Comment « endiguer » les accidents en Guinée ? Voici quelques pistes de solutions…

CONAKRY-Les accidents de circulation sont légion en République de Guinée. Ces derniers temps, les victimes se comptent pratiquement par dizaines. L’accident survenu à Macenta la semaine passée est la dernière d’une longue série noire. Les routes guinéennes sont devenues de véritables hécatombes à ciel ouvert.

Cette montée en flèche des cas d’accidents inquiète les acteurs du secteur des Transports. Mais qu’est-ce qui est véritablement à l’origine de ces drames ? Comment les éradiquer sinon les amoindrir ? Africaguinee.com est allé à la rencontre de M. Souleymane Bah, expert en Hygiène Santé et Sécurité. Il pointe les causes des accidents puis préconise des pistes de solutions à l’Etat.

« Aujourd’hui quelle est la valeur ajoutée des permis biométriques ? Ça enrichit l’État mais ça ne protège pas. Je le dis parce que mis à part la visite médicale par rapport à la vision, quelle est l’examen qu’on fait pour avoir son permis ?  Il n’y a rien sauf payé de l’argent. Il n’y a aucun contrôle et ça c’est la responsabilité de l’Etat. Quels sont les organismes chargés de contrôler l’état technique de nos véhicules périodiquement ? Quelle est la structure qui est chargée de contrôler que tel ou tel véhicule a passé son contrôle technique pour confirmer que tous les points ont été contrôlés ?

Qu’est-ce que qui nous dit que quelqu’un ne peut pas rester chez lui et avoir un certificat technique ? Il n’y a rien. Et quel est l’organisme qui nous produit aujourd’hui des statistiques pour dire que suite à cet accident nous avons fait des analyses voilà les causes et nous avons tiré des enseignements voilà ce que nous devons faire pour éviter  que cela  ne se répète. Il n’y en a pas. Ça c’est de la responsabilité de l’État.

Nos routes qu’on est en train de faire sont muettes.  Les véhicules ne sont pas en bon état, nos chauffeurs sont indisciplinés. Qui est responsable de mettre tout cela dans un panier ?  C’est l’État. La police censée réglementer la circulation est mal outillée, très mal outillée.

Parce que quand un conducteur est en état d’ivresse, c’est très difficile de comprendre que quelqu’un est sous l’effet de l’alcool à l’œil nu. Mais si on a l’alcootest on peut faire souffler les gens et leur dire que le taux d’alcoolémie qu’ils ont ne leur permet pas de prendre des passagers et rouler ou ne leur permet même pas de se conduire eux-mêmes. 

Il faut qu’on outille aussi cette gendarmerie Mobile et cette police pour qu’elles puissent faire exactement leur travail. Cela est de la responsabilité de  l’État. Discipliner les gens c’est de la responsabilité de l’État.

Quelle   est la ville en Guinée qui dispose d’un centre de formation en conduite préventive et défensive il n’y en a pas. L’État doit mettre ces points-là ce ne sont pas les seuls mais au premier lieu il faut que l’État les mette en place pour espérer réduire le taux d’accidentogène dans notre pays. Sinon, on va toujours s’apitoyer. Il faut qu’on mette des actions en amont pour ne pas que des gens périssent dans les accidents« , explique Souleymane Bah.

Face à ces cas d’accidents répétés, certains spécialistes remettent en cause la compétence des chauffeurs, la conduite en état d’ivresse sous l’effet de la drogue ou de l’alcool et le manque de discipline. Cependant, ces conducteurs eux estiment que les causes des accidents sont à ailleurs.

« Vous savez quand tu es chauffeurs en Guinée, chacun pense que tu es délinquant alors que tu es normal. Chez nous, la cause réelle des accidents est le mauvais état de la route. Il a été dit de supprimer certaines parties dangereuses de la route mais malheureusement c’est le contraire. Les endroits supprimés sont moins dangereux que la partie corrigée. Après cela, les gros porteurs sont les causes principales des accidents. Leurs conducteurs se garent dans les virages et dans la circulation ; ils sont trop égoïstes. L’État doit prendre des dispositions pour les amener à comprendre que la route nous appartient tous« , relate Moussa Keïta, chauffeur de bus sur le tronçon Conakry-Kankan.

L’autre préoccupation majeure des chauffeurs ce sont les attaques à main armée sur les routes. Ils dénoncent le comportement des agents de la gendarmerie routière. « Ces cas d’accident sont souvent provoqués par des gros porteurs. Un camion peut occuper toute la chaussée. Quand tu les croises, tu es obligé de céder le passage pour lui. Quelquefois c’est ce qui provoque les accidents. Il y a également les agents de la gendarmerie routière qui dans leur patrouille mettent des pneus sur la chaussée.

Quelquefois tu tombes sur ça par surprise et les agents ne te demandent que de l’argent. Nos autorités n’ont besoin que de l’argent alors que les malfrats nous fatiguent trop sur la route. Je demande au gouvernement de nous aider dans ce sens. La route appartient à tous les usagers mais si les conducteurs des gros porteurs ne se comportent pas bien envers nous sur la route nous allons toujours continuer à enregistrer des cas d’accident », soutient Moussa Kanté.

Comment limiter voire mettre fin à ce fléau qui endeuille quasi-quotidiennement des familles guinéennes ? En  juin 2022, le Gouvernement, avait annoncé une série de mesures à court et moyen terme. Africaguinee.com vous propose ci-dessous les pistes de solutions envisagées à l’époque mais qui deux ans, après peinent encore à être appliquées.

Recommandations à court terme

1. Renforcer le contrôle routier et faire respecter les lois en matière de sécurité routière (validité de tous les documents requis pour la conduite des engins roulants) ;
2. Mener une campagne de sensibilisation intense dans les médias publics et privés en partenariat avec l’Office Guinéen de Publicité ;
3. Relancer et renforcer progressivement le contrôle technique systématique de tous les véhicules en circulation. Un centre de contrôle technique sera ouvert dans chaque région administrative ;
4. Entretenir les routes notamment les points critiques ; mettre des ralentisseurs dans les zones « accidentogènes » et des panneaux de signalisation ;
5. Responsabiliser les gouverneurs, les préfets, les commissaires centraux de police et les syndicats des transporteurs dans le contrôle de tous mouvements de départ des gares routières relevant de leurs juridictions respectives ;
6. Développer un système d’aide médicale d’urgence en y greffant des centres d’appels et des hubs d’ambulances et de corbillards ;
7. Renforcer les moyens d’intervention de la protection civile et opérationnaliser les protocoles de gestion des catastrophes au niveau du MATD ;
8. Renforcer la sécurité fluviale et maritime notamment en cette période de repos biologique ;

Un bus accidenté à Macenta

Recommandations à moyen terme

1. D’intégrer la sécurité routière dans les programmes scolaires ;
2. De revoir le cadre institutionnel et rendre opérationnel la Direction Nationale des Assurances (DNA) ;
3. De mettre en place une compagnie de réassurance en Guinée ;
4. De mettre en place un modèle d’intervention rapide à l’image du SAMU ;
5. De contrôler l’accès aux substances prohibées notamment dans les gares routières ;
6. D’aménager des aires de repos le long des routes nationales ;
7. Rappeler la responsabilité sociale des médias ;
8. Régulariser les horaires de circulation des poids lourds et instaurer un contrôle strict à l’instar des autres pays du monde ;
9. Appuyer le corps des assistants sociaux permettant d’apporter l’aide sociale et psychologique aux victimes et aux familles des victimes.

Sayon Camara

Pour Africaguinee.com

Créé le 30 avril 2024 09:54

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