Dialogue et arrêt des manifestations : La position des forces vives suite à l’appel de l’archevêque de Conakry
CONAKRY- « Les manifestations de rues ne règlent pas (les problèmes). C’est avec le consensus, l’échange, le dialogue…que nous pouvons réussir à résoudre nos problèmes. Qu’on abandonne les manifestations de rues, depuis qu’on a commencé, que de dégâts, de destructions de biens publics et privés, que des pertes en vies humaines ! Cela doit s’arrêter », a martelé Monseigneur Vincent Coulibaly, l’archevêque de Conakry en marge de son homélie à l’occasion de la fête de l’assomption.
Ces propos du prélat ont été suivis de près par les acteurs politiques membres des forces vives, coalition qui projette de nouvelles manifestations dans le pays. Interrogés sur cet appel du religieux, certains acteurs ne sont pas passés par le dos de la cuillère. Dr Édouard Zotomou Kpogomou, membre de l’Anad, pense que les religieux ont déjà choisi un camp.
« Nous avons toujours dit que si tous les hommes de Dieu, [je ne parle pas seulement de l’Eglise Catholique], étaient vraiment des serviteurs du peuple, ils n’auraient jamais hésité à dire la vérité au président Mamadi Doumbouya et au Cnrd. S’ils ne peuvent pas le faire, c’est comme s’ils se rangeaient du côté de la junte en laissant le peuple croupir dans la misère. Sinon, je trouve louable ce que Monseigneur Vincent Coulibaly a dit. Mais nous aurions préféré que tous les religieux (musulmans et chrétiens), traduisent leurs intentions dans des actes concrets, de façon transparente. Si cela est, je pense qu’on ne trouverait pas à redire », a réagi cet allié de Cellou Dalein Diallo.
Pour l’ancien candidat « recalé » à la présidentielle de 2020, le dialogue appelé par l’archevêque, c’est les forces vives qui en sont demandeurs : « Nous avions voulu d’un dialogue inclusif. Nous n’avions pas voulu qu’on fasse un tri des partis politiques. Nous n’avons jamais voulu que ce soit un dialogue sélectif. On a réclamé un dialogue inclusif. On est dans une transition où il n’y a pas de parti au pouvoir et donc, il n’y a pas d’opposition. Nous avons estimé que c’est le consensus qui guiderait toutes nos actions et qu’on se retrouverait autour de toutes les questions qui concernent la vie de la nation. Mais on ne peut pas exclure de facto un groupe, en privilégiant d’autres.
On ne peut pas prendre des décisions unilatérales, ensuite faire une politique de deux poids deux mesures. Aujourd’hui, on dit qu’il n’y a pas de manifestations. Pendant ce temps, il y a des manifestations pour ceux qui sont en phase avec ce que le CNRD fait. Et tous ceux critiquent tant soit peu les actions du gouvernement et du Cnrd, pour ceux-ci la manifestation leur est interdite. Quand on crée quelque chose comme le FNDT, le CERAG, c’est des mouvements de soutiens déguisés parce qu’ils le font avec l’onction de la junte. Donc, moi je dirais simplement aux religieux que nous acceptons bien le dialogue mais ce dialogue ne doit pas être sélectif », a réagi Dr Edouard Zotomou Kpoghomou, président de l’union démocratique pour le renouveau et le progrès (UDRP).
Pour le Rpg arc-en-ciel, le prélat a passé un ‘’bon’’ message, mais le souci est ailleurs. « Les manifestations n’ont pas pour but de détruire ou de tuer. Les manifestations, si elles sont encadrées comme partout ailleurs dans le monde, c’est de protester contre ce qui ne va pas bien », a indiqué Marc Yombouno.
L’archevêque a invité les uns et les autres à régler les divergences autour de la table du dialogue. C’est un préalable que les forces vives réclament depuis longtemps, estime l’ancien ministre du commerce.
“Ouvrir un cadre de dialogue inclusif sans préalable au niveau des autorités en disant que l’aspect judiciaire est différent de celui politique, est un faux débat. Vous ne pouvez pas emprisonner des gens pendant près de trois ans et demander à ce qu’il n’y ait pas de réactionnaires. Ça été des conditions exigées depuis longtemps par le RPG, à savoir la libération de nos cadres qui sont détenus plus de deux ans sans preuves. Je crois que les évêques ont été d’ailleurs les seuls à appeler au dialogue avec les autorités, mais jusqu’à présent leur message n’a pas été entendu.
Je crois qu’il revient pour attirer l’attention des uns et autres sur la nécessité d’apaiser le climat de tensions, nous sommes tous conscients de ça, mais, il faudrait que les choses bougent au niveau de l’Etat. Quand le prélat appelle au dialogue inclusif, tous ceux qui sont en exil, ceux qui sont en prison, que chacun soit libre pour participer au débat national. Dès qu’on parle de libération on nous dit que la justice est indépendante, mais dès que ça touche un des leurs, c’est l’exécutif qui intervient pour libérer les gens », a déploré ce responsable du parti Alpha Condé.
Manifestation, une dernière option
Pour cet activiste de la société civile et membre des forces vives, les manifestations constituent une dernière option. « De notre côté (Forces vives), les manifestations, c’est la dernière option. C’est lorsque nous n’avons aucune solution que nous essayons une fois encore de procéder à des manifestations, sinon honnêtement ce n’est pas notre volonté. Il revient maintenant aux autorités de donner du sens aux appels des prélats, de les respecter comme c’est le cas ailleurs dans d’autres pays. Il faut que ceux qui dirigent arrêtent de considérer les autorités religieuses comme de simples sujets qu’ils gouvernent. Ils doivent apprendre cette dimension de spiritualité », conseille cet activiste.
A suivre !
Siddy Koundara Diallo
Pour Africaguinee.com
Créé le 16 août 2024 18:49Nous vous proposons aussi
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