Liberté de la presse en Guinée : le coup de gueule d’Alpha Ousmane Bah

Alpha Ousmane Bah

Ce mardi 3 Mai 2022, la 29ème journée de la liberté de la presse est célébrée à travers le Monde. La Guinée est l’un des derniers pays de la sous-région ouest-africaine à avoir connu la libéralisation des ondes (radios et télés libres). C’était la presse écrite qui faisait à la UNE des informations hebdomadaires

Quand les radios privées ont commencé à émettre entre 2005 et 2006, un peu avant RFI/BBC sur la bande FM en Guinée ; le pays avait perdu toute crédibilité aux yeux des institutions internationales avec le prolongement du pouvoir militaire du général Conté né de son fameux Koudé, premier exemple à sauter les verrous de deux mandats

Pour obtenir des financements au niveau de la commission de l’union européennes, il fallait des concessions et des garanties pour cela. La Guinée n’avait plus le choix que de céder à la naissance des radios libres et des télés en Guinée. C’était la seule offre que la Guinée pouvait offrir pour espérer des changements. 

Surtout que le général Conté avait déclaré que c’est lui la justice, c’est lui le gouvernement. Sinon longtemps nous n’avions pas le choix que d’écouter la RTG, pour ceux de Conakry la RKS en plus, les radios rurales à l’intérieur du pays

Depuis la libéralisation des ondes, les radios sont partout aujourd’hui dans le pays ; ceux qui exercent la profession sont nombreux en Guinée, la création des associations de presse s’est multipliée.

Mais il faut être clair, les résultats sont très maigres pour rendre la presse libre en Guinée, faute du fonctionnement correcte du marché de la publicité source de revenus pour les organes (dans un pays sérieux la communication est distinguée de l’information, ici en Guinée tout est confondu ; le journaliste qui fait le reportage et le même qui couvre le publireportage). C’est les mêmes voix qui sont aussi utilisées pour poser les spots publicitaires au détriment des maisons et agence de communication. Ils deviennent de facto des défenseurs des entreprises dans l’espoir que la collaboration va continuer.

D’ailleurs en Guinée, les agences de com appartiennent à des journalistes.  Un pays normal, les sociétés et les entreprises communiquent directement par les équipes de marketing et communication. Ils payent le temps d’antenne, ils rédigent leur article ou font l’élément, ils envoient pour diffusion. Et Vous verrez à coté LA CHAINE de Télé mentionne, « ce contenu n’engage pas notre organe »

Subvention faible, à côté la mauvaise foi de certains patrons de presse qui n’utilisent leur media dans le bon sens, mais juste un instrument d’amitiés et pour se rapprocher de la classe dirigeante

Ces patrons s’en foutent du travail sérieux et des journalistes qui ont dans la conscience il faut le professionnalisme et une indépendance pour grandir et faire de l’information une arme pour faire vivre la société.

L’autre manque de liberté ; c’est l’incapacité des médias à trouver les ressources nécessaires pour les équipes à faire un bon travail sur le terrain (frais de déplacement, hébergement, argent de poche et le matériel nécessaire pour ramener de la crème). Tous les jours, c’est viol, un enfant est tombé dans un puits ; un corps sans vie retrouvé ; Cellou a dit, Sidya a dit ; ateliers, séminaires ; le président de la transition a pris un engagement. Toute une radio sans un enregistrement ; ils enregistrent les gens sur le téléphone.

Faute de moyens ; une seule personne enregistre une interview ; le même son est partagé dans toutes les rédactions du pays. Il suffit de publier un article, un reportage ; les confrères appellent en longueur de journée pour quémander les sons. Pas de faits nouveaux. Il suffit d’écouter un organe, tu peux te limiter là c’est la même chose, aucun élément distinctif ailleurs

Au quotidien la presse ne change rien en Guinée, nous allons plus au remplissage pour passer la journée ; les infos sont traitées à moitié, on va souvent vers l’interlocuteur le plus proche ; la gestion des témoignages au téléphone sans constat sur le terrain.

Imaginez un journaliste qui voyage dans le coffre du véhicule du gouverneur, du préfet ; fait chemin avec le ministre peut ramener l’info fraiche contre le même commis de l’État. L’indépendance et la liberté n’y est pas.

Des organes ont existé pendant bientôt 5 ans ; jamais ils n’ont eu un salarié ; ils constituent une équipe de journalistes à l’essai un an ou deux ans ; au moment où il faut penser à la rémunération, on fait semblant d’avoir une panne technique ; raison de mettre les gens en congé technique ; on ferme quelques jours après on reprend quelques jours avec d’autres essayistes. L’arnaque !

Une catégorie de journalistes payés selon l’humeur du patron ; 150 ; 200 ; 300. 500 ; 600 et 800 milles alors qu’ils ont une famille. Dites-moi : ce dernier ne cherchera-t-il pas des amitiés au haut niveau pour manger et boire ? Des journalistes qui tiennent le sac du ministre. A Conakry par exemple ; les rédactions ont pris la mauvaise habitude de confier les activités d’un service à un seul journaliste qui va se confondre au service en question.

Ensuite la presse guinéenne à l’exception de quelques organes n’est pas au rendez-vous international ; couverture des élections dans la sous-région, la crise dans un pays, au sommet. Dans les grandes rencontrent ; les patrons préfèrent le trafic de visa pour un tiers qui va payer de l’argent contre leur journaliste qui pourrait aller couvrir un évènement à dimension mondial.

Tu es un bon journaliste tant que c’est pour couvrir les manifestations, quand il y a diner ; il y a un voyage. Les autres vont se réveiller et tu deviens petits, tu cesses d’être journalistes pendant les périodes de grâce.

 Devenu un instrument d’arnaque, les journalistes guinéens eux-mêmes refusent la liberté de la presse en Guinée concernant leurs propres traitements. Ils s’en foutent d’un contrat et ne le demandent même pas. Ils fondent l’espoir sur les miettes qu’un admirateur va donner de temps en temps.

Le public qui nous suit aussi n’est pas exigeant ; ce qui fait que nous donnons du n’importe quoi. C’est le remplissage ; nous accomplissons un devoir à l’endroit de la rédaction c’est-à-dire remplir les éditions d’éléments pour passer la journée pour zéro contenu. Ceux qui suivent ne trouvent rien d’intéressant.

La liberté c’est là d’abord et non autre chose ; sinon pour le moment côté autorité c’est calme ; c’est vrai ils font la rétention de l’info ; mais ils n’empêchent personne de traiter autrement son info sur la nation.

La liberté de la presse n’est pas pour demain en Guinée.  Nos maux sont en nous.

 

ALPHA OUSMANE BAH, (JOURNALISTE-reporter d’images et créateur de contenus audiovisuels)

Créé le 3 mai 2022 17:33

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