Projet de« Modification » de la Constitution : un citoyen écrit à Alpha Condé…

Alpha Condé, Président de la République de Guinée

Monsieur le Président de la république,

C'est ma citoyenneté guinéenne, qui m'incite à vous adresser cette lettre. Veuillez bien en excuser la longueur. 

Cette lettre, c’est avec un sentiment de devoir à l’égard de la Guinée que je vous l'adresse. Elle est un cri de douleur que nous citoyens Guinéens, ne pouvons plus comprimer dans nos entrailles et notre gorge, car suite à l’innommable, à toutes ces sacrifices, pour l'instauration d'une démocratie apaisée. C'est ce devoir républicain qui me pousse à vous implorer d’abandonner le projet de briguer un troisième mandat aux élections présidentielles de 2020. Ce mandat que vous voulez arracher de force est un mandat de tous les dangers. Ce mandat de trop risque de replonger le pays dans les abysses de la confrontation politico-ethnique et partant, déboucher sur une instabilité de toute la sous région. C’est une grande responsabilité que vous prenez en voulant endosser cette perspective !

Monsieur le Président,

Lors de votre prestation de serment, le 14 Décembre 2015, l’ancien président de la cour constitutionnelle débarqué à la suite d’un coup d’Etat constitutionnel, monsieur Kelefa Sall, vous aviez mis en garde contre toute tentative de modification de la constitution dans l'optique de briguer un troisième mandat en ces termes : « Gardez-vous de succomber à la mélodie des sirènes révisionnistes car, si le peuple de Guinée vous a donné et renouvelé sa confiance, il demeure cependant légitimement vigilant». 

En mai 2016, dans un entretien avec jeune Afrique, à une question d'un journaliste à savoir si la limitation à deux mandats par la constitution guinéenne vous paraissait-il suffisant ? Vous répondiez : " La question est complexe. Les pays asiatiques ont fait des progrès économiques et sociaux considérables avec des dictatures. Aux pays africains, on demande de réaliser la même chose, mais avec des démocraties exemplaires, si possible parfaites. L’ancien Premier ministre Mahathir, le père du miracle malaisien, qui est resté vingt-deux ans au pouvoir, ne m’a pas caché qu’il était hostile aux limitations de mandats : s’il avait dû partir au bout de dix ans, m’a-t-il dit, son pays ne serait jamais parvenu à de tels résultats " . Il a raison. Oui monsieur le président, il a raison. Mais sauf que la constitution guinéenne en ces articles 27 et 154 est claire :

Article 27 :  « en aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels, consécutifs ou non ».

Article 154 :  « La forme républicaine de l’État, le principe de la laïcité, le principe de l’unicité de l’État, le principe de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs, le pluralisme politique et syndical, le nombre et la durée des mandats du Président de la République ne peuvent faire l’objet d’une révision ».

Mais force fût de constater, ce 19 Novembre 2018, que par le biais de votre dévoué ministre d’Etat, ministre secrétaire général à la présidence, Naby Youssouf Kiridi Bangoura, lors de son entretien sur France 24, disait en ces termes : « Alpha Condé ou n’importe quel autre acteur guinéen, ne peut modifier la Constitution sans la volonté du peuple de Guinée. La Constitution est l’affaire du souverain premier qui est le peuple de Guinée. Légitimement, ce peuple-là peut revoir ses intentions. Je crois que ce débat-là aussi est un débat légitime en démocratie. Que les gens s’interrogent sur le système politique qu’ils ont en place, l’évaluent et souhaitent l’améliorer d’une manière ou d’une autre. Cela n’est pas la question d’une personne. La Constitution est l’affaire du peuple souverain(…)». Cette annonce de Monsieur Kiridi Bangoura qui était en service commandé vient d’être suivi par vos différentes mobilisations des populations à travers le pays à fin de préparer l'esprit des Guinéens. 

Monsieur le Président,

Avec cette déclaration de monsieur Kiridi Bangoura, vous érigez le parti présidentiel au dessus de la Constitution. Au demeurant, ce n’est pas la constitution qui doit déterminer si oui ou non vous devez briguer un troisième mandat ! Cette déclaration lourde de signification confirme que le Rpg arc-en-ciel est en phase de devenir un parti-Etat ! Un parti qui a le droit de vie ou de mort ! Un parti  qui doit être unique ! Un parti qui doit détruire toutes les autres organisations politiques qui ne lui sont pas inféodées ! Un parti qui doit définir seul les règles de jeu des élections futures. Un parti qui doit tuer toute voix dissonante.

Monsieur le Président,

Ce retour au monopartisme explique pourquoi presque tous les partis politiques d’opposition sont en train d’être détruits. Ce retour à la pensée unique explique pourquoi vous n’aviez pas hésité à dire lors de la campagne électorale de 2010 que " vous allez prendre la Guinée là où Sekou Touré l'a laissé " . C’est cette propension à rester seul sur la scène politique qui vous pousse à mettre en branle l'administration publique et la justice pour écraser toutes voix dissonantes.

Monsieur le Président,

Le peuple Guinéen a versé un lourd tribu pour entrer  dans une ère de démocratie multipartite. Trop de sang ont coulé au nom de la défense de la démocratie. Jamais au grand jamais, ce peuple n’acceptera de retourner dans les travers de la dictature d’un parti unique. De ce fait, votre troisième mandat ne  passera pas. Regardez autour de vous, au sein de votre propre parti, la question divise. Une majorité silencieuse du Rpg arc-en-ciel n’approuve pas votre projet d’être « Président à perpétuité » ! Regardez et écoutez toutes ces voix de part le monde qui vous supplient de ne pas vous représenter pour la troisième fois.

Monsieur le Président,

Face à cette question de votre propre succession en 2020, vous aurez le monde entier contre vous. Vous aurez en face de vous une détermination de tout un peuple qui est prêt au sacrifice suprême pour vous barrer la route.

Tant que nous serons encore en vie, nous ne pouvons pas nous résoudre à accepter cette fatalité nourrie et alimentée par une indifférence et un cynisme national sans précédent.

Monsieur le Président,

Pourquoi sacrifier toute une cause pour protéger une poignée de personnes qui ont la frousse du changement ? Pourquoi méprisez-vous tant vos camarades du parti au point de déclarer que le Rpg arc-en-ciel n’a que vous pour diriger la Guinée ? Pourquoi hypothéquer l’avenir de toute une organisation  comme le Rpg arc-en-ciel pour des intérêts fugaces d’un club ? Êtes-vous sûr d’avoir les mêmes intérêts avec ces nouveaux troubadours qui vous poussent à la faute en défendant votre troisième mandat ?

Monsieur le Président,

Cette série d’interrogations qui circulent sous le manteau au sein de votre propre parti me poussent à vous proposer une voie de sortie : d’une part organiser un congrès du parti qui désignera un autre candidat aux présidentielles de 2020, d’autre part appliquer les conclusions des différents dialogues tout en mettant la constitution en avant. Pour sortir tête haute de ce traquenard, exigez que la question de votre immunité soit abordée. En dehors de cette voie, vous vous retrouverez dans une tenaille de votre propre parti et du peuple de Guinée. Et cet étau risque de vous faire mal et de compromettre la stabilité de la Guinée et partant celle de la sous région.
 

Monsieur le Président,

Si vous n’aviez pas autour de vous des conseillers qui veulent votre perte, vous n’auriez pas dû emprunter ce chemin ! Si vous n’aviez pas autour de vous des conseillers qui vous enfoncent, vous n’auriez pas pris le risque de souffler sur les braises d'un troisième mandat ! Si vous n’aviez pas des hommes de paille qui ne rêvent que d’écorner votre image, votre premier ministre n’aurait pas systématiquement interdit toute manifestation sur toute l’étendue du territoire jusqu’à nouvel ordre ! Ces pièges cousus de fil blanc qui viennent de votre propre camp me poussent à vous répéter une fois de plus qu’il faut quitter ce pouvoir à temps ! Et surtout abandonnez ce troisième mandat qui n’est qu’un piège dangereux pour vous, pour votre parti politique et pour la nation guinéenne entière.

Monsieur le président,

Peut-être est-ce notre désir de survivre à ces velléités et de vivre dans notre dignité d’êtres humains qui me laisse espérer que vous pourriez encore œuvrer pour sauver la Guinée et son peuple ! 

Je vous remercie de votre attention et je vous prie de croire, Monsieur le Président de la République, en l’expression de ma très haute considération.

 

TOB BALDE citoyen guinéen résidant en France !

Créé le 22 novembre 2018 16:08

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