Rwanda : La justice française valide le « non-lieu » autour de l’attentat déclencheur du génocide de 1994

attentat

C’est la fin de plus de vingt ans d’instruction. La Cour de cassation française a validé, mardi 15 février, le non-lieu ordonné en 2018 dans l’enquête française sur l’attentat contre l’avion du président rwandais Juvénal Habyarimana, qui a déclenché le génocide de 1994 au Rwanda. La plus haute juridiction de l’ordre judiciaire français a, en effet, rejeté les pourvois déposés par les familles de victimes, mettant un point final à ce dossier ultra-sensible.

Le même jour, la juge d’instruction chargée de l’enquête pour « complicité de génocide et de crimes contre l’humanité » visant sa veuve, Agathe Kanziga, a annoncé aux parties la clôture des investigations, prélude à un possible non-lieu, aucune mise en examen n’ayant été prononcée pendant l’instruction.

Le 6 avril 1994, l’avion transportant le président Habyarimana, un Hutu, et le président burundais, Cyprien Ntaryamira, avait été abattu en phase d’atterrissage vers Kigali par au moins un missile. Cet événement a été le point de départ du génocide qui fit plus de 800 000 morts, selon l’ONU, principalement dans la minorité tutsie.

« Dossier d’une importance cruciale »

Les enquêteurs français, saisis en 1998 à la suite de la plainte des familles de l’équipage, de nationalité française, ont longtemps privilégié la responsabilité des rebelles tutsi menés par Paul Kagame. Puis ils se sont orientés pour un temps – sans davantage aboutir – vers l’implication d’extrémistes hutu, soucieux de se débarrasser d’un président trop modéré à leurs yeux.

Le 21 décembre 2018, les juges d’instruction avaient, finalement, décidé d’abandonner les poursuites contre neuf membres ou anciens membres de l’entourage du président rwandais actuel, Paul Kagame. « En l’absence d’éléments matériels indiscutables », l’accusation reposait sur des témoignages « largement contradictoires ou non vérifiables », avaient-ils estimé. Les magistrats avaient, par ailleurs, souligné le « climat délétère » de l’enquête, émaillée d’assassinats, de disparitions de témoins et de manipulations, et ordonné un non-lieu. Cette décision a été confirmée en juillet 2020 par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris.

L’arrêt de mardi n’est pas sans conséquences sur les relations entre Paris et Kigali. L’enquête a constitué une véritable épine dans le pied des relations franco-rwandaises pendant plus de vingt ans. Devant la Cour de cassation, les parties civiles ont notamment fait valoir que la chambre de l’instruction n’avait pas fait de distinction entre les personnes mises en examen, ni précisé les raisons pour lesquelles il n’existait pas de charges suffisantes envers chacune d’entre elles, selon une source proche du dossier. L’avocat général avait préconisé de rejeter le pourvoi.

« Sacrifié pour des raisons (…) diplomatiques »

Les avocats de la défense, Me Léon-Lef Forster et Me Bernard Maingain, ont salué dans un communiqué une « victoire judiciaire définitive des militaires rwandais injustement accusés par M. [Jean-Louis] Bruguière ». Le juge d’instruction parisien avait signé des mandats d’arrêt les visant et recommandé en 2006 des poursuites contre Paul Kagame devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda.

« Cette décision déçoit évidemment les parties civiles rwandaises, mais, en réalité, le mal est fait depuis longtemps », a réagi pour sa part Me Philippe Meilhac, l’avocat de Mme Habyarimana. « Elles ne sont toutefois pas résignées, car elles savent très bien que ce dossier a été sacrifié pour des raisons purement diplomatiques », a souligné Me Meilhac. « La procédure pourra probablement reprendre quand la situation politico-diplomatique évoluera. »

L’avocat s’est, en revanche, réjoui de la clôture des investigations annoncée par une juge d’instruction dans un autre dossier visant sa cliente, accusée depuis 2008 de complicité de génocide et de crimes contre l’humanité. Mme Habyarimana est présentée par ses accusateurs – ce qu’elle réfute – comme l’une des dirigeantes du premier cercle du pouvoir hutu qui aurait orchestré le génocide.

Les parties ont désormais trois mois pour faire des observations et des demandes d’actes avant les réquisitions du parquet, puis la décision finale des magistrats instructeurs. Mme Habyarimana ayant été placée en 2016 sous le statut intermédiaire de témoin assisté, les juges devraient logiquement ordonner un non-lieu à son égard. Aujourd’hui âgée de 79 ans, elle est installée en France depuis 1998 où elle vit sans statut légal, la France ayant refusé de lui accorder l’asile comme de l’extrader vers le Rwanda.

AFP

Créé le 16 février 2022 09:41

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