Guinée: Un appel urgent à l’action contre la résistance aux antimicrobiens « RAM »…

CONAKRY– La résistance aux antimicrobiens (RAM) est devenue une menace sanitaire majeure en Guinée. Face à cet enjeu sanitaire, l’Académie des Sciences de Guinée (ASG) en collaboration avec l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry (UGANC) a organisé un colloque international ce samedi 5 juillet 2025. Présidée par le Ministre de la Santé et de l’Hygiène Publique, cette initiative vise à sensibiliser et à mobiliser l’ensemble des acteurs face à un fléau qui, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), pourrait causer 10 millions de décès d’ici 2050 si aucune mesure n’est prise. La rencontre a réuni de médecins, pharmaciens, vétérinaires, enseignants-chercheurs, chercheurs, a constaté sur place Africaguinee.com.
Une menace globale aux répercussions locales
La RAM n’est pas une lointaine menace pour la Guinée et l’Afrique subsaharienne, mais une « réalité actuelle », a alerté le Professeur Mamadou Aliou Baldé, Président de l’ASG. Le scientifique a mis en garde contre le risque de “nous ramener à une ère pré-antibiotique où les infections les plus banales redeviendraient mortelles ».
« Nous sommes aujourd’hui réunis pour combattre un ennemi invisible mais dévastateur : La résistance aux antimicrobiens (…). En Guinée et en Afrique sub-saharienne, la résistance aux antimicrobiens n’est pas une menace future, c’est une réalité actuelle qui rend inefficace nos médicaments les plus précieux, aggrave le fardeau des maladies infectieuses, menace notre sécurité alimentaire, pèse lourdement sur notre économie”, a déclaré l’Universitaire.
L’approche « One Health »
Face à ce défi multidimensionnelle, l’Académie des Sciences de Guinée et l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry proposent une réponse intégrée, coordonnée et robuste, fondée sur l’approche « One Health », reconnaissant les liens indissociables entre la santé humaine, la santé animale et l’environnement.
Des appels clairs ont été lancés à tous les acteurs :
- Aux professionnels de santé :« Prescrivez avec discernement — un antibiotique mal utilisé aujourd’hui sera inefficace demain. » Ils sont encouragés à « appliquer rigoureusement les protocoles thérapeutiques et de privilégier les diagnostics avant traitement. »
- Aux éleveurs et vétérinaires :« Bannissez l’usage non-thérapeutique des antibiotiques — la santé humaine dépend aussi de la santé animale. » Cela implique d’adopter des « pratiques d’élevage responsables et de surveiller les résistances dans la chaîne alimentaire. »
- Aux autorités :« Renforcez la réglementation, la surveillance et les investissements dans les laboratoires et la formation. » Le rôle des décideurs politiques est crucial pour « investir dans des laboratoires de diagnostic. »
- Aux citoyens :« Évitez l’automédication, respectez les prescriptions, exigez des aliments sûrs. » Les patients et consommateurs sont les « premiers acteurs de la santé » et doivent « éviter l’automédication et exiger des produits alimentaires sûrs. »
Le Professeur Bobo Diallo, représentant du collège des sciences de la santé, a insisté sur l’omniprésence de cette menace :
« La résistance aux antimicrobiens, la RAM, comme on le dit souvent, est une donnée qui peut intéresser le citoyen lambda… Toutes les populations, urbaines comme rurales, riches comme pauvres, pourraient subir le méfait de la RAM et presque dans tous les pays. » Cette déclaration souligne l’urgence d’une « lutte bien réfléchie, rationnelle et soutenue ».
L’engagement du gouvernement guinéen
Le Ministre de la Santé et de l’Hygiène Publique, Oumar Diouhé Bah, a réitéré l’engagement du gouvernement guinéen à freiner la propagation de la RAM. « La menace est donc réelle. Elle est là. Et nous avons l’obligation et le devoir d’en faire face », a-t-il affirmé, soulignant que « la lutte contre la RAM est un combat de longue durée qui nécessite une réponse ordonnée, urgente et multisectorielle. »
Le ministère a déjà élaboré et adopté un plan d’action national de lutte contre la RAM pour la période 2025-2029. Le ministre a également appelé l’Académie des Sciences et les chercheurs à « produire de recommandations pratiques orientées vers les réalités cœur » et à « mobiliser les savoirs interdisciplinaires de médecine, biologie, pharmacie, écologie, sociologie dans une approche intégrée. »

Un coût humain et économique colossal
La résistance aux antimicrobiens n’est pas seulement une tragédie humaine, elle représente également un fardeau économique colossal. On estime qu’elle pourrait coûter en moyenne 66 milliards de dollars et entre 1,1 et 3,8 % du PIB mondial si rien n’est fait. Actuellement, 700 000 personnes sont touchées chaque année.
L’ASG conclut par un appel poignant à l’action collective : « Ensemble, préservons l’efficacité des antimicrobiens pour les générations futures, dont celle de Simandou 2040. » Cette mobilisation nationale est essentielle pour assurer un avenir sain pour la Guinée.
Yayé Aicha Barry
Pour Africaguinee.com
Créé le 5 juillet 2025 17:05Nous vous proposons aussi
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