Mamadi Doumbouya : « C’est le moment d’arrêter de nous faire la leçon… »

NEW-YORK- S’exprimant à la tribune des Nations-Unies ce jeudi 21 septembre 2023, le colonel Mamadi Doumbouya est revenu sur les « vraies raisons » de la récurrence des coups d’Etat en Afrique. Le chef de la transition a surtout expliqué pourquoi il a décidé de prendre les armes le 05 septembre 2021. Il appelle la communauté internationale d’arrêter de « faire la leçon à l’Afrique » qu’il estime suffisamment mature pour « décider de son destin ». Extrait.

« Épidémie de coups d’Etat en Afrique. Après celle de la Covid 19, le continent est frappé par celle des putschs militaires, notamment dans les pays francophones du sud du Sahara. C’est tout le monde qui les condamne, les sanctionne, qui s’émeut de la réapparition brusque de cette pratique que l’on croyait révolu à juste titre. Mais j’ai envie de dire que la communauté internationale doit avoir l’honnêteté et la correction de ne pas se contenter de dénoncer les seules conséquences, mais de s’intéresser et de traiter les causes.

Les coups d’Etat s’ils se sont multipliés ces dernières années en Afrique, c’est bien parce qu’il y a des raisons très profondes. Pour traiter le mal, il faut s’intéresser aux causes. Le putschiste n’est pas seulement celui qui prend les armes qui renverse un régime. Les vrais putschistes, les plus nombreux qui ne font l’objet d’aucune condamnation, c’est ceux qui manigancent, qui utilisent la fourberie qui trichent pour manipuler la Constitution afin de se maintenir éternellement au Pouvoir. C’est ceux en col blanc qui modifient les règles du jeu pendant la partie pour conserver les rênes du Pouvoir. Voilà les putschistes les plus nombreux », a martelé Mamadi Doumbouya.

Et de poursuivre : « Je fais partie de ceux qui, un matin, ont décidé de prendre nos responsabilités pour éviter à notre pays un chaos complet, une situation insurrectionnelle. Aucune force politique, toutes complètement neutralisées à l’époque, n’avait ni le courage, ni les moyens de mettre fin à l’imposture que nous vivions.

La rectification institutionnelle à laquelle mes frères d’arme et moi avons engagé le 05 septembre 2021, n’était qu’une conséquence de cette situation de chaos qui avait par fini par fissurer le tissu social et mettre à mal le vivre ensemble.

Sans être exhaustif, nous pensons que les transitions en cours en Afrique sont dues à plusieurs facteurs parmi lesquelles on peut citer : les promesses non-tenues, l’endormissement du peuple, le tripatouillage des Constitutions par des dirigeants qui ont pour seul souci que de se maintenir au Pouvoir au détriment du bienêtre collectif », a-t-il poursuivi.

Pour colonel Mamadi Doumbouya, le système de gouvernance imposé au continent par l’occident n’est pas adapté aux réalités africaines. « La démocratie imposée à nos États l’issue de la conférence de la Baul ne marche pas…C’est un constat », a indiqué le dirigeant guinéen qui ajoute que tous ceux qui acceptent le ‘’deal’’ avec certains dirigeants occidentaux sont souvent considérés comme « des leaders nationaux à qui on a accordé des certificats de démocrates… ».

En deux ans d’exercice de pouvoir, le président du CNRD estime qu’il connait un peu les rouages des grands palais. « Tous ce à quoi je fais face dépasse l’imagination. Certains de mes prédécesseurs ont cédé pour concocter des contrats léonins à cause des pressions ou des agendas politiques (…). Nous n’avons qu’une seule préoccupation, le bien-être du peuple », a indiqué le colonel Mamadi Doumbouya.

Plus loin, le dirigeant a fait une invite à l’organisation sous-régionale (Cedeao) qui fait face à une épidémie de coup d’Etat. Le chef de la junte guinéenne conseille aux dirigeants de la Cédéao de privilégier le dialogue en lieu et place des sanctions. « La Cedeao doit cesser de se mêler de la politique et privilégier le dialogue »,a-t-il invité.

Dans un contexte où l’Afrique est souvent ballotée entre les grandes puissances, le président de la transition rappelle que le Continent est devenu mature et qu’il n’est ni pour ni contre une quelconque puissance.

« Nous ne sommes ni pro ni antis américains, ni pro ni anti français, ni pro ni russe, ni pro ni anti chinois…nous sommes pro africain. C’est tout. Nous mettre sous la coupe de telle ou telle puissance est une insulte, du mépris, du racisme…vis-à-vis de l’Afrique.

C’est le moment d’arrêter de nous faire la leçon ou de nous traiter comme des enfants. Nous sommes suffisamment matures pour définir notre priorité. Nous vous serions reconnaissons de nous laisser mener notre barque comme vous l’avez fait ailleurs. La communauté internationale doit regarder l’Afrique avec les yeux », a lancé colonel Mamadi Doumbouya.

A suivre…

Africaguinee.com