La détresse des déguerpis de la cité-police de Sonfonia : « Nos enfants risquent de rater les examens cette année… »

CONAKRY- Les occupants de la Cité-police de Sonfonia ont été déguerpis le 1er mai 2024 par les autorités. Depuis, certaines familles passent la nuit à la belle étoile, faute de moyens pour trouver un nouvel abri.

Une semaine après le passage des équipes de la Direction Nationale de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme, certaines n’arrivent toujours pas à quitter les décombres. Des femmes, des enfants passent la nuit dans ces amas de détritus, à la merci des moustiques et des intempéries.

Arrêté dos contre le mur de ce qui était hier sa maison aujourd’hui complètement décoiffée, les portes et fenêtres arrachées, cet officier de la police a le regard perdu vers le lac de Sonfonia. Il nous a expliqué son calvaire depuis la démolition de sa maison. Par peur de représailles de sa hiérarchie, le fonctionnaire de police a requis l’anonymat. Il confie que ses enfants et beaucoup d’autres élèves dont les parents logeaient dans cette cité, risquent de rater les examens de fin d’année à cause de ce déguerpissement.

« Voyez vous-même la situation dans laquelle toutes ces familles se sont retrouvées. Si on parle, ils diront que maintenant c’est les fonctionnaires qui sabotent les décisions du gouvernement. Parce que la plupart des gens qui habitent ici ce sont des fonctionnaires, des policiers… En vérité, nos autorités se sont vraiment foutues de nous. Comment comprendre cette décision ? Déguerpir des citoyens à un mois des examens nationaux de fin d’année ?

Depuis mercredi dernier (1^er mai) nos enfants ne vont pas à l’école et nous avons beaucoup d’écoliers qui doivent faire des examens nationaux cette année (CEE, BEPC, BAC, BTS). Nous sommes vraiment révoltés contre ceux qui ont pris cette décision. Mais puisqu’on est des policiers, si on proteste ils vont nous faire du mal, on n’y peut rien, mais Dieu va juger entre eux et nous. Dieu est là pour tout le monde« , soupire cet agent de police en détresse.

Fanta Bamba, une autre habitante de la Cité-police de Sonfonia, est à bout de souffle. « Ils nous avaient averti en nous donnant un préavis de 3 mois afin que les gens déménagent. Mais le problème est que ce n’était pas tout le monde qui était concerné par ce déguerpissement. Ils nous avaient dit que c’était juste une partie qui se trouvait à côté de la Blue Zone qu’on allait déguerpir. Mais à notre fort étonnement un jour on les a vus débarquer avec des machines pour déguerpir tout alors qu’on n’était pas concerné au départ. On a sorti nos bagages dans la précipitation pour ne pas qu’on les détruise« , explique cette élève.

Candidate au Baccalauréat uunique Session 2024, Fanta Bamba a été contrainte d’abandonner les cours pour trouver une maison en location pour sa famille.

« Franchement trouver une maison à Conakry c’est des problèmes. Ça fait 5 jours je suis derrière les démarcheurs mais jusqu’à présent on n’a pas eu une maison alors que dans notre famille nous avons beaucoup d’élèves mais qui ne vont plus à l’école depuis le 1er mai. On a dispersé tous les enfants parce qu’on n’a pas où passer la nuit, moi par exemple je fais le BAC cette année mais je ne pars pas à l’école puisque je suis derrière les démarcheurs. Franchement nous souffrons vraiment, je suis traumatisée, mon papa n’est pas là, ma maman ne travaille pas, c’est moi l’élève qui se débrouille pour s’occuper de la famille« , raconte-t-elle.

« Je lance un appel aux autorités et aux bonnes volontés de nous venir en aide sinon on risque d’abandonner nos études. Parce qu’on nous a déguerpi sans dédommagement et encore moins une mesure d’accompagnement. C’est des personnes de bonne volonté qui nous hébergent actuellement mais on ne peut pas rester indéfiniment chez des gens comme ça« , a lancé cette élève.