Suspension de la délivrance des titres fonciers : Quelles conséquences chez les architectes?

Boubacar Bah, président de l'ordre national des architectes de Guinée

CONAKRY-Dans sa volonté de récupérer les domaines publics de l’Etat, le Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD) a pris une batterie de décisions dont la suspension de l’émission des titres fonciers jusqu’à nouvel ordre.

Cette mesure entraine des conséquences négatives sur l’économie du pays. Elle plombe aujourd’hui hermétiquement le secteur de l’immobilier. Dans cet entretien, M. Boubacar Bah, architecte et président de l’ordre national des architectes de Guinée explique que le secteur de l’immobilier est durement frappé par cette décision de la junte. Il a répondu aux questions d’Africaguinee.com. Entretien.

AFRICAGUINEE.COM : A travers un communiqué publié le 31 janvier 2022, le CNRD a annoncé la suspension de la délivrance des titres fonciers. Comment réagissez-vous par rapport à cette décision en tant qu’architecte ?

BOUBACAR BAH : C’est une décision que j’ai apprise comme tout le monde. Donc, il va sans dire que nous les architectes et tous les acteurs du secteur de l’immobilier, nous sommes concernés par cette décision. Si on interdit l’émission des titres fonciers ou on suspend, ça impacte directement notre secteur.

Quelles peuvent être les conséquences ?

S’il n’y a pas de titre foncier, il n’y a pas d’investissement. Exemple : quand un investisseur vient, il a envie d’implanter une unité industrielle, dans ses démarches, il faut acquérir un domaine pour construire cette usine. Pour cela, c’est soit il achète un domaine, et là, -non seulement il faut le titre foncier-, ou bien, il veut négocier pour avoir un bail. C’est après ça qu’il va songer à dérouler son projet d’architecture, après avoir élaboré ce projet avec les ingénieurs qui sont aussi les architectes. Ensuite, il va falloir obtenir un permis de construire. Parce que s’il faut faire un investissement, il faut des garanties, mais il faut aussi un titre de propriété. Et ça, c’est soit le titre foncier ou le bail.

Ce sont les deux documents fondamentaux qu’il faut fournir pour se lancer dans la construction. Une fois le permis de construire obtenu, si c’est une entreprise, là aussi, ce sont des architectes, les superviseurs, les ouvriers qui conduisent les travaux. Il va falloir qu’il achète tout ce qui entre dans cette construction en termes de matériaux de construction. Donc, si aujourd’hui on ne peut pas obtenir des titres fonciers, il faut se dire que c’est tout ce secteur qui est bloqué.     

Pour un nouvel investisseur, il va sillonner un autre pays pour implanter son unité industrielle, parce qu’il ne peut attendre jusqu’à ce que la suspension soit levée, ou bien, il retourne d’où il est venu.  Et avec ça, les architectes qui auraient pu avoir du boulot ne travailleront pas, les ouvriers, les notaires, une société immobilière qui aurait pu vendre un domaine ne pourra pas le faire, et ceux qui revendent les matériaux de construction, c’est tout le monde qui sera bloqué. Et comme le dit l’adage : ‘’ dans un pays, dans une économie, si le bâtiment va bien, l’économie va très bien, et si le bâtiment ne va pas, l’économie sera bloquée.’’ C’est pour vous dire que les conséquences sont énormes si cette décision perdure dans le temps.

Est-ce qu’on vous a consulté avant la prise de cette décision ?

Non, nous n’avons pas été consultés. Si on nous avait consulté, peut-être on aurait pu donner notre point de vue, faire des propositions sans que cela impacte de trop les activités du secteur.

Quel message souhaiteriez-vous adresser au CNRD par rapport à cette décision ?

C’est une décision qu’ils ont prise, ils ont certainement leur raison. On parle de récupération des domaines de l’Etat, mais cela nécessite-t-il la suspension de l’émission des titres fonciers ?  Si c’est pour récupérer les domaines de l’Etat, ceux qui les occupent ont des titres fonciers, comment les ont-ils obtenus ? Parce qu’il y a des documents qu’il faut fournir au préalable pour obtenir le titre foncier.

Si ces documents ne sont pas authentiques, la personne ne peut pas avoir le titre foncier. Si c’est un bail, c’est pareil. Donc, ce que je peux dire, si la décision a été prise, certainement il y a des raisons. Mais en ce moment ce que je demanderais, c’est que tout soit mis en œuvre pour que cette suspension ne perdure pas. Si non, ça risque d’impacter beaucoup l’économie guinéenne.

Entretien réalisé par Siddy Koundara

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 655 311 114  

Créé le 22 février 2022 16:17

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