Quels sont les dessous de la libération de Foniké et Cie ? Charles Wright fait le grand déballage…

CONAKRY-La libération conditionnelle le 10 mai dernier de Foniké Mangué, Ibrahima Diallo et Mamadou Billo BAH, trois cadres du FNDC est l’aboutissement d’un long feuilleton judiciaire. Ce dossier devenu une affaire d’Etat a déchainé les passions sur fond de controverses.


Quels sont les dessous de cette libération ? Le ministre de la Justice, Garde des Sceaux et des Droits de l’Homme est sorti de sa réserve. Charles Alphonse Wright a fait le grand déballage sur les sur les péripéties de cette affaire qui a fait la Une des médias ces derniers temps. Au centre des critiques, le garde des Sceaux a répondu à ses détracteurs. Explications.

« Les manifestations qui se passent aujourd’hui, personne n’est en sécurité. Vous dites que les manifestations sont pacifiques alors pourquoi vous ne passez pas par là-bas ? Soyons cohérents entre nous. Pour avoir plus de nombre de vues il faut aller filmer la violence. Ils s’attaquent à tout le monde. 

Les enfants qu’ils utilisent à ces fins-là eux aussi méritent protection. Les auteurs de ces marches non autorisées ont leur part de responsabilité. Quand on poursuit les Foniké Mengué pour ça, on dit harcèlement judiciaire. Ils ont été interpellés, on te poursuit pour appel à manifestations non autorisées, n’ont-ils pas appelé à manifester ? Nous étions tous là.

Quand ils l’ont fait, des poursuites judiciaires ont été engagées. Qu’est-ce qui s’est passé par la suite ? Les faits qu’on leur reprochait, c’était (incendie volontaire, organisation de manifestations non autorisées, etc). Mais puisque l’incendie est un fait criminel, et la Loi dit quand il y a un fait criminel, la personne ne peut pas être jugée immédiatement, ce n’est pas une comparution immédiate, il faut saisir un juge d’instruction. C’est notre loi qui le dit. 

Alors, un juge d’instruction a été saisi. Quel est le temps pour qu’un juge termine sa procédure ? Si c’est un fait correctionnel c’est 4 mois × 2. Si c’est un fait criminel c’est 6 mois renouvelable une seule fois. Ça fait 12. Si c’est l’affaire de terrorisme c’est doublé ça peut aller jusqu’à 24. 

Les Foniké Mengué ont été placés sous mandat de dépôt sous la base de placement en détention. Une décision sur la base de laquelle la personne est détenue, on ne qualifie cette détention d’illégale et d’arbitraire parce que c’est une décision de justice. Si on n’est pas d’accord avec elle, on relève appel et on part discuter ailleurs. 

Ils sont là. Le juge d’instruction a estimé certes il y a l’incendie quand ils ont fait appel mais ne pensons pas que ce sont eux qui ont mis le feu. Ça on écarte. C’est pourquoi on dit  » Non-lieu partiel« . Mais le procureur dit Non :  » Moi suis convaincu même pour l’incendie ils ont participé. Je relève appel« . C’est son droit. Mais est-ce que son droit là veut dire harcèlement judiciaire ?

Ils viennent devant la Cour d’appel. C’est là d’une part je leur donne raison quand-même. Je ne suis pas ce ministre laxiste, je ne ferme jamais l’œil sur l’abeille. Ma position est toute tranchée. Ils sont venus à la Cour d’appel. La première chambre a été saisie. La chambre de contrôle de l’instruction rend sa décision pour dire que je les renvoie devant les tribunaux. Le parquet général dit qu’il n’est pas d’accord. Celui-ci dit qu’ils sont coupables. Il a fait sa lettre de pourvoi et la dépose au greffe de la Cour d’appel. Il prend cette lettre de pourvoi et l’envoie à son ami greffier qui est au niveau de la première chambre de l’instruction qui a rendu la décision. Ils ont retourné le dossier à son niveau mais il n’a pas prêté attention si cette lettre de pourvoi était dedans. Il a pris le dossier avec toutes les lettres de transmission et a envoyé à la Cour Suprême. La loi sur la Cour Suprême dit que cette juridiction a deux mois pour statuer à partir de l’arrivée. Les parties vont déposer leur mémoire (…). 

La bourde administrative 

J’étais là dans mon bureau, j’ai vu le collectif des avocats dans une déclaration dire  » Nos clients, leur dossier a quitté la Cour Suprême pour Dixinn’’. C’est ainsi que j’ai immédiatement instruit à monsieur l’inspecteur des services judiciaires d’aller voir qu’est-ce qui se passe. 

Yamoussa Conté, Procureur général près la Cour d’Appel de Conakry

 » En exécution à votre instruction, l’inspection s’est intéressée à la lettre d’appel. Nous avons compris qu’il y a eu appel et que la lettre a été transmise à la Cour d’appel’’. C’est là qu’il a reconnu par mégarde, qu’il a envoyé la lettre à la Cour Suprême sans mettre la lettre de pourvoi dans le dossier. Je me suis aussi intéressé au chef de greffe de la Cour Suprême qui avait également constaté mais qui n’a pas réagi face à l’absence de lettre de pourvoi. Il a mis le dossier de côté et c’est les multiples erreurs se sont succédé. 

A la suite de cette inspection, un rapport a été envoyé au garde des sceaux. Ma réaction a été de dire que le chef de greffe doit être suspendu. J’ai aussi dit que même si la Cour Suprême a deux mois pour statuer si cette lettre était arrivée, peut être que la Cour aurait un, deux ou trois jours. J’ai dit que ça c’est constitutif de violation de leurs droits. J’ai dit que ce n’est pas normal et il faut que ça soit réparé. J’ai demandé que cette erreur administrative soit consommée et que le dossier soit immédiatement envoyé à la Cour Suprême. C’est parce que la forme par laquelle le parquet a utilisé pour son pourvoi n’était pas normal, c’est pourquoi la Cour Suprême l’a rejeté. 

Pendant ce temps, j’étais à l’étranger. Après on a parlé de cadre de dialogue. Les uns et les autres ont fait savoir pendant un premier temps que c’est Charles Wright qui bloque. C’est lui qui ne veut pas la paix en Guinée. C’est lui qui ne veut pas écouter les religieux. 

L’imam m’a appelé. Il m’a dit,  » toi tu es devenu musulman depuis 2003 mais c’est toi qui n’écoutes pas les religieux ? » Je lui ai demandé qu’est-ce qu’on lui a dit ? Je lui ai demandé d’attendre mon retour au pays.

Je rentre au pays on me dit qu’on m’a donné un ultimatum de libérer Foniké Mengué sinon (…). Les gens ont parlé de beaucoup de choses. J’ai trop entendu. Au nom de la liberté d’expression on porte atteinte aux gens. Vous prenez vos responsabilités on dit que vous êtes contre la liberté d’expression. 

Je suis allé avec monsieur le premier ministre, devant les religieux, nous sommes rentrés, tout le monde me regardait. Je les ai écoutés religieusement. Ils m’ont dit Charles,  » laisse ton problème de loi là à côté « . J’entends les gens dire que la justice est déboussolée, ils racontent du n’importe quoi. C’est décevant.

La justice a un triple visage chez moi. Ça fait partie de ma vision. Une justice impartiale, indépendante et à visage humain. Les religieux m’ont dit :  » ce que vous allez faire monsieur Charles, le premier ministre est là. Et tout le monde dit que le problème chez vous. » Je me suis quand-même sacrifié pour ce pays. Mais il y a ce qu’on appelle l’ingratitude de fonction et autre…

Religieux et chef du gouvernement

« Donc nous religieux vous demandons, le problème de loi là, on vous exhorte, pour l’amour du ciel, pour ne pas que la Guinée brûle, que les gens meurent, accepte de tordre la main à la Loi. On dira que vous avez eu peur mais vous avez respecté les religieux. « 

J’étais là assis, je leur ai dit que j’ai bien entendu et que je ne peux rien leur refuser. Au nom de la paix puisque la finalité de la loi, c’est la paix et la quiétude, l’harmonie dans la société, si vous estimez que c’est ça la paix, je prendrai la responsabilité sur moi. C’est ainsi qu’ils m’ont dit qu’ils souhaiteraient voir les Foniké Mengué, je leur ai dit me suivre, que je vais les accompagner. 

On vient au niveau de la maison centrale, j’ai dit aux religieux c’est là la limite. J’ai demandé aux avocats généraux de faciliter la rencontre. Et que la suite qu’on me fasse le rapport sur la rencontre. Le soir du lendemain, j’entends Me Béavogui dire que les Foniké Mengué rejettent l’offre du gouvernement. Mais c’est que l’avocat dit ce n’était pas ça. J’ai deux rôles, c’est lui de la justice et des Droits de l’Homme. Alors, la demande là c’est en tant que Droits de l’Homme. 

Les religieux ont dit à Foniké Mengué :  » Nous sommes en train de faire des démarches auprès du gouvernement, on ne dit pas que votre procès n’aura pas lieu, ce n’est pas ça notre souci. Mais pour la raison d’apaisement du climat social, que le gouvernement souhaite on a eu un entretien avec le ministre, on lui a dit de laisser la loi à côté, au cas où il le fera, quel est votre point de vue ?

Oumar Sylla Foniké Mengué
Oumar Sylla, Foniké Mengue

Foniké Mengué a répondu : acceptez que nous puissions prendre contact avec nos avocats. On repassera par le directeur de l’administration pénitentiaire et on repassera à qui de droit. C’est tout ce qui s’est passé. Beaucoup choses ont été dites par la suite, j’ai demandé aux gens de rester tranquille et de se concentrer sur l’essentiel. Finalement, le mercredi soir Me Béavogui est venu me voir au bureau pour une autre procédure qui n’avait rien à voir avec celle des Foniké Mengué. 

C’est en quittant j’ai profité. Après il m’a dit que la Cour suprême a rejeté le pourvoi du parquet général. C’est lui qui m’a l’a informé. Pour me rassurer, j’ai appelé le président de la Cour Suprême qui me l’a confirmé. Je n’ai pas cherché à savoir la cause. Après il m’a dit que le dossier l’a beaucoup fatigué et qu’il est au bout. Je lui ai dit que le seul tort que je regrette dans le dossier de ses clients, c’est l’erreur commise par le greffe. Et pour réparer cette erreur, s’il faut lui remettre son client, je suis prêt à le faire peu importe ce que les gens diront. Quand lui-même a vu ma bonne foi, il a quitté mon bureau.

C’est ainsi que j’ai appelé les religieux de venir. Ils sont venus. Ils m’ont dit que le pourvoi a été rejeté à la Cour Suprême. Et comme ils me l’ont dit, que toutes ces lois sont faites pour la paix en Guinée, ils m’ont demandé à nouveau de laisser l’affaire de Loi. Je leur ai répondu que je ne peux pas décider. Mais ce que je peux faire, c’est de faire en sorte que leur dossier soit programmé et qu’ils soient jugés. 

Ils m’ont rétorqué en disant :  » si vous faites ça aujourd’hui, on aura la plus grande honte. J’ai dit alors si pour leur honte je n’accepterai pas qu’ils soient honnis. Parce que quand je vais mourir, c’est devant les imams ou prêtres qu’on va me mettre. C’est ainsi que j’ai appelé le procureur général. J’ai dit que comme le pourvoi a été rejeté, les religieux sont venus me voir, il faut donc les écouter et prendre ses responsabilités. Je ne veux pas avoir la honte de ces gens-là. Il (procureur général) a signé l’ordre de mise en liberté. Il a dit qu’on ne peut pas honnir les religieux. 

Alors, quand l’ordre de mise en liberté a été signée, ça été la décision la plus difficile depuis que je suis né. Ça été la décision la plus difficile dans ma vie. Mais au nom de la paix, la quiétude ça été la plus bonne décision que je n’ai jamais prise dans ma vie. Quand l’ordre de mise en liberté a été signé, j’ai dit au régisseur, pour ne pas qu’ils subissent d’autres préjudices, de les laisser rentrer. 

Charles Alphonse Wright

C’est dans mon bureau que les religieux ont appelé maître Béavogui pour qu’ils se rencontrent à la maison centrale. Mais puisque certains voulaient en faire de la publicité alors que moi j’ai abordé les débats sur des questions d’apaisement, d’inquiétude etc. C’est une décision que je ne regretterai jamais. 

Arrivée à la maison centrale, on dit à Foniké Mengué et Cie, voici l’ordre de mise en liberté. Ils ont commencé à dire qu’ils vont se concerter. Ils ont commencé à dire qu’ils ne vont pas sortir. C’est ainsi que monsieur Gando a appelé le procureur général. Ce dernier a dit à Foniké Mengué, vous êtes enfermés là-bas, maître Béavogui se promène tranquillement ici.

Maitre Salifou Béavogui
Maitre Salifou Béavogui

Le ministre dit qu’il ne veut pas faire honnir les religieux. J’ai fait ça pour vous et vous dites que vous ne sortez pas ? Il a dit au régisseur, ramène-moi mon ordre de mise en liberté. Par après les Foniké ont commencé à dire : Non, attends d’abord on se consulte. Trois minutes après ils décident de sortir. On commence à faire des écrits pour dire que la boussole s’est déboussolée. Mais la boussole s’est aussi le visage humain« , a expliqué Alphonse Charles Wright, en marge d’une conférence de presse qu’il a animé ce mercredi 17 mai 2023.

Siddy Koundara Diallo 

Pour Africaguinee.com 

Tel: (00224) 664 72 76 28

Créé le 18 mai 2023 09:11

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