Mamoud Condé dévoile les ambitions du MRDG : « Nous voulons participer activement au développement de la Guinée… »

Mamoud Condé est un guinéen de la diaspora, installé aux États Unis d’Amérique. Fondateur du Mouvement de la Renaissance Démocratique de Guinée (MRDG), il est aussi le Secrétaire Fédérale de l’UDRG dans le pays de l’Oncle Sam. Dans un entretien accordé à Africaguinee.com, M. Condé a dévoilé les ambitions de son Mouvement tout en livrant sa lecture sur l’actualité sociopolitique de la Guinée. Il a notamment donné sa position sur le bilan de l’an 1 de l’actuel Premier ministre à la Primature, mais aussi sur le débat concernant la candidature du Général Mamadi Doumbouya. Excellente lecture !
AFRICAGUINEE.COM : Bonjour Mr. Condé et merci d’avoir accepté de vous prêter à nos questions. Premièrement, qu’est-ce que le MRDG et quel est son but ?
MAMOUD CONDÉ : Le Mouvement de la Renaissance Démocratique de Guinée (MRDG) ambitionne d’être un think tank, c’est à dire un groupe de réflexion composé d’experts, de chercheurs et de professionnels dans divers domaines. Son objectif est d’analyser les problématiques stratégiques et d’émettre des recommandations pour influencer les décisions publiques et privées. Notre objectif ne se limite pas à émettre des recommandations ; nous voulons participer activement au développement socioéconomique et politique de la Guinée en initiant des programmes de développement économique, des formations et assistance techniques à travers le transfert de connaissance, et prendre une participation effective dans la vie politique de notre pays afin d’impulser un changement de paradigme. Ce mouvement a été créé en Octobre 2019 et nous sommes présent sur les plateformes Facebook et WhatsApp.
Quels sont vos impressions par rapport au bilan de la première année de gestion du Premier Ministre Bah Oury ?
Je tiens d’abord à rappeler que Mr Bah Oury a pris fonction dans un climat sociale tendu et un environnement économique mondial perturbé par la guerre en Ukraine. Dès son entrée en fonction, il a été confronté à des défis majeurs, notamment une grève générale illimitée des treize centrales syndicales du pays, réclamant la baisse des prix des denrées de première nécessité, la fin de la censure médiatique et l’amélioration des conditions de vie des fonctionnaires.
Par ailleurs, le pays était déjà confronté à des coupures d’électricité, ce qui a provoqué des tensions sociales, notamment à Kindia, où des manifestations ont causé des pertes en vies humaines. Ensuite il y’a eu l’explosion du dépôt de carburant de Coronthie qui a causé d’importants dégâts matériels et de perte en vies humaines. Cette tragédie est venue exacerber la frustration des populations qui étaient déjà asphyxiées par le manque de courant et la paralysie des activités économiques.
Nous avons également assisté à une série d’incendies dans le pays qui s’apparenterait à des actes de sabotage destinés à compromettre la quiétude des citoyens et le bon fonctionnement des activités économiques. Entre le mois de Juillet et de Décembre 2024, nous avons assisté à une série d’enlèvements à Conakry d’activistes politiques et de journalistes par des individus non identifiés en uniforme militaire, entraînant des manifestations nationales et internationales. Enfin, comme un couronnement il y’a eu le malheureux incident du stade de N’Nzérékoré qui a causé également plusieurs pertes en vies humaines. Une manifestation festive pour célébrer le vivre ensemble qui s’est transformé en deuil national. La liste des défis n’est pas exhaustive, mais je voudrais me limiter à ceux-là pour une question de temps puisque nous savons tous la chronologie et l’intensité de ces évènements catalyseurs qui ont marqué la première année d’exercice du Premier Ministre Bah Oury.
Face à cette avalanche de crises, le Premier Ministre Bah Oury a fait preuve de résilience et de gestion efficace. Il a su apporter des réponses appropriées aux urgences tout en gardant une vision claire pour le développement à long terme du pays. Cette première étape de sa gouvernance a permis de tester sa capacité à absorber et à répondre efficacement aux défis majeurs qui peuvent intervenir simultanément et qui nécessitent des réponses appropriées avec une certaine lucidité.
Mr. Conde quels sont les indicateurs qui justifient que la gouvernance du Premier Ministre Bah Oury a été un succès ?
Le succès se mesure à la lumière de la responsabilité assignée et des objectifs fixés. Le Premier Ministre est chargé de l’exécution du programme gouvernemental conformément à sa lettre de mission sous l’autorité du Président de la République. Partant de cette prémisse, nous pouvons constater des avancées significatives sur les plans social, économique et politique lors de cette dernière année.
D’abord il faut souligner que Bah Oury a redoré le blason de la primature en suscitant le respect et l’admiration de la communauté nationale et internationale pour son charisme, son intellect, son éloquence, et son engagement politique.
Sur le Plan Politique, Bah Oury toujours fidèle à son idéal de la défense des intérêts du peuple, la promotion du vivre ensemble et de la cohésion sociale a dès son entrée en fonction instauré un cadre permanent de dialogue inclusif sous l’impulsion du chef de l’état le Général Mamadi Doumbouya. Malgré la bonne foi et la main tendu du gouvernement, force est de constater qu’il existe encore des velléités de sabotage de ce processus par des individus qui apparemment se plaisent dans le statut quo.
Le Premier Ministre pour sa part estime que le dialogue n’est pas uniquement politique, il ne doit pas être l’apanage que des élites, mais il est aussi citoyen dans la mesure où il doit engager les autorités exécutives du pays avec les populations à la base pour mieux comprendre leurs préoccupations. Le succès de la récente immersion gouvernementale témoigne de cette politique de dialogue de proximité qui permet d’évaluer les acquis mais aussi d’identifier les défis et l’approbation du peuple par rapport à ce qui est en train d’être fait sur le terrain.
En ce qui concerne le retour à l’ordre constitutionnel et la tenue d’élections libres et transparentes, le Premier Ministre a rassuré que toutes les élections auront lieu dans l’année courante 2025, mais il a expliqué qu’il ne souhaiterait pas commettre les mêmes erreurs du passé en se précipitant a des élections mal organisées avec un fichier électoral corrompu. Il souhaiterait que le fichier électoral cette fois-ci, soit assujetti au PN- RAVEC de telle sorte que la carte d’électeur puisse être en relation avec la carte nationale d’identité et les autres documents administratifs. Cette initiative répond effectivement à un déficit de fiabilité et de corruption du fichier électoral actuel qui n’a par ailleurs jamais fait de consensus. Il faut saisir cette occasion pour construire une base de données fiable, sécurisée et permanente qui servira de socle de l’identification des citoyens comme cela se fait dans les autres pays. La digitalisation de l’administration qui est en cours vient renforcer cette innovation pour plus de sécurité et d’efficacité.
Des initiatives administratives ont été engagées pour assainir l’espace politique et réduire le nombre pléthorique de formation politiques. Cet exercice républicain va désormais contraindre ces formations politiques à se conformer aux dispositions règlementaires, ce qui permettra l’émergence d’acteurs légaux, structurés et légitimes.
Enfin, le Premier Ministre se réjouit de constater qu’une nouvelle forme de courtoisie républicaine est née, et que les acteurs politiques peuvent désormais s’asseoir autour d’une même table pour échanger sur les questions d’avenir de notre pays. Le dialogue reste ouvert et permanent pour tous ceux qui désirent contribuer à l’avancement des choses, mais nul n’est indispensable.
Sur le Plan Social : Le Premier Ministre dans sa quête de promotion d’une nouvelle forme de solidarité sociale qui met l’accent sur l’humain a impulsé les actions d’indemnisation des victimes de l’explosion du dépôt d’hydrocarbures de Coronthie, et celles du déguerpissement de Kaporo Rails. Aujourd’hui, pour la première fois en Guinée, les fonctionnaires de l’Etat et les retraités bénéficient d’une couverture médicale de 80%. Plusieurs autres actions de solidarités ont été enregistrées, notamment la prise en charge médicale et l’évacuation sanitaire de plusieurs personnes en situation d’urgence.
Des efforts considérables ont été faits pour stimuler la création d’emploi et régulariser le statut des contractuels et stagiaires de l’Etat. A cet effet, 10.000 enseignants contractuels et récemment 57 stagiaires ont été intégrés à la fonction publique. Cela dénote d’une volonté affirmée de l’administration de corriger certaines injustices faites dans le passé, mais surtout de stimuler le développement du potentiel humain.
La desserve en électricité dans les ménages a été significativement amélioré grâce à l’interconnexion énergétique de l’OMVG permettant le transfert de 120 mégawatts depuis le Sénégal vers la Société Électricité de Guinée (EDG). Cette solution ponctuelle et efficiente permet désormais d’alimenter tous les sites stratégiques démontrant ainsi la capacité du gouvernement à anticiper les solutions adéquates pour le bien-être des populations en détresse et permettre la continuité des activités économiques.
Aux lendemains des enlèvements et disparitions de certains activistes et journalistes, force est de constater que la question sécuritaire et du respect des droits de l’homme demeurent encore un domaine dans lequel des efforts doivent être consentis. Le Premier Ministre a reconnu que des lacunes persistent à ce niveau et soutien que toutes les actions de l’État doivent être encadrées par l’ordre judiciaire afin de préserver l’image et la crédibilité des Institutions. Pour le Premier Ministre, l’Etat ne détient pas le monopole de la violence. Il est inimaginable que l’Etat puisse s’adonner à de telles pratiques alors qu’il est engagé dans une dynamique de bonne gouvernance pour garantir des accords de coopération avec les partenaires financiers internationaux.
Sur le Plan Économique, face à la hausse des prix des denrées de première nécessité et de l’énergie liée à la guerre en Ukraine, la Guinée a maintenu une croissance du PIB grâce à des réformes structurantes visant à améliorer le climat des affaires, l’encadrement de l’exploitation minière artisanal, et l’attraction d’investissements étrangers. Le Gouvernement a consenti des efforts dans le domaine de la promotion agricole pour encourager l’autosuffisance alimentaire et diminuer la dépendance de l’importation du riz. Des projets majeurs, tels que le programme « Simandou 2040 », ont été lancés pour renforcer les infrastructures et stimuler la croissance à long terme.
Le Gouvernement a aussi entrepris des efforts de modernisation à travers des réformes en faveur de l’économie numérique, l’optimisation des dépenses publiques, la lutte contre la corruption, et une rationalisation des ressources de l’état. En somme, la Guinée a réalisé des avancées économiques significatives en 2024, mais elle doit continuer à relever des défis pour assurer une croissance inclusive et durable.
Que pensez-vous de ceux qui disent que le pouvoir est responsable de la disparition Fonike Mangue, Billo Bah et autres ?
D’abord je voudrais adresser un vibrant hommage à ces deux jeunes activistes qui ont été enlevés depuis le 9 Juillet 2024 par des personnes non identifiées en tenue militaire. Je voudrais aussi adresser les mêmes sentiments de compassion à toutes les autres victimes de banditisme dont les noms ne feront jamais la une des journaux parce qu’elles ne sont pas des icônes. Le phénomène du grand banditisme et du crime organisé doit être au centre des préoccupations de l’Etat en vue d’éradiquer ce mal qui déstabilise la quiétude sociale.
Je ne peux pas ressentir exactement ce que les épouses, les enfants et les familles de ces deux jeunes ressentent, mais je compatis pleinement à leur douleur. Ces jeunes se sont toujours battus pour leurs idéaux et leurs convictions même si cela a parfois susciter des divergences dans les méthodes de revendication avec les autorités. Je souhaite vivement que toute la lumière soit faite sur ces cas d’enlèvements et que ces jeunes puissent retrouver leur liberté et rejoindre leur famille dont l’angoisse perdure. Je n’ai certainement pas la réponse à cette énigme, mais je voudrais dire aux gens d’éviter de faire des conclusions hâtives, surtout lorsque les accusions ne sont pas basées sur des faits indéniables. Comme le Premier Ministre le disait tantôt, l’Etat n’a plus le monopole de la violence. Si des individus en uniforme militaires avec des engins militaires peuvent orchestrer un enlèvement de personnalités politiques à la prison centrale de Conakry, il va de soi que tous les scenarios sont possibles. Il ne faut soustraire aucune piste dans cette affaire.
Pensez-vous que le Président Mamadi Doumbouya sera candidat aux prochaines élections présidentielles ?
Décidément, cette question revient à tous les coups. La spéculation n’est pas mon domaine de prédilection, mais de ce que j’ai pu observer, c’est qu’il existe un sentiment de soutien populaire et d’approbation des actions entreprises par cette administration durant ces dernières années. La détermination, les efforts, les initiatives, et les résultats obtenus en un temps record nonobstant quelques erreurs de parcours suscitent de l’espoir chez les populations. Si la démocratie se manifeste par la volonté du peuple, alors le peuple décidera à travers la nouvelle constitution les hommes et les femmes qui doivent nous gouverner. Maintenant, en ce qui concerne la décision du Président Mamadi Doumbouya d’être candidat aux prochaines élections présidentielles, cette décision est personnelle et elle revient seule au Chef de l’Etat de la prendre. Je reste persuadé que quand ce moment viendra, le Président va consulter sa famille, ses proches et son peuple tout en tenant compte des intérêts supérieurs de la Guinée pour prendre la meilleure décision.
Pensez-vous que le Premier Ministre Bah Oury sera candidat aux élections présidentielles ?
L’ambition de tout leader politique est de gouverner le pays. Maintenant, il se peut que pour une raison ou pour une autre les ambitions soient retardées. Vous vous souvenez qu’il y’a quelques temps personne ne pensait que Bah Oury serait Premier Ministre, certains disaient qu’il n’avait plus aucun avenir politique, et bien cela fait maintenant une année qu’il est le premier Ministre Chef du Gouvernement. Je dirais que pour l’instant, le Premier Ministre est concentré sur la tâche qui lui a été confiée par le Président de la République, et lorsque cette mission sera accomplie, il décidera au moment opportun en consultation avec le parti de ce qu’il doit faire. Dans tous les cas, nous le soutenons quel que soit le choix qu’il fera.
Comment voyer vous la participation de la diaspora dans le développement socioéconomique du pays ?
La diaspora guinéenne peut jouer un rôle essentiel en mobilisant ses ressources, ses compétences et ses réseaux. Elle a déjà apporté un soutien considérable, notamment pendant la crise sanitaire, de COVID-19, les investissements dans l’éducation, l’agriculture et le soutien aux communautés vulnérables. Son rôle ne s’est pas limité à l’aide humanitaire, elle a également influencé les discussions politiques lors des assises nationales où j’ai moi-même participé en tant que porte- parole de la commission pour le compte des États-Unis. Pour amplifier cet impact, il serait judicieux de structurer cet engagement autour de trois axes principaux : 1-
1-Créer une plateforme d’investissement structurée c’est à dire, créer des fonds d’investissement ou des coopératives formels pour canaliser les ressources vers des secteurs clés comme l’agriculture, la technologie et les infrastructures.
2- Initier un programme de transfert des compétences en mettant en place des initiatives de mentorat, de formation et de renforcement des capacités pour autonomiser les talents locaux et renforcer les institutions.
3- Former une instance crédible et représentative qui regroupe les organisations diasporiques régionales et internationales afin de coordonner les initiatives et maintenir l’élan du mouvement. Investir dans des programmes dédiés à la jeunesse pour encourager le leadership, l’entrepreneuriat et l’innovation.
La clé réside dans la transformation des contributions individuelles en un mouvement collectif et organisé, avec des objectifs clairs et des résultats mesurables. Toutefois, maintenir cet élan et transformer ces actions en un mouvement structuré et durable reste un défi à relever.
Quel est votre mot de la fin ?
Je voudrais vous remercier de m’avoir donné l’opportunité de m’exprimer sur votre plateforme pour parler de sujets très importants pour l’avenir de notre pays. La Guinée traverse une période cruciale de son histoire, et c’est en mettant de côté nos intérêts personnels et nos egos que nous pourrons ensemble bâtir un avenir meilleur.
Je tiens à rendre hommage au Premier Ministre Bah Oury pour son engagement, sa détermination et son sens de redevabilité envers son pays. Son courage face aux difficultés et son dévouement au bien-être du peuple guinéen méritent d’être salués. Ensemble, nous devons continuer à travailler pour faire de la Guinée un pays stable, prospère et résolument tourné vers l’avenir.
Entretien réalisé par Boubacar 1 DIALLO
Pour Africaguinee.com
Créé le 17 mars 2025 13:57Nous vous proposons aussi
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