Tentative d’évasion à la sûreté de Conakry : Le ministre Gassama Diaby dresse un « réquisitoire »…

Gassama Diaby

CONAKRY-Le ministre guinéen des Droits de l’Homme et des Libertés Publiques vient de se prononcer sur la tentative d’évasion qui a eu lieu  en début de semaine à la Sûreté Urbaine de Conakry. Pour Khalifa Gassama Diaby, cette tentative d’évasion,  au-delà des solutions immédiates et conjoncturelles qui doivent être prises, doit être l’occasion pour la société guinéenne de regarder  la question de la prison et de l’enfermement comme une question sociale et politique essentielle.

Un mouvement de mécontentement général suivi d’une tentative d’évasion a fait plusieurs blessés ce lundi à Conakry. Alors qu’une information judicaire est ouverte, et que des interrogations continuent encore de planer autour de cette rocambolesque affaire, le ministre Diaby, interpelle la société guinéenne dans son ensemble autour de la  prison.

 « Cette tentative d'évasion, au-delà des solutions immédiates et conjoncturelles, doit être aussi l'occasion pour nous et pour l'ensemble de la société guinéenne de regarder la question de la prison et de l’enfermement comme une question sociale et politique essentielle. La prison, les prisonniers ne sont pas en dehors de la société.  Non seulement c'est un élément de la société, mais surtout, les prisonniers d'aujourd'hui seront des individus libres de demain. Détruire cette humanité en eux, c'est construire les bases de l'insécurité sociale de demain », a alerté le ministre guinéen des Droits de l’Homme sur Africaguinee.com.

Khalifa Gassam Diaby souhaite que le débat sur ces deux sujets ait lieu de façon lucide et sereine, dans l'ensemble de la société guinéenne, à commencer par les  gouvernants,  qui, note-t-il, sont de ce fait, les premiers responsables de cette situation, qui dure et s’aggrave depuis plus de 50 ans. 

Pour le ministre des Droits de l’Homme, cette tentative d’évasion, ne doit pas être utilisée pour commettre des violences sur les prisonniers. Force doit rester à la loi, avertit le ministre Diaby.

 « Je lance un appel net pour rappeler que cette situation ne doit permettre aucune violence. Force doit rester à la loi. Si lors de cette tentative d'évasion des infractions sont constatées, il revient à la justice de les établir et de sanctionner.  En dehors, aucune violence ne doit être acceptée, ni tolérée, d'où qu'elle vienne.  Tout être humain à des droits imprescriptibles, tous les acteurs  doivent s'abstenir très clairement de tout usage de la violence », fait observer le chef du département des Droits de l’Homme. 

Et d’insister : « Toute la lumière doit être faite sur cette affaire. Par ailleurs, les détenus ne doivent faire l'objet d’aucune forme de violence ou de maltraitance. Aucunement. Cela ne serait conforme ni à nos lois, ni aux instruments juridiques internationaux, ni à la morale », alerte-t-il.

  Les détenus qui se sont rendus coupables de faits délictueux, doivent en répondre absolument devant la justice, affirme M. Diaby. Si, dit-il, l'administration pénitentiaire ou d'autres agents publics se rendent coupables de faits illégaux, ils doivent en répondre aussi devant la justice de notre pays. Selon lui, « l’ensemble de la société doit irréversiblement se diriger vers une véritable culture de droit, de la justice et de l'Etat de droit ».

Le système carcéral guinéen est très vieillissant. Le manque d’infrastructures a occasionné au fil des ans une surpopulation sans précédent dans les prions du pays. La Sûreté urbaine de Conakry, construite depuis les années  « 50 » pour une population carcérale d’environ deux cent personnes, accueille aujourd’hui plus de 1.400 prisonniers, souvent détenus dans des conditions dégradantes. Un héritage désastreux que dénonce Khalifa Gassama Diaby.

" Nous sommes héritiers d'un passif désastreux en matière de politique pénale et pénitentiaire depuis plus de cinquante ans, à cause des gouvernances passées. Nous sommes hélas en train de gérer plus de cinquante années d'inertie, de flou et d'illisibilité en matière de politique pénale en générale et de politique pénitentiaire en particulier », explique-t-il, ajoutant que la Guinée est coupable de son immobilisme et susceptibilité sur ces mêmes questions.

 Toutefois, fait remarquer Khalifa Gassama Diaby, des efforts louables se manifestent et des actes sont en train d'être posés depuis quelques temps, en termes de politique pénale cohérente et de politique pénitentiaire plus humanistes et plus efficaces. Mais, dit-il d'emblée, ces efforts sont lents et insuffisants.

« Il faut aller plus vite, plus fort et plus courageusement, dans la direction d'une politique judiciaire plus ferme dans la lutte contre l'impunité, mais aussi plus respectueuse des principes de l'Etat de droit, des droits de l'homme et de l'humanité », propose le ministre des Droits de l’Homme, selon qui, il n'y a pas de politique efficace sans une approche très démocratique de la justice et sans une vision pragmatique et humaniste de l’enfermement. 

 Les détenus, quoiqu'ils aient fait, restent des êtres humains, ils doivent être traités comme tels, réitère M. Diaby, soulignant que nier cela reviendrait à leur donner l'excuse d'inhumanité. 

Le ministre des Droits de l’Homme  et des Libertés Publiques rappelle cependant que son département avait déjà lancé l’alerte sur l’état de pourrissement généralisé dans les prisons guinéennes.

« Nous avons déjà établi à la suite de constats objectifs de terrain, l'état extrêmement préoccupant, au regard des valeurs de droits de l'homme, de nos prisons et des conditions de détention de ceux et celles qui s'y trouvent. Nous avons alerté sur la surpopulation carcérale qui est non seulement source de conditions déplorables de détention, mais aussi de violences intra et extra pénitentiaires. Nous avons déploré la culture de l'emprisonnement facile et inopportun, qui aggrave la question de la surpopulation carcérale et par conséquent des risques de violations des droits et de violences diverses. Nous avons dénoncé et alerté sur la situation des détenus abusifs, de la lenteur des procédures, des mineurs en prison, des malades et d'autres individus en situations d'extrême fragilité, sans oublier le mélange de détenus qui s'avère problématique », rappelle Khalifa Gassama  Diaby. 

Or, fait-il remarquer, le sens de la justice et de la prison est de permettre une punition avec pour horizon l'éducation et l'insertion sociale. En dehors de cela, alerte  le ministre, la prison apparaîtra comme l'expression d'une vengeance sociale inappropriée, qui au finale sera une réelle menace pour la société. « si rien n'est fait sur les prisons ce genre de phénomènes se multiplieront et les prisons deviendront les lieux de fabrication de l'injustice, de la violence et de l'insécurité pour l'ensemble de la société », prévient-il.

 

Diallo Boubacar 1

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 655 31 11 12

Créé le 12 novembre 2015 11:37

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