Cas Foniké-Billo Bah, dialogue…évaluation des partis politiques : Les confidences du Premier ministre Amadou Oury Bah…
CONAKRY-Le Gouvernement a-t-il des nouvelles de Oumar Sylla et Mamadou Billo Bah ? Comment appréhende-t-il leur disparition ? A quel niveau se situe le processus de dialogue permanent qu’il a promis d’instaurer ? Que vise l’évaluation des partis politiques ? Comment compte-t-il mettre fin aux crimes qui émaillent les manifestations en Guinée ? Le Premier Ministre Amadou Oury Bah a accepté de répondre aux questions d’Africaguinee.com. Exclusif !!!
AFRICAGUINEE.COM : Au plan politique vous aviez promis à votre arrivée d’instaurer un processus dynamique de concertation avec la classe politique. Où est-ce qu’on en est ?
Cette concertation est effective. Il y a des chantiers qui sont ouverts, les partis politiques sont régulièrement conviés par le ministère de l’administration du territoire à des échanges non pas sur de grandes orientations, mais sur des aspects factuels de l’organisation du pays et de l’organisation des partis politiques. Donc, cela est en cours. Chacun sait aujourd’hui où est-ce qu’on va. Maintenant les rencontres ne seront, sauf quelques aspects particuliers, que des rencontres d’informations. Nous allons maintenir le cap et la porte est ouverte, rien n’est fermé. Mais tout le monde sait aujourd’hui que le processus est en marche. Ce n’est pas pour dire « retrouvons-nous pour savoir qu’est-ce qu’il faut faire ». On pourra se retrouver pour dire ‘’nous sommes à ce niveau-là, il y a tel aspect qu’il faut améliorer’’. Je pense que le dialogue est maintenu et il sera renforcé parce qu’il est devenu beaucoup plus opérationnel que programmatique.
Mais voyant les complaintes et autres récriminations de certains acteurs politiques qui continuent de dénoncer la gestion unilatérale du processus du retour à l’ordre constitutionnel…on a plutôt l’impression qu’il y a un hiatus…
Bien entendu par rapport à l’organisation des élections c’est normal. Par rapport même à la présentation de l’avant-projet constitutionnel au niveau du CNT, tous les partis politiques sont ou seront conviés pour aller encore davantage en profondeur. Donc, il y a une inclusion de tous dans les démarches qui sont en train d’être faites. Le CNT est en train de le faire, au niveau du ministère de l’administration du territoire, vous savez qu’il y a eu récemment une publication de résultats sur la qualité administrative et organisationnelle des partis politiques. Les partis doivent se conformer aux nouvelles exigences en termes de conformité avec la charte et d’autres principes d’effectivité de leur présence sur le terrain. Je dois dire que tout ça est en train d’être fait. Mais ce n’est pas spectaculaire.
Nous sommes aussi avec le RAVEC pour avoir un fichier électoral. Et même ça, les partis politiques sont conviés pour participer à la campagne de sensibilisation de la population sur la nécessité absolue de faire en sorte que tout le monde puisse s’enrôler.
Est-ce qu’à date l’enrôlement a commencé ?
Non, pas encore, mais le travail est en train de se faire. La cadence va être accélérée avec l’aide de Dieu.
Derrière cette évaluation des partis politiques, certains craignent une volonté d’épuration. Que répondez-vous ?
Je pense que celui qui remplit les critères administratifs et les normes établis n’a rien à craindre.
Les forces vives exigent l’abandon des poursuites engagées contre certains leaders politiques ainsi que le retour des exilés. Est-ce que le Gouvernement que vous dirigez est prêt à accéder à ces revendications pour décrisper la situation ?
Ceux qui s’expriment ainsi ne se rendent pas comptent que les temps ont changé. On vient de terminer le procès du massacre du 28 septembre 2009 où d’anciens dirigeants de ce pays sont passés devant la barre, y compris l’ancien chef de l’Etat. C’est une leçon. Tout homme ou femme politique qui a des difficultés avec la justice de son pays dans le contexte actuel devrait réfléchir plusieurs fois avant de mettre en avant certaines revendications du genre à bénéficier d’une forme d’impunité. Ce n’est plus à l’ordre du jour. Sinon comment pourrons-nous justifier que certains ont été jugés pour des faits extrêmement graves et le verdict qui a été prononcé est connu de tous ? D’autres (anciens) dirigeants sont en détention préventive jusqu’à présent pour répondre à des faits qui leur sont reprochés par la justice. De quelle manière pourrons-nous justifier que certains puissent bénéficier d’une impunité alors que d’autres sont en train d’être privés de leur liberté parce que la Justice leur reproche certains faits ? Ceci est une affaire de la justice et non une affaire du Gouvernement.
La seule chose à laquelle nous tenons fortement, ce que les principes de l’État de Droit puissent prévaloir en toute circonstance. Et quelque soit la personne, tant qu’elle n’est pas judiciairement condamnée, qu’elle puisse bénéficier de la présomption d’innocence. C’est par ce biais-là que nous pourrons évoluer tranquillement.
Maintenant, mettre sur le même tableau le changement constitutionnel que le pays réclame depuis très longtemps avec des institutions fortes et aussi une volonté de contribuer à déstabiliser le pays tout simplement parce qu’on veut bénéficier d’impunité, la population fera la part des choses de la manière la plus aisée le moment venu.
Voulez-vous dire que sur ce point l’Exécutif n’influencera pas la justice ?
La Justice est indépendante.
Malgré vos « mises en garde » au lendemain de votre nomination, on voit que des crimes continuent d’être commis lors des opérations de maintien d’ordre. Que fait votre Gouvernement pour y mettre fin ?
Le changement peut parfois prendre du temps avant d’être effectif. C’est comme un tremblement de terre. La première secousse est la plus forte, ensuite il y a des répliques. Au fil du temps, elles s’estompent. Nous sommes dans un environnement qui a été pendant très longtemps marqué par la violence. Je dois même dire que l’activité politique sur certains aspects a été beaucoup plus déviante pour instrumentaliser la délinquance à des fins politiques. Cela continue. Instrumentaliser la délinquance pour des fins politiques entre dans une logique de perpétuation systématique d’un état de déstabilisation.
Et si vous remarquez bien, même dans votre question tout à l’heure « pour que nous puissions avoir une transition stable, il faut que certains acteurs puissent bénéficier d’une forme d’impunité ». Cela veut dire quoi ? Sur le terrain qui a intérêt à ce qu’il y ait des actes susceptibles d’amener le désordre ? En tout cas, ce n’est pas les autorités en charge de la responsabilité à l’heure actuelle. Donc, il y a d’autres qui espèrent par ce biais-là obtenir gain de cause en prenant en otage le pays. Par quel moyen ? Une forme de déstabilisation.
Donc cette crainte de déstabilisation est bien réelle ?
Nous sommes responsables de la sécurité et de la garantie de la stabilité de notre pays. Il ne faudrait pas occulter cette nécessité absolue surtout dans un environnement où la culture politicienne est plus portée à détruire qu’à construire.
Il y a un ancien chef de l’Etat, pour lui, tant qu’il aura la possibilité de le faire, il ne laissera pas les gens tranquilles. Pour l’intérêt du pays ? Non. C’est pour ses propres intérêts personnels. Donc, ceci explique cette situation.
Comment comptez-vous mettre fin à ces violences devenues latentes ?
On y travaille et on continuera à y travailler sans relâche. Et je dois dire que la question de la violence, il faut qu’on la questionne. Elle est partout. Au sein des instruments de l’Etat, au sein de ceux qui prétendent combattre les autorités actuelles. Nous, nous n’avons aucun intérêt qu’on nous reproche des disparitions, des tueries. Mais objectivement, connaissant l’histoire de ce pays, certains estiment que pour gêner l’action gouvernementale il faut créer des problèmes. Si ce sont des manifestations pacifiques, il va de soi que ça n’aura pas d’impact sur le plan médiatique…mais il faut aligner des morts, ensuite brandir cela comme des trophées pour dire que les autorités guinéennes usent de violences contre des personnes. Nous n’avons aucun intérêt à perpétuer cela. Et ceux qui s’amusent avec ça, personnellement, je dois dire que la puissance publique doit aussi aller jusqu’au bout. Et de manière conséquente ne pas tolérer, parce que certains ont de l’argent, ils ont des moyens d’instrumentaliser des enfants dans les rues pour agir à l’encontre des intérêts des citoyens, de la République et de la stabilité du pays.
Est-ce que le Gouvernement a des nouvelles des deux activistes déclarés portés disparus ?
J’étais en conférence avec la Secrétaire d’Etat des États-Unis, madame Azra. Elle a félicité la Guinée par rapport à ses engagements, à la mise en œuvre de politiques courageuses, notamment la tenue du procès du 28 septembre. La question sur laquelle, au nom des États-Unis, elle a exprimé des préoccupations, c’est la question des deux activistes qui ont disparu.
Pouvez-vous imaginer, en tant que Premier ministre Chef du Gouvernement, au moment où nous finissons le procès du 28 septembre, nous avons des relations fraternelles et cordiales avec les instances de la Cedeao, l’OIF vient de lever sa suspension sur la Guinée, sur le plan économique des mesures extrêmement importantes sont en œuvre…vous croyez que ça nous fait plaisir que des gens continuent à salir la réputation et l’image de la Guinée partout ? Cela veut dire qu’il y a au niveau de certains une volonté délibérée de tout noircir pour des intérêts politiciens. C’est de leur responsabilité, mais le moment venu, la population tranchera.
Voulez-vous dire que le Gouvernement n’exclut aucune possibilité ?
On n’exclut rien du tout. Le procureur de la République a été très explicite dans cette affaire. La justice est en train de tout mettre en œuvre pour la recherche de ces deux personnes qui ont disparu. Le moment venu, elle aura à s’exprimer là-dessus.
A suivre !
Boubacar 1 DIALLO
Pour Africaguinee.com
Créé le 12 août 2024 10:00Nous vous proposons aussi
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