Edouard Zotoumou : « Pourquoi nous récusons le MATD pour l’organisation des élections… »

CONAKRY- L’organisation des élections par le Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation ne fait pas l’unanimité. Bien que les autorités brandissent un certain nombre de garanties, certains acteurs politique restent méfiants. C’est le cas du vice-président de l’ANAD (alliance nationale pour l’alternance et la démocratie), un des blocs politiques majeurs du pays. Dans cet entretien accordé à Africaguinee.com, cet acteur politique a donné les raisons de leur scepticisme. Dr Edouard Zotoumou Kpoghomou donne aussi sa position sur le recensement biométrique et le couplage annoncé de la présidentielle aux législatives.

AFRICAGUINEE.COM : Le Gouvernement envisage un nouveau schéma électoral prévoyant qu’après le référendum, il y ait un couplage de la présidentielle aux législatives. Qu’en pensez-vous ?

Je pense que c’est toujours la continuation d’une sorte de fuite en avant à laquelle on est habituée. En réalité, le système électoral guinéen n’a jamais été confronté à des couplages d’élections. On n’a jamais couplé des élections ici, à moins que ce soit peut-être à un niveau un peu plus bas, surtout quand il s’agit de faire les législatives ou alors les présidentielles. Nous pensons que c’est une fuite en avant. Parce qu’on n’a pas rempli toutes les conditions qu’il faut pour qu’on parle même d’élections. Nous sommes en train de parler d’élections dont la date n’est pas été fixée et dont les préalables n’ont pas encore été satisfaites. En termes de fichier électoral, en termes de recensement, en termes de bouclage même du financement nécessaire. Quand on veut parler d’élections en pareilles circonstances, il faut avoir d’abord défini un cycle électoral qui n’existe pas.

Personne ne sait quand est-ce tout cela va se faire. Aujourd’hui encore, nous sommes toujours en train de parler du référendum. Le projet de constitution a été élaboré en dehors de l’apport pertinent de toutes les parties concernées. Les partis politiques ont été exclus de ce processus. Donc, je pense que dans de telles conditions, parler de référendum qui va conduire à des élections, c’est encore une fois une fuite en avant. La réalité, c’est que les conditions ne sont pas réunies pour qu’on puisse parler d’élections.

Ça, c’est en dépit du fait qu’il y a des difficultés liées à l’élaboration du fichier électoral, parce qu’on n’a pas encore complété tous les projets liés à l’établissement de ce fichier. Tout ça, c’est dans la lignée du fait qu’en réalité, la volonté politique pour pouvoir organiser les élections n’existe pas en réalité. Alors, on fait semblant, mais en réalité, nos dirigeants actuels ne sont pas dans la dynamique de pouvoir organiser des élections.

L‘organisation des élections est dévolue au ministère de l’Administration du Territoire de la Décentralisation. Quelle est votre position ?

Nous avons recusé justement cette possibilité. Nous disons qu’à partir du moment où les intentions sont clairement fixées sur la possibilité d’une candidature du Général Mamadi Doumbouya, le MATD que nous considérons comme une extension du CNRD ne peut pas être choisi pour organiser des élections. Le ministère de l’administration du territoire, en organisant les élections, a toujours été sujet à des critiques acerbes. Et ça se comprend dans la mesure où le manque de confiance a été tel qu’il faut un organe franchement indépendant. Soit, une CENI (commission électorale nationale indépendante)  technique ou alors un organe de gestion des élections qu’on va constituer avec la participation de tous les acteurs.

Au-delà d’ailleurs, nous nous avions demandé à ce qu’effectivement le MATD, soit supervisé par une organisation ou une institution internationale impartiale, neutre. Mais à date, nous ne pensons pas que cela puisse se faire et si ça ne doit pas se faire, on est simplement en train de prêter le flanc à une possibilité d’une fraude massive parce que tout est en train d’être fait dans ce sens.

Les découpages électoraux qu’on est en train de faire, les kits qu’on est en train d’envoyer, tout ça c’est pour préparer justement le terrain afin que l’on puisse faire des transferts massifs de votes d’une région donnée au détriment d’une autre. Il suffit simplement d’assigner moins de kits à une zone et d’affecter plus à une autre pour pouvoir arriver à cette fin.

Nous pensons qu’il faut que l’on soit un peu plus sérieux dans ce que nous voulons faire. Aujourd’hui, le découpage pour le recensement, il y a carrément des disparités. Il y a certaines préfectures en Haute-Guinée dont le découpage est fait de sorte que même certaines concessions sont des quartiers. On a des renseignements qui nous parviennent. Vous prenez Mandiana, cette préfecture ne peut pas être égalé à certains quartiers de N’Zérékoré, en l’occurrence Maoumou. Mais on attribue 22 quartiers à Mandiana alors que c’est l’équivalent d’un quartier comme Maoumou à N’Zérékoré.

Kankan, aujourd’hui a plus de 58 quartiers, il semblerait. C’est en tout cas les renseignements qui nous parviennent. Et dans ces conditions-là, nous sommes en train de faire en sorte qu’on prépare une contestation généralisée. C’est ça le problème.

Avez-vous des preuves de ce que vous dites-là ?

Écoutez, on a des sources fiables qui sont installées dans ces coins. Elles ne peuvent pas nous dire quelque chose qu’elles n’ont pas vu. Nous ne parlerons de quelque chose que si c’est tangible.

Mais tout ça là, ça va du fait qu’on n’a pas associé les politiques à ce travail. Parce que les élections ne concernent pas seulement le CNRD, qui dans l’imagination de la plupart de gens, est un parti politique. Or, le CNRD n’est pas un parti politique.

Parlant de ce recensement, le gouvernement appelle à une mobilisation générale. Rejoignez-vous cet appel ?

Pour le recensement, que l’on soit pour ou contre la constitution ou n’importe quel autre projet qui soit greffé, il faut être recensé pour faire compter sa voix. Donc nous, nous allons faire participer nos militants. Parce que si on n’en veut pas, on veut voter contre, on ira voter contre. Mais dans tout ça, il faut qu’on soit d’abord recensé.

A suivre !

Boubacar 1 DIALLO

Pour Africaguinee.com

Créé le 21 avril 2025 11:01

Nous vous proposons aussi

TAGS

étiquettes: , , , ,