L’amertume des travailleurs du Groupe Hadafo face à la censure : « Nous vivons un moment très difficile… »

CONAKRY-Le media Espace Fm et tv, membre du Groupe HADAFO, à l’instar de plusieurs autres entreprises de presse, traversent une période difficile. Alors que la fréquence de la radio est brouillée, la télé quant à elle a été retirée des bouquets Canal Plus et Star Times. Ce qui limite drastiquement l’audimat de ce média de grande écoute. La Haute Autorité de la Communication à l’origine de cette décision controversée invoque des raisons de sécurité nationale. Comment les travailleurs vivent-il cette censure ? Pour toucher du doigt la réalité au sein de cette entreprise de pesse, un journaliste de Africaguinee.com y a effectué un tour au siège dudit groupe.

Sur place, nous avons trouvé une salle de rédaction quasi-vide alors qu’en temps normal le visiteur avait des difficultés de se trouver une place. Le groupe a plusieurs employés. Mais ce jeudi, le peu de journalistes rencontrés sur place, sont visiblement tous concentrés et essayent de faire les derniers bouclages pour l’édition de 18 heures. Mais pas sans peine. Le rédacteur en chef de la Radio Espace décrit une situation d’amertume au sein de sa rédaction depuis que ces restrictions leur ont été imposées.

« Je commencerai d’abord par vous dire merci pour l’expression de votre solidarité. Il faut déjà le dire sans détour que nous vivons ces instants avec beaucoup d’amertume. Parce que, nous sommes au 21ème siècle. Il est arrivé à un moment donné où le groupe HADAFO était asphyxié. Il y avait déjà des plans machiavéliques qui étaient en préparation pour nous éteindre. Et le discours du président de la transition, le colonel Mamadi Doumbouya le 5 septembre 2021, a été pour nous un discours de délivrance. Parce que, dans un discours franc, on a vu un avenir radieux pour les médias guinéens, pour la liberté d’expression et d’opinion en Guinée. Dans son discours, il a dit qu’aucun guinéen ne devrait désormais subir une quelconque exaction du fait de son opinion. Ça, nous l’avons salué.

Parce que notre métier de journaliste, c’est informer, éduquer et sensibiliser. Les moments que nous traversons, sont des moments très difficiles pour nous. C’est vrai qu’aujourd’hui, nous sommes en train de voir des voies pour être aux côtés de nos auditeurs, de nos téléspectateurs, mais il faut dire que nous ne pouvons pas atteindre le quota que nous avons l’habitude d’atteindre, parce que, l’accès est restreint. Et ce n’est pas tout le monde aujourd’hui qui a la possibilité de s’offrir un téléphone Android afin de pouvoir aller sur nos applications, suivre nos différentes émissions, entre autres. Du fait de cette restriction, nous vivons un moment très difficile« , exprime Daouda Mohamed Camara, chroniqueur dans l’émission Les Grandes gueules.

Impacts du brouillage sur les productions

La crise est certes présente au Groupe Hadafo médias, mais la direction n’a pas dans son agenda un plan de réduction des effectifs. Pour l’instant.

« En ce qui concerne l’équipe, d’abord il faut dire que nous, nous ne réfléchissons pas pour l’instant à l’idée de réduire l’équipe. L’idée du PDG Lamine Guirassy, c’est comment offrir du travail aux jeunes guinéens. Alors, cette situation, on l’a connue par le passé, mais la réduction de l’équipe n’a jamais traversé l’esprit de notre fondateur. L’équipe reste la même. Et s’il y a des opportunités de recrutement, il le fera aussi. Mais, pour l’engagement de l’équipe qui travaille aujourd’hui, c’est que, quand une journaliste travaille pour un site d’information par exemple, son souhait, c’est comment voir son article publié et qu’il soit lu par le plus grand nombre. Et un journaliste radio ou de télé, son souhait, c’est de voir son élément passé à la radio ou à la télévision et qu’il y ait des retours. Que les gens regardent, apprécient positivement ou négativement.

Daouda Mohamed Camara

Heureusement, la direction générale a pris les dispositions pour nous maintenir auprès de nos auditeurs et téléspectateurs, c’est vrai que tout le monde ne peut pas y accéder comme je l’ai dit, mais nous sommes suivis. Quand je prends le dernier numéro des Grandes gueules d’aujourd’hui (jeudi), on l’a nommé « Mini-grandes gueules « , parce que nous ne faisons plus le temps normal, une heure après l’émission, on était à plus de 12 mille vues. Cela veut dire qu’on est coupé dans le bouquet Canal+ et Startimes, mais les guinéens où qu’ils sont, cherchent à savoir ce qui se passe dans leur pays et font l’effort d’aller sur nos applications qui ne sont pas difficiles d’accès. Il suffit juste d’aller sur Playstore, à la barre de recherche, vous y mettez simplement HADAFO médias. Toute de suite, vous avez tous nos programmes« , indique M.Camara.

Des annonceurs qui se raréfient…

« Ils savent ce que nous vivons. Ils savent que ce n’est pas de notre gré que cela arrive. Ils nous interpellent. Quelque soit l’amour qu’un opérateur économique a pour vous, mais c’est son business d’abord… Donc au point qu’aujourd’hui, les jours par exemple, on pouvait avoir jusqu’à 5, 6, 7, 10 communiqués, mais aujourd’hui, les gens ne viennent pas. Nos commerciaux qui étaient en négociation avec certaines grosses entreprises et des opérateurs économiques, mais ils disent écoutez, on va surseoir d’abord jusqu’à ce que les choses se rétablissent. Alors, les choses se rétabliront quand? On ne sait pas, on observe les autorités. Mais il faut annoncer clairement ce que nous subissons. Ce qui nous impacte plus aujourd’hui, c’est le fait que nos auditeurs, nos téléspectateurs n’ont pas accès à ce que nous faisons. Les annonceurs viennent par rapport à votre audimat. Et notre audimat, ce sont les auditeurs« , répond le rédacteur en chef de la Radio Espace.

Des reporters touchés dans leur moral

Aissatou Mara, journaliste reporter au groupe Hadafo médias, vit cette situation avec détresse. Elle interpelle le gouvernement de la transition à accorder à la presse, sa place d’antan.

« C’est une situation déplorable. Les gouvernants d’un pays doivent savoir que la presse a un rôle très important. Là où tu viens travailler et chercher ton quotidien, si on arrive à te restreindre là-bas, ça fait vraiment mal. Moralement, ça affecte« , exprime notre consœur.

Aissatou Mara

Son collègue Alsény Barry, journaliste reporter à Espace TV, abonde dans le même sens. Il ne cache pas son amertume.

« En venant au boulot, tu te demandes est-ce que, ton élément va passer ? Est-ce que les gens vont suivre vraiment ce que tu as fait ? Vous savez, le premier salaire d’un journaliste, c’est s’il est vu et suivi. Quand tu retournes à la maison, tu ne sais pas si tu es suivi, cela pourrait jouer même sur la motivation. Mais quand-même, on se dit que ça va aller, on vit avec cet espoir. Mais c’est difficile de vivre une telle situation ».

Alsény Barry

Dansa Camara DC 

Pour Africaguinee.com

Créé le 15 décembre 2023 12:13

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