Alexander Hunt: « Les Etats-Unis soutiennent les journalistes…mais respectent aussi la Guinée »

CONAKRY- Africaguinee.com a été reçu à l’ambassade des États-Unis à Conakry par Alexander Hunt, conseiller chargé des affaires culturelles et de presse à l’ambassade des Etats-Unis en Guinée dans le cadre d’une interview exclusive. Le diplomate venait de boucler un séjour de travail au Foutah.

Au cœur des échanges, plusieurs questions liées aux programmes et projets déployés par l’ambassade des États-Unis en Guinée, dans divers domaines, tels que la culture ; l’éducation ; les médias.

« La liberté de la presse et des journalistes reste une préoccupation pour les Etats-Unis », déclare Alexander Hunt. Toutefois, précise le diplomate, son pays respecte l’indépendance et la souveraineté de la Guinée. Entretien exclusif !!!

AFRICAGUINEE.COM : M. Alexander ! Récemment vous avez séjourné au Foutah. En quoi la région vous a-t-elle marquée ?

ALEXANDER HUNT : J’étais ravi de voir cette région, c’était la première fois que j’y allais, depuis je suis arrivé en Guinée, il y a 3 ans. J’ai eu enfin l’occasion de visiter cette belle région magnifique et splendide. On a vu les sites de Saala à Labé et le paysage. Le climat est doux, les populations sont très accueillantes et les repas sont bien faits.  C’était un plaisir de voir cette belle région.

Quel était le but de la mission ?

Pour ce qui est du but de la mission, le Bureau des Affaires publiques de l’ambassade des Etats-Unis avait lancé un projet à Labé en collaboration avec l’association Villageois 2.0 et Guineecheck, un programme de renforcement de capacités des journalistes, des blogueurs et aussi de la société civile, pour renforcer la résilience des informations ici en Guinée ou renforcer l’écosystème de l’information. C’est-à-dire montrer comment utiliser les outils d’appoint pour vérifier les faits, vérifier aussi l’information avant de publier quelque chose ; avant de partager des choses qu’on voit souvent en ligne et avoir des compétences critiques. Voici le premier but de notre voyage à Labé.

Nous avons aussi visité l’Université de Labé, l’Université de de Mamou où nous avons un espace américain à l’image d’un centre culturel, d’éducation et de formation. A Dalaba, nous avons un partenaire qui s’appelle Minkadi. Ce partenaire aussi a été visité, il a une ONG qui porte sur l’assainissement de la région et d’autres priorités. Donc l’objectif de notre visite était de voir nos projets dans la région et savoir comment tout se passe.

Vous avez visité 2 Universités à Mamou et à Labé.  Les installations et les équipements sont-ils dignes d’institutions d’enseignement supérieur comme c’est le cas dans d’autres pays ?

D’abord, je dois dire que j’étais impressionné par l’Institut Supérieur de Technologies de Mamou ainsi que l’Université de Labé. Franchement ils ont des équipements impressionnants, des outils d’appoint modernes, des machines que je ne reconnaissais pas du tout. A Mamou, j’ai vu des machines à souder, des grosses imprimantes en Métal, c’est un Hub qui existe à Mamou où nous avons notre centre qui accueille de nombreux jeunes pour améliorer leurs compétences. A Labé aussi l’université dispose de bons équipements. On était là pour parler avec les autorités universitaires pour voir si un jour on pouvait ouvrir un espace américain à Labé.  Ma vision c’est de voir si je pouvais ouvrir des espaces américains à travers la Guinée, dans toutes les grandes villes. Comme ça les guinéens ont accès aux matériaux, aux livres, à l’internet mais aussi des formations, des ateliers, des présentations, des conférences et tout le reste, qu’on organise dans ces espaces.

Quel est l’étendue de vos projets en termes d’éducation dans la région du Foutah où il y a un taux élevé d’abandon scolaire ?

Oui nous accompagnons le secteur éducatif, cette fois ce n’est pas fait, mais des fois on fait des donations de livres aux écoles. En fait, les opportunités que l’ambassade des Etats-Unis donne c’est plutôt les échanges. Aux Etats-Unis cela fait un moment que nous n’avons pas eu de boursiers venus du Foutah, cette année on a eu un Guinéen de Dalaba qui va participer à notre programme à Washington. A l’avenir on aimerait avoir plus de participants venus du Foutah qui participent à nos programmes d’échanges. Justement nous avons un programme de leadership dédié aux jeunes lycéens. Nous souhaitons avoir des lycéens qui vont participer à ce programme de leadership aux Etats-Unis. Nous avons fait la promotion de ce programme. Lors de notre récente visite à Dalaba, la délégation de l’ambassade des États-Unis a participé au lancement officiel du programme de bourses English Access Program, financé par une subvention du Département d’État américain accordée à l’organisation locale Jeune Espoir.

Ce programme sur deux ans offre à 48 jeunes de 13 à 20 ans issus de milieux défavorisés des cours d’anglais intensifs en dehors des heures de classe. Il vise à améliorer leurs perspectives académiques et professionnelles, tout en leur donnant les outils nécessaires pour accéder à des programmes d’échange avec les États-Unis. La cérémonie a réuni des élèves, leurs parents, les enseignants, ainsi que des représentants des autorités éducatives locales. Les élèves ont présenté une pièce de théâtre en anglais sur les dangers de l’immigration clandestine. Ils ont reçu des livres et des certificats de participation. Ils ont également échangé avec le personnel de l’ambassade sur leur apprentissage. Cette initiative illustre l’engagement du gouvernement des États-Unis à promouvoir l’éducation inclusive et à créer des opportunités pour la jeunesse guinéenne.

Revenons au fact-checking qui vous tient à cœur. Est-ce que cette initiation à la vérification de l’information s’élargit au-delà des journalistes ?

En fait, cette formation va au-delà des journalistes. Elle s’étend aussi aux blogueurs et aux acteurs de la société civile. De mon point de vue, tout le monde a un rôle à jouer y compris même les consommateurs des médias. Il faut cet aspect critique quand on consomme de l’information ; il faut s’interroger chaque fois d’où vient cette information ? est-ce qu’elle a été créée avec l’IA, est-ce qu’il y a un but politique derrière et aller jusqu’à se demander pourquoi ça été publié. Je crois que les journalistes et les blogueurs ont aussi un rôle à jouer, avant de publier quelque chose : vérifier l’information. Pourtant c’est fréquent en Guinée, on voit pas mal de journalistes et blogueurs qui publient des choses avant de vérifier. Parfois il y a des articles qui sont écrits ici en Guinée qui portent sur l’ambassade des Etats-Unis alors que personne ne nous a contactés pour poser des questions afin de vérifier l’information. Donc ces formations en fact-checking c’est pour renforcer ces idées de vérifier l’information avant de partager pour les consommateurs ainsi que pour ceux qui publient en ligne.

Est-ce que vous œuvrez également pour le maintien et la promotion de la liberté de la presse ?

Tout à fait. En fait ce qui est plus important pour les Etats-Unis, c’est protéger ce côté des droits de l’Homme qui est cette liberté d’expression qui relève des droits humains d’un côté. Surtout éviter de censurer les gens, voici une priorité actuelle aux Etats-Unis qui a toujours été parmi nos valeurs de base, donc ce programme de formation de Labé fait partie de cette priorité des Etats-Unis.

Vous arrive-t-il de jouer un rôle d’arbitrage entre les journalistes guinéens à qui vous donnez souvent des formations et les pouvoirs publics lorsque des situations sont tendues ?

Il va toujours y avoir ces tensions dans le monde entier entre les journalistes et les autorités. Ce sont des tensions qui existent entre ces deux mondes ; ça existe partout. Mais les journalistes jouent un rôle très important dans toutes les démocraties. Mais s’ils prennent la responsabilité de vérifier l’information avant de publier, pour nous c’est important de donner ces capacités pour qu’ils ne publient que la vérité mais la vérité qui a été vérifiée. Si tout a été vérifié sans aucune accusation gratuite, vous réunissez tout, je pense que les autorités vont respecter l’information publiée. Sinon les relations sont toujours tendues entre autorités et journalistes dans le monde. Mais si tout est bien vérifié avant de publier, la liberté d’expression sera respectée, mais publier avec des failles, voici ce qui est mauvais ; ou bien publier des choses avant de se lancer dans la vérification. Ce qui amène souvent des problèmes.

Avez-vous un regard sur la manière de travailler des journalistes guinéens avec des moyens limités et du matériel inadapté au monde d’aujourd’hui ?

Je dois vous dire que je suis impressionné par tout ce que les journalistes arrivent à faire ici en Guinée. Je suis vraiment inspiré par les journalistes guinéens avec le peu de moyens, qu’ils ont. Et je vois qu’ils ont la bonne volonté, on a vu ça l’année dernière, nous avons lancé des prix d’excellence en journalisme, et nous savons comment les journalistes se battent pour faire bien le métier, du bon journalisme sans les moyens nécessaires. On sait que c’est possible parfois avec un simple téléphone on fait du journalisme ici en Guinée. Et pour vérifier les informations lors de notre programme avec l’association Villageois 2.0 nous avons montré des outils utilisant l’IA et d’autres outils qui existent gratuitement en ligne qui sont disponibles pour tous les journalistes en Guinée. Nous nous sommes rendu compte que les journalistes guinéens sans moyens à travers ces outils gratuits peuvent quand-même vérifier ces informations.

Les Etats-Unis modèle de démocratie dans ont fermé la Voix de l’Amérique vieille de 85 ans ; une radio considérée comme leur torche diplomatique. Une autre radio qui a ouvert récemment ses programmes Fulfulde mais d’un coup tout s’arrête. Simple coup dur ou recul démocratique ?

(Éclats de rire), en fait je ne sais pas si vous êtes au courant mais on a aussi ouvert récemment à la place une nouvelle émission radio ici en Guinée, même en langue Pulaar, une émission hebdomadaire appelée ‘’ SOUS L’ARBRE A PALABRE’’ tous les dimanches à 15 heures dans 6 langues parlées en Guinée (français, pulaar, Soussou, Guerzé, Maninka et Kissi). Une émission qui porte sur beaucoup de thèmes à l’image de la Voix de l’Amérique. J’encourage les guinéens à suivre ces programmes. Ce programme est diffusé sur les antennes de Sabari FM et de la radio rurale de Guinée partout en Guinée, je crois que c’est entre 6 et 8 fréquences, c’est à travers toute la Guinée en 6 langues. On s’est dit que c’est mieux de contextualiser le programme et le contenu pour la Guinée directement.

C’est vrai, la voix de l’Amérique était fabuleuse, mais parfois c’étaient des sujets qui ne sont pas contextualisés pour la Guinée alors que notre nouvelle émission ce sont vraiment des histoires, des succès ici en Guinée, on met en lumière des Guinéens qui travaillent dans l’éducation, dans la santé publique et aussi le programmes de l’ambassade des Etats-Unis notamment les succès qu’on a eus ici pour bâtir l’avenir de la Guinée ensemble avec les Guinéens.

En 2015, Cherif Diallo, journaliste-reporter d’images à Espace TV a disparu. Récemment Habib Marouane Kamara et d’autres activistes sont introuvables. Dans ces genres situations, l’ambassade des USA adopte quelle démarche aau nom de la liberté de la presse et des Droits humains ?

Tout à fait, les Etats-Unis respectent la souveraineté de la Guinée. La souveraineté de la Guinée est une chose qu’il faut respecter. Les Etats-Unis sont là juste pour soutenir les journalistes, la liberté d’expression tout en reaspectant la Guinée comme pays indépendant. Mais comme vous avez vu, on a déjà publié des déclarations pour montrer notre position sur ces sujets. Nous avons aussi des discussions avec des autorités lors des réunions qui portent sur les mêmes sujets ; mais on ne peut pas intervenir directement, ce sont des choses qui font partie de la souveraineté de la Guinée.

La culture fait partie de vos programmes en Guinée. Quel est votre degré d’implication dans ce domaine ?

Dans le secteur de la culture, dans le Fouta particulièrement, nous avons eu un projet qui dure depuis 2 ans je crois où nous avons aidé la communauté de Timbo. Nous avons travaillé avec eux pour promouvoir l’histoire du Prince Abdourahamane, nous avons travaillé avec les sages de Timbo, l’artiste comédien Petit Tonton avec la Maison de l’oralité pour mettre en œuvre un spectacle qui porte sur cette histoire de ce prince du Fouta qui au XVIII siècle a été vendu comme esclave aux Etats-Unis mais grâce à l’intervention du président des Etats-Unis et le secrétaire d’Etat de l’époque, le prince Abdourahmane a été libéré et retourné en Afrique.

On voulait montrer que même au 18ème siècle lors de ce fléau de l’esclavagisme aux Etats-Unis, il y avait quand-même des personnes qui voulaient travailler à l’encontre de ces pratiques. Il y avait une sorte de coalition de compassion, on peut dire aux Etats-Unis, nous avons voulu donc préserver cette histoire partagée entre les Etats-Unis et la Guinée. Effectivement les sages de Timbo sont rentrés des Etats-Unis il y a juste quelques semaines. Je pense qu’ils sont à leur 4eme visite aux Etats-Unis pour retracer le voyage du prince Abdourahmane. Nous voulons donc continuer à renforcer les liens d’amitié entre les Etats-Unis et la Guinée à travers cette histoire partagée, même si c’est une histoire douloureuse il y a aussi une partie qui montre la compassion des Américains à l’époque.

Un dernier mot ?

Notre priorité ou une de nos priorités en ce moment ; c’est la promotion de l’entreprenariat à travers notre programme de formation qu’on organise en faveur des entrepreneurs guinéens. Il n’y a pas mal d’artisans qu’on forme dans ce sens. Donc pour nous, c’est se focaliser sur l’emploi ici en Guinée, l’emploi à travers l’artisanat, l’entreprenariat, à travers l’agriculture, le tourisme et tous les autres secteurs. Ça fait partie de nos programmes en Guinée.

Monsieur Alexander Hunt, merci beaucoup !

Monsieur Bah merci et Merci à votre organe d’information Africaguinee.com

Interview réalisée par Alpha Ousmane Bah

Pour Africaguinee.com

Tel: (+224) 664 92 45 45

Créé le 26 juin 2025 09:01

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