Tamaye Gérard Beindia, patriarche des Bassaris : « Ce que nous demandons au colonel Doumbouya… »

TAMAYE GÉRARD BEINDIA , patriarche des Bassari

CONAKRY- C'est l'une des communautés minoritaires guinéennes, les plus marginalisées voire « méprisées » dans certains services administratifs du pays. Les Bassaris. Il y a un an, votre quotidien en ligne Africaguinee.com, révélait dans une enquête les difficultés auxquelles certains citoyens de cette ethnie sont confrontés dans leur démarche pour obtenir des documents officiels.

Les bassaris, habitent principalement dans les sous-préfectures de Termessé et Guingan, dans la préfecture de Koundara. Jusqu’à présent, à cause de leur leurs patronymes jugés faussement « non guinéens », certains sont régulièrement confrontés à des difficultés. Une situation qui agace certains.

Ce dimanche 8 mai, un journaliste d'Africaguinee.com a rencontré le doyen Tamaye Gérard, le patriarche de la communauté Bassari à Conakry. Avec lui, nous avons abordé les problèmes auxquels la communauté face. Il interpelle le président de la transition colonel Mamadi Doumbouya.

AFRICAGUINEE.COM Des citoyens de la communauté Bassari sont souvent victimes de rejet dans certains services administratifs. La donne a-t-elle changé de nos jours ?

TAMAYE GÉRARD BEINDIA : Je voudrais tout d’abord commencer par remercier les nouvelles autorités du CNRD qui ont pensé à nous cette fois-ci. Nous sommes dans des démarches en vue de rencontrer le président du Conseil National de la Transition, Dr Dansa Camara pour lui parler de nos préoccupations 

Des difficultés, il y en a toujours mais les plus préoccupantes c'est dans nos villages, à Koundara (Guingan-Terméssé) où l'Etat est pratiquement absent. Il n’y a pas d'écoles ni d'hôpitaux. Tous les régimes qui se sont succédé, à chaque fois on vient, on nous fait des promesses, après les élections il n'y a rien. Et pourtant on a beaucoup de jeunes diplômés et compétents ici. Mais aujourd'hui beaucoup d'entre eux, c'est aux Sénégal qu'ils partent pour se débrouiller. C'est pourquoi nous voulons être reçus par le Président du Conseil National de la Transition pour lui présenter notre mémorandum ou à défaut, l'inviter à une de nos assemblées générales pour qu’il comprenne nos difficultés. 

Quels sont les principaux points de revendication évoqués dans ce mémorandum ?

D'abord, nous n'avons pas de journalistes présentateurs en langue nationale à la télévision guinéenne. Alors que c'est seulement à travers les médias on peut sensibiliser et se faire entendre. Ensuite les emplois. Nous avons des jeunes diplômés qui n'ont pas d'emplois. Qu’on nous aide à ce qu'ils aient de l'emploi, mais aussi qu'il y ait des cadres Bassaris dans l'administration parce qu'il y a des intellectuels Bassari compétents qui sont là et qui chôment. 

Que comptez-vous faire dans le cadre de la vulgarisation des patronymes Bassari ?

Nous avons conçu un document sous forme de mémorandum. Dans ce document, nous avons présenté la communauté de façon générale et ses spécificités. C'est par exemple les types de Bassari pour qu'on sache vraiment tout sur nous. Chez nous, les noms sont numériques, en garçons et filles. Par exemple : Thiara, Tama. Ensuite c'est matrimonial. Il y a les noms de famille, Biendia, Bierse, Boubane… nous avons tout énuméré. 

Pensez-vous que cela va aider à résoudre le problème ?

Ça fait partie parce que quand tu dis Gérard Bierse, il y a certains qui te disent est-ce que ce n'est pas Camerounais ça ? Et pourtant nous sommes des Guinéens ici nous habitons dans ce pays. C'est pour cela nous avons fait ce document pour qu'il soit vulgarisé parce que la culture Bassari, noms tout y est. 

Est-ce que vous avez un message particulier à adresser au Président de la transition, Colonel Mamadi DOUMBOUYA ?

Le message que je veux adresser au Président Mamadi Doumbouya, chef de l'Etat, c'est de jeter coup d'œil sur Koundara et particulièrement à la Communauté Bassari. Même s'il faut que le CNT dépêche une délégation pour aller découvrir cette communauté, c’est nécessaire. Quand vous entendez Dama, c'est chez nous. 

Deuxièmement, nous avons des jeunes diplômés sortant d'universités et qui ont appris des spécialités un peu partout, ils n'ont qu'à nous aider à ce qu'ils aient de l'emploi lors des concours. 

Aujourd'hui la communauté Bassari n'a pratiquement pas de cadres. On a que deux issus de la communauté qui sont à la fonction publique. Seulement deux enseignants, car les autres ont fait valoir leur droit à la retraite. 

Dans tous les ministères et même dans l'armée, on n'a pas de représentants alors qu'on a des jeunes qui ont fait Mines à Boké, d'autres ont fait santé mais puisqu'on n'a pas de représentants au haut niveau, les jeunes ne gagnent pas d'opportunités d'occuper de hautes fonctions dans ce pays. Et aujourd'hui, il n'y a pratiquement pas quelqu'un qui va porter la voix de la communauté pour sa promotion. 

Quand on parle des bassaris, certains compatriotes se demandent « où est-ce qu'ils habitent en Guinée ».  Que leur répondez-vous ?

Les bassaris habitent à Koundara, vers le Nord Est, dans les sous-préfectures de Guingan et Termessé, à la frontière avec Kédougou (Sénégal).

Des sociologues soutiennent que les bassaris guinéens risquent de migrer tous vers le Sénégal parce que là-bas, l'Etat donne des opportunités aux méritants de cette communauté. Partagez-vous cette crainte ?

Non, les bassaris guinéens qui partent là-bas, certains c'est pour les études. Une fois qu'ils terminent, il y en a qui restent s'ils trouvent de l'emploi parce qu'au Sénégal, l'Etat donne des opportunités aux bassaris de leur pays. Il y en a beaucoup qui occupent des postes de responsabilités au haut niveau. 

Mais, il y a d'autres bassaris qui partent régulièrement à la recherche du quotidien et après quelques temps ils retournent en Guinée. Et le Sénégal accorde une priorité à ses citoyens bassaris.

Avez-vous un dernier mot ?

Je voudrais réitérer mon appel à l'endroit du chef de l'Etat, le Colonel Mamadi DOUMBOUYA. Nous lui demandons de revoir notre cas, les localités où nous habitons, il n'y a pratiquement pas d'infrastructures scolaire, sanitaire et routière. Les écoles que nous avons là-bas ont été construites depuis l'indépendance. A Guingan, on a une école primaire et un collège construit par une ONG. A défaut, nos enfants sont obligés de venir à Koundara pour étudier. S'ils n'ont pas de parents pour les héberger, certains se découragent et abandonnent. D'autres partent au Sénégal. Des situations de ce genre ne finissent pas. Il faut qu’on nous aide à les corriger.

 

Entretien réalisé par Siddy Koundara Diallo 

Pour Africaguinee.com 

Tel : (00224) 655 311 114 

Créé le 16 mai 2022 14:21

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