Universités de l’intérieur : immersion dans le quotidien précaire des étudiants à Kindia 

KINDIA – Des milliers d’étudiants convergent chaque année vers le centre universitaire de Kindia, situé à 7 km du centre-ville et à 135 km de Conakry, en quête de savoir. Ils sont généralement confrontés à la réalité de la vie estudiantine sans y avoir été préalablement préparés. Notre correspondant régional est allé à la rencontre de ces étudiants.

Logés à plusieurs kilomètres de leur établissement, la vie n’est pas facile pour la majorité d’entre eux. C’est le cas de Foromo Étienne Gbilimou, étudiant en licence 3 de sciences comptables, originaire de Lola, qui se confie sans détour.

« Certes, je suis en fin de cycle, mais je rencontre beaucoup de difficultés, notamment pour le logement, la nourriture et d’autres besoins essentiels. N’ayant aucune famille proche ici, j’ai dû louer un logement dès mon arrivée. À l’université, on doit être responsable de ses actes, c’est pourquoi je n’ai pas voulu vivre en famille d’accueil. Pour subvenir entièrement à mes besoins, j’effectue des travaux champêtres en parallèle à mes cours. »

Venue de Dalaba, Aïssata Kéita, étudiante en licence 2 de sciences du langage, a elle aussi trouvé un moyen de s’adapter. Pour couvrir ses besoins de base, elle pratique la couture après les cours. À travers son expérience, elle lance un message à ses camarades, notamment aux jeunes filles.

« Je demande aux filles qui viennent à l’université de se montrer prudentes et responsables. Moi, je suis maîtresse de couture. Après les cours, je travaille pour gagner ma vie. Je me prends en charge grâce à ma petite machine. »

Vivre ou survivre 

Contrairement à ceux qui s’efforcent de subvenir eux-mêmes à leurs besoins, d’autres préfèrent s’attacher à des personnes nanties pour mener une vie plus facile — au prix que seuls eux connaissent.

Originaire de N’Zérékoré, Mahara Vahi, étudiant en licence 3 de sciences comptables, rejette fermement cette pratique et prodigue des conseils simples mais directs :

« Je n’ai pas de parents ici. Je paie un loyer de 140 000 GNF par mois. Après l’université, je revends des condiments comme l’huile de palme, les aubergines ou encore le gombo, que mes parents m’envoient de Lola. C’est grâce à cette petite activité que je parviens à manger. Je dirais aux étudiants qui viendront après nous, surtout aux filles, d’être sages et responsables. La vie estudiantine est très compliquée. Celui qui ne fait pas attention échouera. Et celui qui se livre à certaines pratiques risque de se perdre dans des futilités. Il faut être courageux et prendre les choses au sérieux », conseille cette étudiante.

Nombreux sont les étudiants qui, loin de leurs familles, comptent uniquement sur l’appui de leurs parents. Elhadj Mamadou Alpha Baldé, étudiant en licence 2 au département des sciences du langage, vit en colocation. Originaire de Conakry, il s’est rapidement adapté aux réalités de la vie universitaire.

« Quand je suis arrivé à l’université, je ne savais même pas cuisiner. Aujourd’hui, je m’en sors très bien avec mes colocataires. Je suis logé et je paie un loyer de 140 000 GNF par mois. »

Mamadou Hady Barry, inscrit en licence 1 au département de mathématiques, n’est pas encore totalement intégré à cette nouvelle vie. Il reconnaît avoir encore du mal, notamment sur le plan alimentaire :

« Je tiens grâce à Dieu et au soutien de ma famille, mais la vie ici est très difficile. Avoir à manger, ce n’est pas évident. Il faut faire des économies. Ma famille m’envoie de l’argent, mais ce n’est pas suffisant. C’est pourquoi je fais des efforts surhumains pour économiser. Ici, il y a même un code entre étudiants pour désigner le nombre de repas pris dans la journée. Quand tu manges une fois le matin, on dit « 100 ». Si tu manges aussi à 14h, on dit « 110 ». Et si tu manges trois fois dans la journée, on dit « 111 » et on te qualifie de « patron » dans la cité. Parfois, on veille jusqu’à 5h du matin. Après la prière de l’aube, on dort jusqu’à 17h pour éviter de prendre le petit-déjeuner. Ça permet d’économiser l’argent que nos parents nous envoient. Le soir, c’est très compliqué de trouver à manger. Il faut emprunter un taxi pour aller en ville. L’aller-retour coûte 10 000 GNF. »

Des parcours singuliers, entre difficultés et débrouillardise

Étienne Doré est en troisième année de comptabilité. À son arrivée à Kindia, il avait trouvé refuge dans une famille, mais l’aventure n’a pas duré.

« Lorsque je suis arrivé pour la première fois, j’étais hébergé dans une famille. Mais faute de compréhension, j’ai fini par partir et me trouver mon propre logement que je louais à 100 000 GNF par mois. Grâce à mon comportement, le propriétaire m’a finalement exempté de paiement. Après les cours à l’université, je me débrouille dans un hôtel pour subvenir à mes besoins. »

Certes, la vie estudiantine à Kindia reste difficile pour beaucoup, mais certains parviennent malgré tout à vivre dans des conditions relativement aisées — souvent grâce au soutien constant de leurs familles ou à des opportunités particulières. Le contraste est saisissant entre ceux qui se battent au quotidien pour joindre les deux bouts et ceux qui, mieux entourés, traversent leur cursus universitaire avec plus de sérénité.

Kindia, Chérif Kéita 

pour Aficaguinee.com 

Créé le 1 juin 2025 11:00

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