Baadiko très amer sur les « 24 mois » de durée de la Transition : « Quel gâchis ! Que de temps perdu… »

Mamadou Baadiko BAH, Président du parti Union des Forces Démocratiques (UFD)

CONAKRY- L’accord signé le 21 octobre dernier entre la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et les autorités guinéennes fixant la durée de la transition à 24 mois irrite Mamadou Baadiko BAH. Le leader du parti Union des Forces Démocratiques (UFD) relève que cet accord va bien au-delà des 39 mois que le CNRD s’était accordé initialement.

Très sceptique quant à sa mise en œuvre, l’homme politique parle de bel édifice fait de manipulations et de tromperie. Dans la seconde partie de l’interview qu’il a bien voulu nous accorder, Mamadou Baadiko BAH aborde aussi la question du dialogue politique, les manifestations mais aussi les convocations visant des responsables politiques.

AFRICAGUINEE.COM : A présent, venons-en aux questions purement politiques. Comment analysez-vous l’accord signé entre la CEDEAO et la junte, sur une durée de la transition à 24 mois ?

Comme nous le disons souvent, l’Afrique est comme un livre de 54 pages qui se ressemblent toutes ! Tout ce qui se passe dans un Etat, peut avoir d’étranges similitudes avec du déjà vu ailleurs. Je m’explique. L’accord avec la CEDEAO intervient dans un contexte très particulier. Depuis son avènement au pouvoir la junte guinéenne du CNRD cherche à dérouler un agenda, connu de lui seul. Les manœuvres de toutes sortes n’ont pas manqué depuis un an : faire semblant de se concerter avec les forces vives pour mener une transition consensuelle. Concertations, Assises « nationales », Rencontres, Dialogues, n’en finissent pas. Et on se retrouve toujours au point de départ, ignorant royalement les règles en vigueur à la CEDEAO.

Quelques jours avant la décision des 24 mois, un membre influent du CNRD et le Premier ministre se sont même permis de manquer carrément de respect au président en exercice de la CEDEAO. C’était à ne rien comprendre, car il y a même des lèches-bottes, courtisans auprès du CNRD, dont le seul fonds de commerce est leur relation supposée avec les décideurs de la CEDEAO ! On arrive donc à 24 mois de durée de la Transition ! Quel gâchis ! Avoir attendu 13 mois avant d’en arriver là ! Que de temps perdu ! Le comble est que cet accord va en fait nous amener à bien plus des 39 mois que le CNRD s’était accordé et qui a été ramené à 36 mois par le CNT à sa solde.

Lire aussi-Gestion du CNRD, inflation, héritage d’Alpha Condé : Les "vérités crues" de Baadiko Bah…

On ne sait même pas au juste quand devrait commencer la période ainsi fixée. C’est dire donc que cette opération diplomatique montée par le CNRD et ses amis extérieurs ne peut servir encore une fois qu’à gagner du temps. La manœuvre semble savante mais n’a rien d’original. Les putschistes maliens et tchadiens sont passés par là et ont expérimenté un procédé simple et qui marche : après son coup, on manœuvre habilement, on perd le temps en faisant assaut de proclamations de bonne foi sur la volonté de ne pas confisquer le pouvoir, on tient toutes sortes de ballets de concertations, on fait de la résistance sur la fixation de la date de fin de la transition.

Finalement on accepte les 24 mois habituels de l’Union Africaine et de la CEDEAO. Et hop ! C’est gagné, nous avons évité de justesse les dures sanctions internationales. Les marabouts et autres féticheurs ont réussi leur coup ! Et on continue l’agenda originel, comme si de rien n’était. A l’approche de l’échéance, on prendra tout le monde à l’intérieur et à l’extérieur à témoin sur le fait que l’agenda est intenable…Et on va de nouveau fixer encore 24 autres mois, et ainsi de suite, jusqu’à ce que ce bel édifice fait de manipulations et de tromperie s’effondre. Et nous reviendrons encore à la case départ. En perdant toute opportunité de se battre ensemble pour sortir nos pays de la profonde crise politique, économique, morale et parfois sécuritaire dans laquelle ils se débattent depuis l’indépendance.   

Les convocations de responsables politiques se multiplient alors que d’autres sont en prison. Comment l’expliquez-vous ?

Depuis toujours, nous avons dénoncé toutes les atteintes aux libertés fondamentales, la répression pour délit d’opinions, les massacres, les tortures, les emprisonnements arbitraires, les détentions sans jugement. Les lois interdisant les manifestations sont illégales, dans le contexte où il n’y a pas eu de consensus minima pour le bon déroulement de la transition. Ceci dit, nous ne sommes pas de ceux qui préconisent la politique du pire pour réaliser des objectifs politiques. Le schéma : provocation, répression, révolution n’est pas acceptable. Vous voyez vous-même à quoi ressemble le drame guinéen : des millions de jeunes sans éducation, sans formation, sans encadrement et sans occupation utile, sont là, entièrement disponibles pour sortir, s’exposer, se livrer à des actes repréhensibles, jusqu’à exposer leurs vies. Il faut que cela s’arrête.

Nous ne pensons pas que ce soit la voie du salut pour notre pays. Il faut lutter de toutes nos forces pour l’instauration d’un Etat de droit soucieux du devenir de la jeunesse et capable de nous sortir de cette spirale infernale. J’espère qu’une issue sera rapidement trouvée pour permettre aux responsables politiques et les activistes de recouvrer leur liberté. Evidemment il faut arrêter immédiatement le harcèlement des responsables des partis politiques.

Selon vous quel doit être le cadre pour la conduite du dialogue ?

Je crois que tout est dans la sincérité de la démarche. Nous avons déjà rappelé l’historique malheureux de ces consultations. On voudrait bien savoir qu’est-ce qui différencie le présent cadre des précédentes consultations où on retrouve presque les mêmes personnes, affublées d’un nouveau chapeau. Nous avons toujours préconisé le dialogue politique, la tolérance, l’acceptation des différences, pourvu qu’on mette les intérêts de la Guinée au-dessus. Pour votre information, l’UFD était partie prenante du dialogue initié par l’ancien Premier ministre Mohamed Beavogui, juste avant son départ du pays. Nous lui avions transmis une note détaillée indiquant quelles sont nos propositions pour avoir un dialogue fécond, dans l’esprit de la Refondation de l’Etat guinéen, pour enfin sortir définitivement de ce système politico-ethnique corrompu, destructeur pour le pays et qui est là depuis 1958. Nous n’avons pas changé d’avis.

Ceci dit, pour nous, le dialogue pour être sérieux, doit être inclusif. Or, nous entendons des voix qui nous parlent de l’exclusivité d’un dialogue entre le CNRD et les acteurs soi-disant « majeurs ». Ceux-là veulent que la Guinée soit indéfiniment enfermée dans ces systèmes dictatoriaux en faillite ; un système corrompu, avec des partis assis sur des bases communautaires. Donc pour ces esprits totalitaires, dépourvus de toute culture démocratique, la Guinée ne doit surtout pas sortir du système dont ils sont champions. Pour ceux-là, l’alternance démocratique au pouvoir, n’existe pas et ne doit pas exister ! La faillite du condominium politico-ethnique est sans appel. Ce n’est pas la solution pour la Guinée.

Pour nous, la démocratie, c’est avant tout la justesse des idées qui sont émises et non pas seulement le nombre.

A suivre…

Diallo Boubacar 1

Pour Africaguinee.com

Créé le 31 octobre 2022 09:47

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