou Sadio Bah, connu sous le nom de « Bah Sadio », auteur de la célébrissime chanson « djéré lêlé » est enfin là. 47 ans après la disparition de ce chanteur, Africaguinee.com revient sur sa vie.

Dans l’acte 1 de l’enquête documentaire, nous étions allés à la rencontre d’Abdoulaye Carter Diallo, ami, tuteur de Bah Sadio. Dans ce témoignage, il lève le voile sur la vie de ce chanteur hors norme. Il nous fait découvrir la guitare, ainsi que certains objets de son ami, jalousement gardés. M. Carter Diallo avait relaté les moments de gloire de Bah Sadio, sa maladie, son décès en France, à l’âge de 36 ans.

Dans la suite de cette enquête documentaire axée sur cette virtuose, ressuscitée récemment par Soul Bang’s, (lauréat du prix découverte Rfi 2016) à travers une belle reprise du morceau fétiche Djéré Lélé, nous avons côtoyé et interrogé les proches de Bah Sadio. Son enfance, ses débuts dans la musique, son voyage vers le Sénégal, Africaguinee.com vous dit tout sur cet artiste.

Nous sommes à Bhoundou-Tely, petite bourgade située dans le district de Sentou, commune rurale de Thian’guel Bori, préfecture de Lélouma, en moyenne Guinée. C’est dans ce petit village perdu entre les montagnes du Fuuta et difficile d’accès où poussa le premier cri du bébé dont la voix résonne encore près d’un demi-siècle après sa mort en France. Bah Sadio ou M’Baldé Sadio. Né le 22 Mars 1940 sous l’administration coloniale appelée Guinée française, cet artiste est encore présent dans les esprits. Il a été rendu immortel par son œuvre.

Le nom Sadio est venu du fait qu’il fut le jeune-frère direct d’un triplé de sa mère. Comme il est de tradition dans la communauté peule, l’enfant qui vient après des jumeaux portera Sadio. À cette époque, Lélouma n’était pas une préfecture et Thianguel Bori n’était érigé en sous-préfecture. Les deux localités étaient des arrondissements rattachés à Labé. Bhoundou-Tely tire son nom de la source d’eau du village entouré d’une forêt de Tély, un arbre toxique d’Afrique qui a pour nom scientifique : ‘’Erythrophleum Guineense’’. Bhoundou sous les arbres Tély a vite donné Bhoundou-Tely, le nom du village.  Pour y arriver, il faut du temps entre Thian’guel Bori centre et le secteur. Il faut parcourir un chemin rocheux et caillouteux, parfois il est plus facile de faire le voyage à pied que d’emprunter un engin. D’un côté, il fait frontière avec Yembering, d’un autre il est bordé par le fleuve Komba, qui s’étend sur Gaoual. La plus importante partie c’est Lélouma d’où il relève.

Le talent du jeune est parti des travaux champêtres. Sa passion pour la musique est partie du concept en pular : ‘‘Haldubhe no weldi welda, ko hunnubhe ko haldi weldi ». Ce qui pourrait se traduire littéralement :  »les bons comptes font les bons amis ». Ce proverbe peul devenu la base de la chanson de Bah Sadio est tiré d’une conversation entre son père et des prestataires de champs. Il constitue la trame de toutes les chansons de Bah Sadio.

Le dernier séjour de Bah Sadio dans son village remonte en 1968, deux ans avant son départ pour la France via Dakar. Il avait laissé une femme au village qu’il n’a presque pas connu. Son épouse Aicha Diombo s’est remariée par la suite alors qu’elle n’avait pas fait d’enfant pour lui.

« Bah Sadio qui était mon grand frère est né en 1940. Notre maman s’appelait Adama Diouldé. Il a été appelé Sadio parce qu’il est né après la naissance de trois jumeaux garçons chez ma maman.  La famille a convenu de l’appeler Sadio comme c’est la coutume chez les peulhs. Notre frère a appris à chanter pendant qu’il partait en brousse pour la surveillance des champs. Et Dieu a fait qu’il emprunte ce chemin. Dans ses chansons, Bah Sadio n’a jamais désobéi aux interdits. Durant toute sa vie, il a été d’un soutien majeur pour la famille. De la nourriture aux vêtements, de l’argent et beaucoup d’autres choses, il nous a aidé à la hauteur de ses moyens. C’est en 1968 qu’il a quitté la famille. En bougeant d’ici il ne nous avait pas dit qu’il partait en France. C’est à Dakar qu’il disait partir. Mais lorsqu’il est arrivé en France, il nous écrivait des lettres qui sont encore là. Depuis cette date il n’est plus revenu. On échangeait via des lettres jusqu’à son décès en 1976. Avant d’aller en aventure, à chaque fois qu’il partait en concert hors pays, il revenait à la maison, à Thianguel Bori. A chacune de ses sorties, une fois en famille il nous rapportait de la nourriture, des habits qu’il distribuait à tout le monde, à l’époque, nos deux parents biologiques vivaient. Argent, nourriture et habits, c’était à sa charge. Dans ses lettres, Il disait qu’il ne pouvait pas oublier ses parents, ses origines et qu’il allait bientôt rentrer au pays. Il avait l’amour de la Guinée, son pays » confie Sameely Bah, jeune-frère de l’artiste qui indique son Bah Sadio a laissé une femme sans enfant à son départ de la Guinée.

« D’ailleurs il s’était marié ici à une femme de notre village. Son épouse s’appelait Aïcha Djombo. Mais c’est ici qu’il l’avait laissée avant de partir en aventure. Quand son aventure s’est prolongée, son épouse n’a pas eu les moyens de le rejoindre, et qu’il est par la suite est décédé, sa femme s’est remariée à un monsieur dans le village Bassara. Malheureusement le couple Bah Sadio et Aïcha Djombo n’a pas eu d’enfants durant leur mariage. Son ex-femme est décédée récemment aussi », déclare Sameely Bah

La triste nouvelle sur la mort de Bah Sadio a plongé sa famille dans une profonde tristesse. Depuis,  entendre la voix de Sadio constitue souvent un moment d’émotions. Sameely Bah n’en revient toujours pas

« C’était de la grande tristesse, de la désolation. Tout le monde est unanime qu’il est mort de façon naturelle. Son heure était arrivée. Tout le monde était dans la tristesse. Il y a un jeune du nom de Mamadou Samba ici, il avait fait deux jours sans manger à cause de cette perte inattendue. Avant, je pleurais à chaque vois j’entends sa musique mais avec le temps je me suis rendu compte que les larmes ne servent à rien. Maintenant, quand nous les membres de la famille on entend ses chansons c’est la pitié qu’on ressent ».

La renommée de Bhoundou-Tely vient du succès de Bah Sadio qui magnifie son village natal dans ses chansons. Bah Sadio rappelle dans certains morceaux qu’il est de Bhoudoutely Daande Komba, littéralement(Bhoundoutely au bord du fleuve Komba NDLR). Les cases familiales remplacées par des maisons modestes constituent une sorte de musée que les proches montrent aux passants pour expliquer l’origine de l’artiste Jeere-Leele. Alpha Oumar retient encore du moment où le décès de son oncle maternel a été annoncé au village.

« Bah Sadio, c’est mon oncle maternel, ma mère est sa jeune-sœur de lait. Là où nous sommes arrêtés c’est la cour familiale de Bah Sadio, sur la position de ce bâtiment en dur derrière moi, c’est là que la case de sa mère était en face celle de son père. Nous avons appris que du bien de l’artiste, son talent et ses années de gloire. Que de la bonne réputation, nous sommes nés et grandi pour apprendre la renommée de Bah Sadio. Il est décédé très tôt. Je me rappelle un peu des mouvements en famille lors de son décès. À partir de là nous avons compris c’est un des nôtres. Nous ne l’avons pas connu physiquement, l’on se rappelle de lui à travers les photos que nous avons sur place ici. Quand le jour où la nouvelle de son décès est parvenue à la famille, nous étions des adolescents, je me rappelle des mouvements de foule ici avec des pleurs partout, mon souvenir de lui commence là. Plusieurs années après, sa musique continue à être consommée partout » se souvient Alpha Oumar Diallo, neveu de l’artiste.

A Bhoundoutely, village natal de Mbalde Sadio, une vieille photo de l’artiste retouchée et quelques lettres qu’il a expédiées constituent l’essentiel du souvenir physique que la famille dispose. Dans les archives familiales, des documents de succession pour les droits d’auteurs du défunt, une copie du certificat de décès et une note écrite en arabe par Feu Elhadj Ataoulahi de la famille Bah  de Labé. C’est par cet écrit que les proches de Bah Sadio ont eu la certitude qu’il n’a pas été fusillé. De nos jours, la famille tient au rapatriement de sa dépouille.

Contenu de la lettre traduite en Français 

« La lettre annonçant son décès c’est Ataoulahi, fils de Thierno Abdourahmane de Labé, un doyen à l’imam Elhadj Badrou qui l’avait écrite avec les caractères arabes. Ce dernier était avec Bah Sadio lorsqu’il est décédé. En plus de Attaoulahi, il y avait un Abdoulaye Wossou Diallo, les deux étaient avec lui jusqu’à son enterrement. A sa mort, ils ont eu mon adresse, nous avons échangé et ils m’ont fait savoir que c’est dans leurs mains que mon frère est mort. Certains disaient qu’il avait été fusillé, mais ce que nous savons, c’est une maladie qui a été la cause de la mort de Bah Sadio. Il voulait venir au pays voir la famille. En Guinée, tous les papiers nécessaires étaient pratiquement faits, c’est à Thianguel Bori ici qu’on a confectionné tous les documents pour lui. Il ne lui restait qu’un seul, l’extrait de naissance. On a préparé ce document, c’est entre temps qu’on nous a annoncé son décès. Malheureusement aussi on n’a pas pu ramener son corps.

Mais Attaoulah et Abdoulaye Wossou nous ont dit qu’ils ne l’ont pas enterré directement. Que c’est dans une caisse qu’ils ont mis son corps. C’était au cas où la famille aurait les moyens de rapatrier son corps. Ceux-ci ont témoigné que Bah Sadio était une bonne personne. Il résidait dans la ville de Lyon à un moment avant de venir s’installer définitivement à Paris. On a appris des rumeurs selon lesquelles il aurait été fusillé par une femme . Mais ceux qui étaient à son chevet n’ont jamais rapporté de telles choses. Dans la lettre, il a été dit qu’il est mort des suites de maladie. C’est cette version que nous avons officiellement. Bah Sadio ne nous a pas dit qu’il a avait épousé une femme, là-bas. Les gens ont raconté cela mais jamais on a cru. C’est un appel que nous lançons à l’endroit de tout le monde. Autorités, personnes de bonne volonté, nous sollicitons le rapatriement de son corps afin qu’il soit enterré dans la terre de ses ancêtres, auprès de ses parents», certifie Sameely Bah.

SAFIOULAYE BAH, Administrateur et ancien étudiant à Paris (comment j’ai fait la connaissance de Bah Sadio en France)

Safioulaye Bah, administrateur et  ancien étudiant  guinéen  en France découvre dès son arrivée à Paris Bah Sadio, comme beaucoup d’autres guinéens à Paris. À l’image de tout exilé, entendre la musique de chez soi apaise les cœurs pour un temps. Après la mort de l’artiste, il a joué un rôle pour essuyer les larmes de la femme de Bah Sadio Marie Fayza, la tunisienne noire :

« Effectivement je suis arrivé en France vers la fin de l’année 74, précisément en octobre. Alors nouvellement venu, on me faisait visiter certains endroits célèbres où se retrouvaient les guinéens. Il y avait un restaurant qui s’appelle le Samory. Mon frère Elhadj Attaoulaye qui m’a fait venir en France m’a emmené là-bas pour manger et rencontrer certains guinéens. C‘est à cette occasion que j’ai vu la première fois Bah Sadjo avec sa guitare, en train de chanter la musique pastorale. Je vais vous avouer une chose, il n’y a pas plus dur que l’exil. C’est quelque chose qu’on ne peut souhaiter à personne. On a la nostalgie du pays et ça fait très très mal. Étant à Rouen pour faire mes études, on avait la nostalgie du pays. On écoutait les chansons du pays pour nous remémorer des souvenirs du pays.

On était avec quelques jeunes guinéens. Parmi eux il y avait un certain Bachir Bah, Ourouro Bah qui  est également de Labé et qui était très branché sur la musique guinéenne. Donc il nous la jouait dans nos chambres de cité universitaire  là-bas. C‘est comme ça qu’on a aimé et connu réellement Bah Sadio. Et c’était quelque chose de formidable. Nous avons apprécié Bah Sadjo qui quelques années plus tard, est tombé malade et ensuite mort s’en est suivie. Il a été enterré là-bas, à Paris. J’ai eu l’occasion de garder quelques temps à la place Paul Verlain dans le 13ème arrondissement son épouse Faïza qui était une amie à une de mes sœurs », précise l’ancien préfet de Labé.

Aujourd’hui,  le souhait de la famille de l’artiste, c’est de voir la dépouille de leur l’artiste rapatriée en GUINÉE. L’ancien préfet de Labé, Saifoulaye voit la sollicitation noble mais émet des doutes sur la possibilité de ramener la dépouille de Bah Sadio 47 ans après son décès. Les raisons? Il évoque les lois Françaises sur les cimetières. Les tombes sont à louer :

« En Europe, on loue la tombe. Je pense que pendant 25 ans, la tombe a été louée. Au-delà, si personne ne se manifeste pour un avenant et prolonger encore de quelques années la location de la tombe, le corps est déterré. C’est dur de le dire mais je ne sais pas si la famille, au bout de ces 25 ans avait pu relancer la location de la tombe. Mais c’est une idée noble de vouloir ramener ce grand artiste guinéen, l’enterrer ici comme l’ont été les Alfa Yaya, Samory Touré, Morifindjan, qui étaient enterrés à l’étranger et qui ont été ramenés ici avec tous les honneurs. Donc ramener Bah Sadjo, aurait été une très bonne chose. Maintenant, je ne sais pas si toutefois la famille a pu prolonger cela ».

Kamissa Baldé ancienne danseuse

Sira Kamissa Baldé, septuagénaire à la fois belle-sœur et danseuse de l’artiste est nostalgique des années de gloire de feu Mbalde Sadio. Elle et son mari ont longtemps accompagné Jeere Leele dans ses tournées en Guinée. Dame Kamissa Baldé se souvient encore des honneurs réservés à l’artiste traditionnel peul lors des soirées mais aussi de la dernière retrouvaille avec Bah Sadio avant son départ pour Paris où il est rappelé à Dieu une nuit de 25 septembre 1976, des suites de maladie à seulement 36 ans.

« Mes dernières instances précieuses avec Bah Sadjo c’est à Bassara(village qui marque la limite entre Thiaguelbori, Lelouma, et Yembering, Mali, diffèrent de Bassara cité religieuse dans Koubia NDLR).  Une nuit, nous avons veillé à Bassara. C’était une soirée merveilleuse. Le lendemain on nous avait annoncé qu’il va se produire à Thiguelbori centre. Nous migrons de côté où la soirée s’est tenue jusqu’au petit matin. Nous les filles sommes rentrées au village avec beaucoup d’autres personnes. Nous avons laissé Sadio à Thiaguelbori, par après nous apprenons qu’il est parti à Labé. Pratiquement c’est là que j’ai vu l’artiste Sadio pour la dernière de ma vie. Après là-bas je ne l’ai plus revu. Les souvenirs de Sadio sont marquants. Je sortais beaucoup avec Bah Sadjo lors de ses veillées.

Avec mon mari qui est un frère ainé de Sadio nous sommes allés dans beaucoup de localités avec Bah Sadjo. A l’époque, quand on disait que Bah Sadjo devait faire une veillée dans telle localité, la mobilisation était forte. On nous demandait, nous les jeunes filles de préparer le mangé pour les hôtes et qu’il venait avec sa délégation, on aménageait une concession entière pour la mettre à sa disposition. C’est de là qu’il va aux lieux de concert.  Ses veillées refoulaient du monde. Les gens effectuaient des déplacements de longue distance pour venir se recréer au rythme de la musique de Bah Sadio. Il était très populaire à l’époque », se Souvient Sira Kamissa Baldé.

Elhadj Alpha Amadou Diallo, ami d’enfance de Bah Sadio

Alpha Amadou Diallo, devenu Elhadj il y a quelques années est un ami d’enfance de Bah Sadio depuis qu’ils n’avaient pas 10 ans. C’est depuis les champs d’où sont d’ailleurs partis les premiers pas dans la musique traditionnelle peulhe pour Sadio. Elhadj a fait l’essentiel des tournées avec l’auteur de Jeere Leele en Guinée. A un moment ils s’étaient perdus de vue pour se retrouver au milieu de l’année 1970 au Sénégal à la veille du départ sans retour de l’artiste pour Paris. L’octogénaire se souvient toujours de la dernière entrevue avec Sadio au sommet de son art au Sénégal. C’était à Kafaye, dans la région de Ziguinchor au Sud du Sénégal.

« Bah Sadjo et moi avons surveillé les champs ensemble, l’amitié a continué pour toujours. Quand il est devenu artiste, j’étais avec lui lors de la plupart de ses tournées vers Lélouma et autres localités du Fuuta. J’ai toujours vécu avec Bah Sadjo ici jusqu’à son départ pour la France où il est décédé. Je l’avais laissé en Guinée pour aller au Sénégal, je suis devenu charbonnier à Kafaye. Bah Sadio était venu jouer là une soirée. Il m’a trouvé, on s’est vu avec sa veillée. Ensuite, le lendemain de la soirée on se voit pour la dernière fois. Il est venu là où je travaille le charbon. Il me demande si c’est que je fais ? j’ai répondu par affirmatif. Ensuite il me tire de côté. Il sort deux milles (2000) FCFA pour me donner.

Il dit tu vas acheter du gâteau avec. Bah Sadio m’annonce sur place son projet de voyage en France. Je retiens la phrase comme aujourd’hui. Il dit (je rentre à Dakar, je dois prendre un avion à l’aéroport pour me rendre en France). C’était la toute dernière rencontre avec Bah Sadio. On s’est séparé, il retourne à Dakar. A son décès, j’étais déjà rentré au pays, la triste nouvelle m’est parvenue sur place. Je prie le bon Dieu de l’accueillir dans son paradis éternel et qu’il pardonne ses péchés. Il a été très sage et généreux. Nous demandons à tout le monde d’aider la famille de Bah Sadjo de profiter de ses œuvres. Parce qu’à son vivant c’est quelqu’un qui était motivé à aider tout le monde, à s’occuper de la jeunesse, il était au-devant de la scène pour le bien de sa communauté » se rappelle Elhadj Alpha Amadou Diallo, ami d’enfance de l’artiste

BAH DIOULDÉ, membre du groupe Jeere Leele

Les amis et compagnons de Bah Sadio vivent encore dans les villages du Fuuta. BAH  Diouldé a les 80 ans révolus. Cet ancien membre du groupe Jeere Leele, nous le retrouverons à  Sentou, son village natal. Devenu malvoyant mais  jovial et très lucide. Bah Dioulde Sentou s’abstient de parler de son passé dans la musique, même entendre sa voix à travers la radio rurale de Labé, il ne veut plus. Bah Diouldé préfère fondre en prière

Privation de la Famille des droits d’auteurs de Bah Sadio depuis 23 ans

La famille est encore là, mais privée des droits d’auteurs de BAH Sadio depuis 23 ans. C’est en l’an 2000 qu’ils ont reçu le tout dernier droit. Depuis, plus rien. Son jeune frère Sameely Bah garde tous les souvenirs de son frère-ainé. Au nom de la famille, il sollicite le rapatriement de la dépouille de Bah Sadio par le ministère de la culture et leur rétablissement dans les droits pour percevoir les droits d’auteurs de l’artiste. La famille du défunt a perdu toute traces du versement de leur dû. Avant ils ont connu plusieurs formes de paiement. Perception directe ou par virement bancaire à partir de Labé. Sameely Bah, le jeune-frere  de lait de  l’artiste rongé par la maladie  a du mal à  comprendre cette attitude. A qui faire face pour rétablir la famille dans ses droits? Il ne sait pas. Il est prudent.

« Entre 1998 nous avons reçu 400.000gnf, j‘étais avec monsieur Abass, nous étions allés retirer quatre cent mille francs guinéens à la BICIGUI. Ce jour d’ailleurs on avait passé la nuit chez l’artiste Mouctar Paraya (Mic Paraya). Et la dernière fois c’était dans le marché de Thianguel Bori en l’an 2000 qu’on a remis un montant 350.000gnf. C’était des billets vétustes et je ne sais qui les lui avait remis. Cet argent ne venait pas de la BICIGUI. Mais après cela on n’a plus rien reçu à son nom. Ça fait 23 ans maintenant. On a réclamé à  personne, on ne sait même plus à qui réclamer. On s’est dit que si on réclamait à la personne c’est comme si on lui faisait du tort et lui faire croire qu’il a détourné l’argent. Et si ce n’était pas le cas on l’aurait accusé pour rien. C’est pourquoi on a laissé tomber tout en nous référant au bon Dieu.

C’est Dieu qui a retiré l’âme de notre frère, c’est qu’on peut faire, c’est de prier pour lui. Si c’est notre chance on va tôt ou tard récupérer ses droits. Nous espérons d’ailleurs qu’à travers votre micro on pourrait trouver solution à cela.  C’est en 1987 que nous avons réussi à faire des documents en reconstituant ses traces parce que des chercheurs s’étaient rendu compte que la maman de Bah Sadio était en vie. Des documents ont été reconstitués pour que ses droits musicaux soient reversés à sa famille. Mais depuis l’an 2000 on n’a pas eu droit ce qui lui revient de droit. C’est pourquoi nous demandons l’implication de bonnes volontés pour que les droits de notre frère lui reviennent. Moi, je suis malade, je n’ai plus de force pour mener certaines démarches. C’est pourquoi nous sollicitons votre soutien », plaide Sameely Bah

A la commune rurale de Thiaguelbori d’où relève, le village natal de Mbalde Sadio, l’on garde encore en mémoire des moments forts quand l’Etat guinéen reversait à la famille du défunt artiste son droit d’auteur. L’actuel maire de la localité, Mouctar Sentou Bah a révélé avoir été chargé entre 1981 et 1982 d’aller verser à la famille un montant d’environs 80.000 sylis alors que son père était le secrétaire de la commune qu’il dirige actuellement. La suspension ou la disparition des droits d’auteurs de Bah  Sadio depuis plus de 2 décennies ne l’enchante point :

« Bah Sadio a été un grand artiste, imaginez quand il quittait la Guinée ma génération même si on était né, nous étions encore très jeunes. Depuis son décès ça fait plusieurs années mais on parle toujours de lui, cela explique combien de fois c’était un grand homme. Nous l’avons connu à travers sa musique. Je me rappelle mon père était secrétaire de la commune de Thiaguelbori avant on disait arrondissement. Mon père m’avait remis 83 000 sylis entre 1981-1982 pour remettre à la famille de Bah Sadio comme droits d’auteurs. Depuis je ne sais plus comment ça se passe ; c’est la dernière fois que j’apprends que la famille n’a plus accès à son droit. Je plaide auprès des autorités compétentes afin que la famille soit rétablie. Je me rappelle, je suis allé au village avec la radio rurale, difficilement son frère a accepté de parler, pour eux on leur tend le micro à tout moment mais aucune suite. C’est vrai des gens imitent sa musique, il faut que la famille soit rétablie ».


Dans la famille de Mbalde Sadio, un garçon prend son chemin. Mamadou Moumini Bah, petit BAH de son nom d’artiste neveu du défunt artiste déjà a ses premiers pas pour perpétuer la musique dans la famille. Il dirige une  équipe et fait des tournées dans le Fuuta, Conakry et même en Sierra Leone. Comme tous les autres proches , Petit Bah ne manque pas d’occasion pour rappeler l’usage de la musique de Bah Sadio partout sans aucune retombée au bénéfice de la Famille. Petit Bah met fin à une interrogation. Il s’agit des des conditions  dans lesquelles Soûl Bangs a repris la chanson fétiche « Jeere Leele » qui résiste aux temps près de 50 ans après la mort de son auteur :

« Je suis en phase d’apprendre la musique pour le moment. Quand les choses vont bien se passer, le vieux projet que nous avons c’est d’éditer les musiques de Bah Sadio, l’album entier pour sa mémoire et pour toute la famille. C’est un projet qui tient à cœur la famille. Malheureusement les musiques de Bah Sadio sont répétés partout sans que nous soyons saisi officiellement. C’est comme si Bah Sadio n’a pas de famille. Pour édifier l’opinion sur le cas de Soul Bangs. En Fait Soul Bangs est passé par le frère Pathé Moloko qui m’a appelé à son domicile. On s’est retrouvé chez Pathé Moloko, ils m’ont fait part de la situation. Mais Soul Bangs avait déjà fini de monter le clip, c’est au téléphone qu’il m’a montré le travail déjà fait. J’ai commencé à poser des conditions, (Soul Bangs me dit que Bah Sadio a chanté le folklore-peul. Que si un artiste veut reprendre sa musique un autre artiste s’oppose ; c’est comme si je dis que je suis guinéen, quelqu’un d’autre dit que tu ne l’es pas). Comme il a insisté je dis tu peux lancer on s’est séparé sur ça, aucune condition n’a a été établie entre nous ; il est parti. Tout s’est limité là-bas » précise petit Bah.

Abdoulaye Bah, un autre neveu de Bah Sadio est fortement peiné par la situation que vit la famille dans une pauvreté extrême sans aucun franc en guise de droit d’auteurs depuis plus de 2 décennies alors que la musique du défunt retenti encore partout avec des reprises.  En dépit de l’enclavement de Bhoundoutely, Bah Abdoulaye suit de près tout ce qui est relatif aux œuvres de Mbaldé Sadio. Toutefois les réclamations se font sans cesse :

« Quand vous entendez Bhoudoutely Daande Komba chez Bah Sadio, tu vas penser que tout va bien ici. Nous savons s’il vivait, il aurait changé beaucoup de choses dans ce village en termes de réalisations. Maintenant même si c’est un franc qu’il doit percevoir comme droit d’auteurs que cela soit débloqué. Tous les jours nous entendons ses chansons sur les réseaux sociaux. Cela sous-entend que sa musique est utilisée partout sans suite pour la famille. La famille s’interroge, à travers vous nous passons le message de la famille à ceux qui doivent débloquer la situation. Le nom a dépassé la rentabilité de l’artiste dont la musique résiste au temps. Nous ne voulons pas rester priver de l’effort de notre parent. Nous savons que ce n’est pas signifiant mais c’est honorifique ».

Abdoulaye Wossou Diallo, plus connu sous le sobriquet Jimmy carter et NGara Baydallahi pour les intimes envisage de déposer au musée du Fuuta, la guitare de Bah Sadjo, son disque de 12 titres ainsi que certains effets personnels du défunt afin que la nouvelle génération puisse connaitre qui était cet artiste de Folklore-Peulh dont la musique résiste encore au temps. Des objets ramenés dans les années 1994 en Guinée et jalousement gardés par le doyen Abdoulaye Diallo, le tuteur de Bah Sadio en France, l’homme qui l’a soutenu jusqu’à son dernier souffle. 

Alpha Ousmane Bah

Pour Africaguinee.com

Tel :(+224) 664 93 45 45

Créé le 25 septembre 2023 12:32

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