Massacre du 28 septembre : Pourquoi le procès ne peut pas s’ouvrir en mars 2022?

Moussa Dadis Camara et Aboubacar Sidiki Diakité alias Toumba, inculpés dans le dossier du massacre du 28 septembre 2009

CONAKRY-Il y a plus de 12 ans plus de 150 guinéens étaient tués, plus de 100 femmes violées, des milliers d’autres personnes blessées et des portés disparus, au stade 28 septembre, selon une enquête indépendante menées par des experts des Nations-Unies, suite aux exactions commises par des militaires à Conakry.


L’instruction du dossier qualifié de crime contre l’humanité a duré des années, mais elle a abouti à l’inculpation d’une dizaine de personnes dont l’ancien chef de la junte de l’époque, Moussa Dadis Camara, lequel a appelé à la tenue rapide du procès.

Le procès tarde à s’ouvrir alors que l’instruction a été close depuis 2017 et les inculpés ont été renvoyés devant le tribunal criminel de Dixinn pour jugement. Face aux atermoiements des autorités de Conakry de vider ce dossier, une nouvelle mission de la Cour Pénale Internationale conduite le chef de la coopération internationale du bureau du procureur, a séjourné à Conakry fin novembre 2021.  Les émissaires du Procureur de la CPI Karim Kahn ont tapé du poing sur la table, donnant un ultimatum de trois mois au Gouvernement guinéen, sans quoi la CPI va reprendre le dossier.

« La Guinée est une priorité pour le procureur Karim Kahn, il veut véritablement la mise en œuvre d'une complémentarité effective. Espérant que la Guinée va montrer à la face du monde, à l'Afrique, qu'elle est capable elle-même de juger ce dossier. Mais ce que Karim lui-même dit aussi est très clair :  ils (les autorités guinéennes, ndlr) le font ou je le fais. Et donc, le moment est venu pour la Guinée (d’agir) ”, avait averti en novembre Amady Bâ.

C’est dans ce contexte que les autorités guinéennes ont tenu une promesse d’ouvrir le procès du massacre du 28 septembre dans un “bref délai”, au plus tard fin mars 2022. L’ex garde des Sceaux Yarie Soumah qui avait reçu les émissaires de la CPI avait assuré de la levée de tous les obstacles opérationnels pour que le procès se tienne dans les trois mois au maximum à venir. « Ce sont des déclarations d’intention, on veut voir des actes », doute un défenseur des droits humains.

Qu’en est-il des préparatifs du procès ?

Depuis le départ de la délégation de la CPI, peu de choses ont évolué sur le terrain. Or, l’organisation d’un tel procès nécessite une logistique considérable et énormément de moyens. Beaucoup de questions se posent, allant de la finalisation du bâtiment devant abriter l’audience. Le chantier du futur Tribunal criminel spécial du 28 septembre 2009, logé dans l'enceinte de la Cour d'Appel de Conakry, est loin d’être achevé. Il n’y a pas que ça. Il y a une question liée à la sécurité des témoins. Plus de 400 victimes ont été entendues dans ce dossier. Certaines victimes sont d’ailleurs exilées à l’étranger.

Au-delà de ces obstacles, il y en a d’autres sur le plan juridique qui sont « incompressibles », apprend-on en matière de procédure de jugement des crimes. L’article 378 du Code de procédure pénale dispose que le tribunal de première instance est compétent pour connaitre des crimes, des délits et des contraventions.

« Le délai entre le jour où la citation est délivrée et le jour fixé pour la comparution devant le tribunal correctionnel ou de simple police [cette disposition s’applique aussi en matière criminelle] est d’au moins : 5 jours si la partie citée réside au siège du tribunal ; 8 jours si elle réside dans le ressort du tribunal ; 10 jours si elle réside dans un ressort limitrophe ; 20 jours si elle réside dans un autre ressort du territoire de la République de Guinée ; 3 mois dans tous les autres cas », précise l’article 658 du Code de procédure pénale.

A date, selon nos informations, aucune des parties au procès n’a reçu une citation l’informant de l’ouverture du procès. Ce qui revient à dire que le procès du 28 septembre 2009 ne peut pas s'ouvrir en mars 2022 contrairement à l'annonce du gouvernement guinéen. Au moins que l’on ne torde le cou à cette disposition de la Loi.

Les chances sont minces bien que la volonté politique existe. C’est du moins l’avis de Aliou Barry directeur du Centre d’analyse et d’études stratégiques (CAES). « Je reste sur mes réserves parce que ce n’est pas un procès facile à organiser en terme de matériels. Si vous vous souvenez, le procès Hissen Habré à Dakar, il a fallu que le Sénégal obtienne un accompagnement de la communauté internationale à travers une cour africaine. Est-ce que les magistrats guinéens sont outillés pour mener ce procès ou bien il faudra faire en sorte qu’il y ait une cour pénale spéciale ? 

Moi, je pencherai plutôt à une association hybride des magistrats africains et guinéens qu'uniquement guinéens. Ce n’est pas que je doute des magistrats guinéens, mais on est dans un contexte où les plaignants et les accusés sont sur place. Est-ce que quelque chose est prévu pour protéger ceux qui vont venir témoigner contre ceux qui sont cités ? C’est pour tous ces facteurs là qu’il faudra que les autorités soient très regardant parce qu’on sait que c’est un procès qui va prendre du temps », analyse cet observateur de la situation sociopolitique guinéenne.

Dossier à suivre…

Abdoul Malick Diallo

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 669 91 93 06

Créé le 6 janvier 2022 14:57

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