Route Hafia-Timbi Madina : 17 kilomètres d’enfer…les usagers à bout de souffle

HAFIA/TIMBI- Le tronçon Hafia, préfecture de Labé-Timbi Madina dans Pita long seulement de 17 km n’est pas une partie de plaisir pour les usagers qui le fréquentent. Son niveau de dégradation a atteint un seuil inimaginable. Et comme dirait l’autre, il faut vivre pour y croire. Africaguinee.com vous plonge dans cette route devenu un enfer.

Samedi 9 septembre, nous sommes sur le tronçon Hafia-Timbi Madina, d’une distance de 17 kilomètres. Il est 15 heures UTC. La nature est belle à observer. Mais la situation qui nous découvrons sur cette route est beaucoup préoccupante. Le calvaire des usagers est tristement désolant. Sur les lieux, de nombreux véhicules en panne, d’autres embourbés, on a l’impression d’être dans un atelier de réparation d’automobiles. La triste réalité dans tout ça, c’est les malades chroniques en attente des produits médicaux pour des soins d’urgences que vous trouverez dans les parages. A cela s’ajoute des passagers qui s’impatientent çà et là. Des femmes en état de grossesse dont certaines nécessitent des évacuations vers Labé mais sans possibilité. La situation est désolante.

 

Labé-Timbi Madina dans Pita long seulement de 17 km

A cause des secousses, certains commerçants retrouvent leurs marchandises endommagées, à leur arrivée à destination. Lorsque le tronçon était en bon état, le transport entre HAFIA et TIMBI était de 30 000gnf par personne en moto taxi. Une somme qu’il fallait débourser pour les 17km. Mais avec l’état actuel de la route, le transport a été triplé. Certains conducteurs boudent le trajet, les quelques rares qui acceptent d’y aller réclament entre 100.000gnf et plus.

Dans nos pérégrinations, nous trouvons un vieux chauffeur de véhicule. Il est visiblement fatigué et surtout très remonté car son engin est tombé en panne. La situation semble ne pas être facile à gérer pour lui. Nous sollicitons de lui une interview pour nous décrire son calvaire, sa réaction est un peu désagréable. Mais c’est compréhensible.

 « Toute la Guinée le sait, il y a des choses qu’il ne faut jamais demander. Vous voyez mon véhicule en panne, tous les passagers attendent. Allez dire au gouvernement de 1958 à nos jours qu’est-ce qu’ils ont fait pour ce pays ? Rien vraiment » se lâche le vieux conducteur.

Les communes rurales de Timbi Madina et Hafia sont pourtant d’excellentes zones de productions agricoles. La dégradation de la route rend difficile l’écoulement de la production vers les centres urbains.

Les habitants des localités traversées comme Hinnde, Bagnan, Taka, Doumba mais aussi d’autres villages vivent un calvaire quotidien. L’axe risque de couper à certains endroits avec les fortes pluies qui s’abattent sur le Fouta.

Le chef secteur du district de Hindé Centre emprunte cette route. Il était allé à une affaire sociale dans un village voisin. Il décrit avec désolation le calvaire auquel ils sont confrontés au quotidien. Même pour référer un malade, selon lui, c’est tous des risques.

« Vous même vous voyez le mauvais état de la route, avec les motocyclistes parfois les gens tombent et se fracturent les pieds ou les bras. Les camions s’embourbent ici et certains font 4 a 9 jours avant de trouver une issue. Il y a un camion qui a fait ici 9 jours coincé dans les trous. C’est très fatiguant, des fois je fais quatre a 5 tours sur cette route avec les cérémonies. Je viens des funérailles à Labé, aujourd’hui j’ai fais 3 tours sur cette route. Pendant la période sèche de Hindé à Hafia je faisais près de 30 minutes comme je file pas, maintenant là ces 7 kilos,  je fais 1 heure de temps à moto, les voitures ça va dépasser. Hafia Timbi Madina ça fait 17 kilomètres, les camions remorques peuvent faire ici 3 heures à 4 heures de temps. C’est très difficile quand on a un malade ici. Récemment, il y a une femme qui voulait accoucher au poste de Santé, mais l’agent de santé nous a dit de l’envoyer à Labé pour faire la césarienne, nous même on pleurait car on voyait comment elle se tordait de douleur, alors que la route est impraticable, de Hindé à Hafia on a fait 45 minutes mais on ne pouvait rien. Je demande à l’Etat de nous aider et travailler cette route là », plaide Mohamadou Salifou Diallo.

F.B est une nourrice, avec son bébé au dos, elle était partie chercher les sérums de sa belle-mère Diabétique à Labé pour les soins d’urgences. Malheureusement le véhicule qu’elle a emprunté est tombé en panne entre Hafia et Timbi. Elle traverse une double peine, celle de rester en brousse sans trouver un autre véhicule et de l’autre, sa belle-belle devrait prendre son sérum avant la tombée de la nuit. Elle explique son calvaire.

« Je suis très inquiète là où vous me trouvez en cette fin après-midi. Imaginez, vous avez un malade chronique alors que les produits sont à chercher ailleurs vous comprenez vous-même la peine. Ma belle-mère est très malade au village, j’ai le sérum qu’elle doit prendre ce soir, mais aucun moyen de continuer à cause de l’état de la route. Il faut que l’État nous aide pour la route vraiment. J’ai tout mon esprit sur ma belle-mère malade, tout est urgent il faut revoir la route pour faciliter la tâche aux malades et tous les usagers de la route. Le calvaire est indescriptible » se lamente F.B qui a souhaité garder l’anonymat.

Ibrahima Sory Diallo est chargée de l’organisation au syndicat de Hafia.  Avec les bourbiers sur ce tronçon, des tonnes de pommes de Terre ont pourri sur cette route dans les camions en panne. Pour les commerçants, les pertes sont incommensurables.

« Nous vivons ici un grand calvaire, ça il faut le reconnaître, c’est cette réalité quotidienne que nous traversons, malheureusement. La route est extrêmement dangereuse, elle fatigue les usagers, vous voyez son état, elle est complètement dégradée. Nous passons cette partie boueuse très difficilement. Timbi Madina produit énormément de la pomme de terre mais parfois à cause de l’état de la route, on ne trouve pas de preneur. Parfois la pomme pourrit dans les camions qui s’embourbent ici ou qui tombent en panne. Cela cause beaucoup de préjudice aux paysans » déclare le syndicaliste.

Dame Kadiatou Diallo est aussi bloquée avec ses bagages. Elle rentre de Labé où elle était partie acheter certains nécessaires pour un baptême à célébrer le lendemain en famille. Elle risque de ne pas arriver à temps car le véhicule de transport à bord duquel elle s’est embarquée, est tombé en panne.

« Le véhicule ne peut plus bouger à cause du mauvais état de la route. Désormais, à partir de Gueriyabhè en direction de Timbi, c’est impossible d’avancer dans la tranquillité. Nous avons un baptême, j’ai tout ce qu’il faut préparer avec moi mais nous sommes éprouvés. J’ai du poisson, du poulet avec moi, tout ça peut pourrir si nous ne trouvons pas un autre véhicule en urgence. Et ce n’est pas facile d’avoir un véhicule si le vôtre tombe en panne. C’est difficile ce que nous vivons ici. Il faut des travaux d’urgences pour la réfection de cette route si importante », plaide Kadiatou Diallo.

Maitre Bailo Diallo, chauffeur de profession roule sur cet axe depuis quelques années. Il indique que le préjudice que les populations subissent sur ce tronçon actuellement est sans précèdent.

« Il n’y a rien à dire sauf que la route doit être réparée. Si cette route se coupe, ce n’est pas bon. Nous vivons de cette route. C’est une véritable souffrance, tous les jours nous sommes plongés dans les trous. La perte des marchandises est énorme, tout ce que vous voyez sur mon véhicule ici, c’est des articles fragiles appartenant à des commerçants. Avec les secousses, une fois à destination, ils trouvent qu’une bonne partie est endommagée. Toute la saison des pluies c’est cela notre quotidien. Nous ne pouvons pas faire une recette, tout ce que nous gagnons retourne dans l’entretien des véhicules pour reprendre à zéro le lendemain », déplore Bailo Diallo, chauffeur.

Elhadj Mamadou Dian Diallo a du mal à rouler avec sa moto sur ce tronçon pour sortir ou retourner dans son village de Missiide Thialèrè tout près. Il est témoin du temps que des camions ont passé dans les parages embourbés.

« Ces dernières années, cette route nous éprouve tout cela parce que l’État tarde à venir au secours. Parfois on tente avec notre mairie de refaire les choses à la hauteur de nos moyens. Mais nous ne pouvons pas faire grand-chose comme vous voyez l’étendue de la dégradation de la route. En réalité, seul l’État peut faire les routes. Sur cet axe nous avons au moins envoyé plus de 10 chargements de blocs de pierres pour fermer les trous. Mais nous ne pouvons pas sentir que nous avons mis quelques choses ici. Du pont de Hafia à ce point où nous sommes arrêtés, des dizaines de camions se sont embourbés ici pendant des jours sans solution. Les autres aussi étaient simplement bloqués parce qu’il n’y avait pas passage. Entre HAFIA et Hinndè ici avec ma moto j’ai fait plus de 30 minutes avec tous les risques de tomber.  Si la route est bonne, maximum c’est 10 minutes. Nous traversons des épreuves difficiles pour aller ou sortir de chez nous », déclare-t-il.

Actuellement trouver du sable pour les chantiers pose problème à cause de l’accès difficile à la carrière de sable. Il faut des jours pour qu’un camion puisse rapporter du sable. Conducteur de camion de son état, Thierno Iliassa sort de la carrière très essoufflé avec son camion rempli de sable. Un chargement habituellement vendu à 1.100 000gnf a atteint la barre de 1700.000gnf, tout ça à cause du mauvais état de la route. Il témoigne :

« De la carrière de sable à Hafia centre, ce que nous subissons se passe de commentaire. Ça nous prend assez de temps pour trouver un seul camion de sable et après, il faut emprunter la route que nous avons devant vous. Les populations de Timbi font des actes citoyens pour retoucher un peu mais ils ont des moyens très limités. La carrière n’est pas si loin de là, j’y ai quitté depuis 15 heures, c’est à 18heures que j’arrive là. 3 heures du temps pour moins de 10km, imaginez le reste. La souffrance est énorme pour les usagers », déplore ce chauffeur de camion.

Abdoulaye Diallo est un ressortissant de Timbi basé en Europe. En séjour en Guinée, il est obligé de laisser son véhicule à Labé pour continuer à Moto sur Timbi avec son ami, nous l’interrogeons à propos.

« C’est difficile ce que nous vivons sur cette route Labé-Timbi. Je suis obligé de me rendre chez moi à moto alors que je peux le faire en voiture, mais avec la route c’est la moto qui est mieux. C’est déplorable. Je lance un appel à l’État pour réparer nos routes », plaide-t-il.

Hadja Mariama Oury réside à Timbi-Madina et fait le commerce. Mais acheminer sa marchandise vers Timbi lui engendre des retards. Un frein pour ses activités commerciales.

« Il faut qu’on s’occupe de la route. Nous achetons de la marchandise sans trouver les moyens de la faire venir ; la route pose problème, les chauffeurs qui s’engagent à prendre vous facturent énormément. Le plus souvent les véhicules tombent en panne, nous passons la nuit en chemin, nous arrivons en retard au marché hebdomadaire. La semaine dernière nous avons enregistré des pertes énormes car en arrivant à Timbi, une bonne partie de la marchandise était à jeter ; tout ça faute de l’état de la route », déplore cette marchande

Conducteur de taxi moto,  Mamadou Yagouba Diallo, pratique au quotidien l’axe Hafia- Timbi Madina. A cause de son état de dégradation très avancée, lui et ses pairs ont décidé de rehausser le prix du tronçon.

« Nous avons constaté que la saison des pluies et la saison sèche, on ne peut pas aller au même prix. pendant la saison sèche on pouvait aller à Timbi à 30 mille francs, mais actuellement même à 40 mille sans bagage, on s’engage difficilement. De là jusqu’à Timbi Tounni, Ninguélande, la route est complètement dégradée. Même si certains clients proposent 100 mille, il y a des taxis moto qui refusent d’aller parceque la route est mauvaise et quand tu t’engages à partir, à ton retour, tu es obligé d’utiliser cet argent pour réparer ta moto » ; justifie le conducteur de taxi moto.

Reportage réalisé par

Thierno Oumar Tounkara

Pour Africaguinee.com

Créé le 12 septembre 2023 16:57

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