Récit affreux de Diariou Barry : « Comment j’ai été kidnappée… »

Fatoumata Diariou Barry

CONAKRY-Chirurgienne dentiste, Fatoumata Diariou Barry a vécu un des pires moments de sa vie. Cette jeune dame a été kidnappée dans la banlieue de Conakry par des hommes à bord d’un taxi. Elle a échappé de justesse à une mort affreuse que voulait perpétrer les « zombies » qui l’ont enlevé. Africaguinee© l’a rencontrée. Son témoignage est « affreux ».

AFRICAGUINEE.COM : Vous avez été victime d’un kidnapping le week-end dernier. Expliquez-nous comment cela s’est passé ?

FATOUMATA DIARIOU BARRY : Le vendredi dernier, alors que je quittais dans une clinique privée à Kobaya, j’ai emprunté un taxi-moto jusqu’au carrefour T5. Arrivée là-bas, j’ai signalé un taxi. Quand le chauffeur s’est garé, je lui ai demandé s’il partait vers Cosa. Il m’a répondu par l’affirmative. J’ai ouvert la portière pour m’embarquer. En entrant dans le véhicule, un jeune s’est levé pour me dire de rester au milieu et que lui, il descendait tout près. Il s’exprimait en soussou. Dès qu’il est monté, il a refermé la portière.

Arrivée au niveau du carrefour Cité Enco5, au lieu de prendre la route qui continue vers Cosa, ils ont contourné pour revenir vers Sonfonia. Je leur ai fait savoir que je partais vers Cosa, ils m’ont répondu en disant qu’ils ont changé de destination et que désormais ils partaient vers Sonfonia. Je dis dans ce cas de garer, je vais descendre et emprunter un autre véhicule. Ils m’ont dit d’attendre qu’ils vont chercher à bien garer. J’ai constaté qu’il y avait de l’espace pour bien stationner mais ils refusaient de stationner. Dès que j’ai commencé à insister, directement le jeune qui était à ma droite a fait sortir un mouchoir et a mis sur mon nez. A partir de là je me suis endormie. Le temps pour moi de me réveiller on était dans une maison close où il y avait des organes humains découpés. Il y avait un jeune suspendu, la tête entièrement sectionnée, il y avait un seau en bas et son sang était en train de couler là-dans.

Ils m’ont déshabillée, l’un a attrapé mes mains, l’autre les pieds et la troisième personne est venue pour soulever mon menton pour bien présenter la gorge. Leur féticheur est venu, il était habillé en rouge, il y avait des gris-gris, des miroirs sur lui. Il détenait un bâton. Il a plongé sa main dans le seau où il y avait le sang du jeune qui coulait. Il a retiré la main, il s’est essuyé son visage avec le sang humain qui coulait, il a récité quelques incantations, après il a pris un miroir qu’il a orienté vers mon visage, il l’a enlevé et a regardé ; il a dit aux jeunes : laissez cette dame, elle a trois filles et elle est enceinte. Si on lui fait quelque chose, le médicament de protection que nous avons avec nous ne va plus fonctionner’’. C’est ainsi que les jeunes m’ont laissée.

Après, un autre jeune a dit : ‘’Notre effort ne sera pas vain. Dans ce cas on va la violer’’. Le féticheur a insisté en leur disant, ‘’si vous lui faites quelque chose, notre médicament de protection ne va plus fonctionner. Laissez la dame là tranquille et allez chercher une autre personne.’’ C’est là qu’ils ont pris mon téléphone, ils m’ont intimé de le déverrouiller, je me suis exécutée. Ils ont changé mon profil Facebook, la couverture WhatsApp. C’est ce qui d’ailleurs a alerté ma famille qui a compris qu’il y avait quelque chose n’allait pas. Ils ont commencé à se poser de question parce que ceux qui me connaissent, savent que ces images ne pouvaient pas venir de moi. Ils m’ont remis mes habits, je me suis rhabillée, ils m’ont bandé les yeux à l’aide d’un mouchoir noir, ils m’ont fait monter dans une voiture, on a roulé pendant un bout de temps à vive allure. Arrivée à un certain niveau, l’un d’eux qui était assis à côté de moi m’a tapé au niveau ventre, côté droit. Je me tordais de douleur, et c’est là où il a ouvert la portière, ils m’ont bousculée et je suis tombée, c’était une pente, et je me suis retrouvée en bas. 

Je suis restée là-bas un bon moment, après j’ai vu un jeune venir, j’ai voulu l’interpeller, mais j’avais encore peur. Finalement je l’ai laissé passer. Quelques temps après, j’ai vu un couple qui venait, au moment je les interpellais, il y a une voiture qui venait vers nous, les phares se sont fixés vers moi. La femme a dit : « on dirait que j’ai vu une femme ici ». Après ils sont venus vers moi, ils ont garé et m’ont donné de l’eau à boire. Ils m’ont demandé ce qui se venait de m’arriver ? J’étais encore sous le choc, je ne pouvais pas bien leur expliquer. J’ai réussi tout de même à leur faire savoir que j’ai été kidnappée. Ils m’ont dit de les suivre et qu’ils vont m’amener chez eux, me donner à manger et appeler mes parents.

Je leur ai dit non, de m’envoyer directement à la police ou à la gendarmerie. Ils ont appelé un monsieur là-bas qui m’a conduit à la gendarmerie. A la gendarmerie, on a trouvé un agent, du nom de Barry, j’ignore son grade, mais qui s’est bien occupé de moi. Après il a appelé mes parents qui sont venus me chercher. Lorsque mes parents sont venus, on a fait une déposition là-bas, on est reparti à l’hôpital pour voir mon état suite au choc que je venais de subir. Par la grâce de Dieu, il y a eu plus de peur que de mal.

Lorsque le féticheur a dit à ses éléments que vous êtes mère de trois filles et que vous êtes enceinte. Est-ce qu’il disait vrai ?

Oui, c’est effectivement ça.

Tout cela s’est passé à l’espace de combien de semaines, jours ou heures ?

Pas de jours mais d’heures. C’était le (vendredi 11 février 2022 ndrl), quand j’ai quitté la clinique de Kobaya aux bandes 16 h 30. Parce qu’après avoir fini la prière de 16h 30, j’ai quitté le lieu, je suis sortie dans le but de revenir chez moi. C’est jusque-là je me souviens de l’heure. Mais quand nous sommes venus à la brigade, au niveau de Kilomètre 5 en face de la station, j’ai demandé à l’agent (Barry) quelle heure faisait-il ? Il m’avait répondu, que c’était 21h 20 ou 35 minutes comme ça.

Vos ravisseurs s’exprimaient dans quelle langue ?   

Au début du kidnapping c’était en Soussou, mais ils s’exprimaient en deux langues, le Konianké et le soussou.

A l’endroit où ils vous ont amenées, (Cour fermée), est-ce que c’était toujours dans les mêmes dialectes ?

Oui, ils parlaient toujours en Konianké et soussou. Mais ils parlaient beaucoup en soussou. Parce que c’est le soussou que je comprends et le konianké.

Est-ce qu’il y a des zones que vous vous souvenez ?

Je ne peux pas reconnaitre le lieu parce qu’en quittant là-bas aussi, ils m’avaient bandé les yeux à l’aide d’un mouchoir noir. C’est à Kilomètre 5 qu’ils m’ont jetée, c’est le seul lieu dont je me souviens.

Comment vous vous sentez ?

Physiquement, je vais mieux. Moralement, avec l’aide des parents, de mon époux, de la famille, ça commence à aller. Je suis en train de suivre un traitement avec un psychiatre, et Dieu merci ça commence à aller.

Avez-vous un appel à lancer ?

Aux citoyens, je les conseille d’être très prudents parce que personne n’est à l’abris. La voiture dans laquelle je me suis embarquée, c’était un taxi ordinaire, c’est en tout cas la couleur jaune que présentait le véhicule. Tout le monde n’a pas les moyens d’avoir un véhicule personnel, il faut emprunter les moyens de transport en commun. Il faut être très vigilants.

Aux autorités, je leur demande de mettre tout en œuvre pour renforcer la sécurité des citoyens guinéens. Nous sommes tous guinéens, il faut qu’on se sente en sécurité dans notre pays. 

 

Interview réalisée par Siddy Koundara Diallo

Pour Africaguinee.com

Tél. : (000224) 655 311 114

Créé le 15 février 2022 15:16

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