Jean Marc Teliano : « Alpha Condé n’ose pas m’inviter à Sékoutoureya… » (Interview)

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CONAKRY- Ancien Ministre d’Alpha Condé, le leader du parti « RDIG » reste très prudent quant aux engagements pris par le Chef de l’Etat guinéen. Jean Marc Teliano revient ici sur les différentes rencontres qu’a eues Alpha Condé avec des acteurs politiques de l’opposition, sa position sur une éventuelle mise en place d’un Gouvernement d’union nationale. Dans cet entretien exclusif, l’ancien Ministre Jean Marc Teliano parle aussi de son ancien allié Sidya Touré. Exclusif !!!

 

AFRICAGUINEE.COM : Monsieur Jean Marc Teliano bonjour !

Jean Marc Teliano : Oui Bonjour Monsieur Bah !

Comment avez-vous perçu cette rencontre entre le Président de la République et le Chef de file de l’opposition le 1er septembre dernier ?

Comme je l’ai dit, c’est une gymnastique politique et il faut y faire très attention. Aujourd’hui, Alpha Condé veut faire semblant d’être proche de son opposition (…), mais nous savons que derrière cela, il y a des calculs politiciens. Le Président joue la montre. Nous sommes dans un pays à 90% analphabètes, où la plupart de nos concitoyens pensent que Cellou s’est rapproché du pouvoir, donc par conséquent il n’y a plus d’opposition. C’est pourquoi dans les jours à venir, j’ai décidé de faire une tournée pour mieux informer les populations à la base.  Moi-même je me pose la question de savoir qui commande, entre la CENI (Commission électorale nationale indépendante, Ndlr) et Alpha Condé (…), parce qu’au moment où il fait semblant d’approcher son opposition sur des points qui doivent faire objet de discussion lors du prochain dialogue, la CENI quant à elle est en train de dérouler comme elle veut son chronogramme des élections. Je ne peux pas comprendre que le Président prenne l’initiative de respecter ses engagements, c’est quelque chose qui me surprendrait beaucoup. Même si on me mettait un sabre au mon cou je dirais qu’Alpha Condé ne respectera jamais ses engagements. Au lieu de faire le tour du monde pour appeler les leaders pour peut être prouver à l’opinion nationale et internationale, ou peut être de nous diviser, c’est de se tromper lui-même. L’essentiel ici c’est de respecter son serment et ce que les textes disent.

Du côté de la CENI on soutient qu’il est techniquement impossible de tenir à la fois les élecitons communales et celles au niveau des quartiers et districts. Qu’en dites-vous ?

C’est du cinéma. Les élections communales et celles au niveau des quartiers ont toujours eu lieu ensemble. Aujourd’hui vous n’êtes pas sans savoir le rôle primordial que jouent les quartiers dans le processus électoral. Aujourd’hui les chefs de quartiers sont à la solde du pouvoir, c’est pourquoi ils écartent ce volet. Même au temps du parti unique en Guinée où l’on n’osait même pas parler de démocratie, les chefs de quartiers étaient élus. Pourquoi pas maintenant, au moment où nous parlons de multipartisme ? C’est parce que les chefs de quartier peuvent être menacés et influencés par le système, c’est pourquoi ils ne veulent pas les remplacer puisqu’ils font le jeu du pouvoir. Nous de notre côté, nous n’allons pas accepter cet état de fait. Nous allons continuer à manifester parce que comme vous le savez, le président ne connait que les rapports de force.

Après les élections communales il n’y aura pratiquement aucun rendez-vous électoral avant la présidentielle de 2020. Ou bien vous soupçonnez le Président Alpha Condé d’avoir des velléités de se présenter pour un troisième mandat ?

Il est trop tôt de parler de 2020 (…). Vous savez, les autres partis meurent après la mort de leur président, mais le RPG lui est mort du vivant de son président Alpha Condé. Il est conscient qu’il est désavoué par le peuple, il ne fait pas semblant parce qu’il connait les réalités (…). C’est pourquoi il prend les devants pensant nous endormir mais il se trompe.  Rencontrer Cellou ou Aboubacar Sylla ou Jean Marc Teliano, il ne pourra pas nous convaincre (…). Moi personnellement je le connais, c’est quelqu’un qui n’a pas la culture du respect de la parole donnée.

On l’a vu quand-même au domicile de Cellou Dalein Diallo et comme vous l’avez souligné il a aussi invité le porte-parole de l’opposition à une autre rencontre. N’est-ce pas là quelques avancées ?

Cela ne veut rien dire, c’est du cinéma (…). Cela frise même la démagogie. Vous avez vu des gens comme Bantama Sow qui portait le fardeau chez Cellou ce jour avec des OUI Monsieur le président ou un certain Bouréma Condé qui dit qu’ils peuvent emboiter le pas (…), je vous dis que ce sont des opportunistes. C’est pourquoi je vous dis que ce gouvernement n’a aucune crédibilité. On dit que le poisson commence par pourrir par la tête. C’est honteux pour le pays.

Mais Cellou qui dit être prêt à nouer un partenariat avec le pouvoir en place. Est-ce que vous ne craignez pas un affaiblissement de l’opposition ?

C’est vous qui parlez de partenariat. Cellou Dalein serait dans son rôle. C’est cette démarche qu’Alpha devait faire dès après sa prestation de serment en 2010. C’est de mettre chacun à sa place dans son travail. Un partenariat dont vous venez de faire allusion ne veut pas dire cautionner la mauvaise gouvernance d’Alpha Condé ou ne veut pas dire cautionner la gabegie ou de tuer la démocratie. Nous, nous l’avons vu venir (…). Dans les prochaines semaines, nous allons organiser une plénière si rien n’est fait nous allons reprendre nos manifestations. Figurez-vous que depuis le 1er septembre nous avions adressé un courrier au ministre de l’Administration du Territoire qui nous avait dit que ce courrier sera diligentévers qui de droit. Si en tout cas des solutions idoines ne sont pas prises, c’est le rapport de force comme je vous le dit qui prévaudra puisque c’est qui peut faire fléchir Alpha Condé. 

Seriez-vous prêt à répondre à une invitation de Monsieur Alpha Condé ?

Alpha Condé n’ose pas m’inviter (…).

Et pourquoi donc ?

Il semblerait que je suis sur la liste des invités. Mais je ne dis rien (…), mais une fois en face de lui comme j’ai l’habitude de le regarder en face (…), d’ailleurs même quand vous le fixer il baisse la tête (…).

Que diriez-vous au Président de la République une fois en face de lui ?

Ce que le chef de file de l’opposition lui a dit est largement suffisant. Je n’irai pas à l’encontre de ce que Cellou Dalein a dit. Il n’y a pas mille mots à ajouter, je lui dirai seulement de respecter sa parole et ses engagements. Il n’a pas besoin de faire tout ce cinéma qui n’est que de la pure démagogie.

L’UFR qui quitte l’opposition républicaine, le PEDN qui prend également ses distances, est-ce qu’un « partenariat » avec le pouvoir en place ne pourrait pas tuer complètement cette opposition ?

C’est vous qui le dites. L’opposition dans son entièreté a toujours été ce qu’elle a été auparavant. Elle a été boosté depuis quelques mois, d’ailleurs pour preuve regarder la dernière mobilisation comment elle a été grandiose. Ce n’est pas que l’opposition qui était dans la rue ce jour mais c’est tout le peuple. Tout le monde en a ras-le-bol de ce système. Moi-même qui vous parle, c’est vrai que j’ai le minimum vital, mais cela ne suffit pas, il faudrait que mes compatriotes bénéficient de ce même minimum que moi. Je vous assure que si aucune disposition n’est prise, la prochaine marche de l’opposition sera l’assaut final contre Alpha Condé.

En réaction à la demande d’ouverture d’un dialogue politique, le chef de file de la majorité présidentielle au Parlement Damaro Camara a réitéré que les débats doivent se tenir à l’Assemblée Nationale et non dans un autre cadre. Que répondez-vous ?

Des gens comme Damaro sont des marionnettes. Parlez-moi d’Alpha Condé (…). Je ne peux pas faire de commentaires par rapport au rapprochement de l’UFR vers le président. Les prochaines échéances pointent à l’horizon, nous saurons qui est qui (…), l’UFR a gagné dix députés, nous verrons s’ils gagneront même un maire.  Vous allez déterminer le poids de tous les partis politiques, parce que les élections locales sont faites pour jauger le vrai poids des partis politiques. L’on saura qui est parti politique et qui ne l’est pas. Pas besoin de faire des commentaires, vous jugerez vous-mêmes dès après le résultat.

Parlant du RDIG, il se dit que vous êtes bousculé par d’autres partis de la mouvance et que vous avez perdu du terrain. Quelle est votre réaction ?

C’est eux qui le disent (…). Mais je suis allé aux législatives, moi je suis un député normal. Il y a des députés anormaux, moi je ne suis pas parti sous la couverture d’un parti, ni affilié à un autre, j’y suis allé tout seul. Malgré la mascarade, j’ai dépassé le quota contrairement aux autres partis que je connais qui ont bénéficié du plus fort reste. C’est d’abord injuste, si on parle du plus fort reste, c’est d’abord ceux qui ont atteint le quota et ceux qui ont dépassé le quota. C’est la logique des choses par rapport au plus fort reste. Je n’aurai pas assez de commentaires à faire puisque c’est le terrain qui va nous départager.

Dans quelle préfecture comptez-vous présenter des candidatures ?

Nous allons essayer de voir ça (…).

Allez-vous faire des alliances ?

Mais bien sûr j’ai déjà une alliance avec l’UFDG, c’est mon allié habituel et comme vous avez parlé de respects des engagements de part et d’autre si vous me demandez entre les deux qui est sûr de respecter ces engagements (Entre Alpha Condé et Cellou Dalein, Ndlr), je dirais que c’est le président Cellou, parce qu’au moins je connais les deux personnes. J’ai signé des accords avec les deux et parmi eux c’est Cellou qui a respecté ses engagements.

Le président Alpha Condé est cité dans un scandale financier avec l’arrestation du fils de l’ancien premier ministre gabonais. Ce dernier se serait rendu coupable d’acte de corruption qui impliquerait le Chef de l’exécutif guinéen. Votre réaction ?

Mais ce n’est pas la seule affaire dans laquelle il est incriminé. Peut-être c’est ce dossier que vous connaissez. Toutes les sociétés minières qui ont plié bagage aujourd’hui sont parties pourquoi. Quand j’entends dire que Tony Blair était là pour la fête de Tabaski, j’ai rigolé (…). Attendons de voir la suite, puisque ce n’est que le début du commencement. C’est pourquoi j’ai toujours dit que ce serait une chance pour Alpha Condé de sortir par la grande porte. Si Alpha Condé est en train de jouer avec le feu, c’est un conseil de petit frère à grand-frère, on peut mentir au peuple une partie du temps, mais on ne peut pas mentir tout le temps au peuple.

Un dernier mot ?

Vous avez parlé de l’UFR, vous allez voir dans la nouvelle configuration, ce parti n’a aucune présidence de délégation spéciale. Mais le pire, ce sont les prochaines échéances. Donc aujourd’hui je lance un appel à tout le peuple épris de paix et de justice de voter utile, c'est-à-dire celui de voter pour l’opposition. C’est une façon de sanctionner Alpha Condé pour sa mauvaise gouvernance. Voyez comment nos rues sont défoncées, les infrastructures routières constituent la honte de ce pays. Sous d’autres cieux, dès que vous entamez la rentrée de la capitale vous êtes soulagé contrairement à la Guinée.

Vous avez fait allusion à l’UFR, est-ce que vous regrettez votre soutien à ce parti en 2013 ?

Je ne regrette pas (…). Moi je n’ai jamais soutenu Sidya Touré ou l’UFR. Ce n’était qu’une alliance (…), mais effectivement c’est c’est toute l’opposition qui a soutenu l’UFR, nous avons donné des consignes de vote pour ce parti. Mais je ne regrette pas parce que cela nous a permis de connaitre qui est qui. Etre dans un environnement donné avec assez de personnes permet aux uns et aux autres de se connaitre. C’est une expérience de la vie. Donc par conséquent je n’ai pas de regret à cela, mais avec tout le respect que je dois au président Sidya Touré, je n’ai aucunement le droit de dire de mauvaises choses à son encontre. Mais par contre je peux critiquer sa façon d’agir (…), mais ses décisions sont des décisions personnelles à lui que je respecte. C’est lui qui sait pour quoi il est parti vers Alpha Condé, c’est lui qui connait les avantages et les inconvénients. Mais s’il m’avait consulté en tant que jeune frère je lui aurais dit non.

Seriez-vous prêt à participer de nouveau à un Gouvernement de M. Alpha Condé ?

Si je participe à un gouvernement d’Alpha Condé c’est de le dédouaner. C’est un jeu de cartes (…). Si je désigne un représentant du RDIG, c’est de participer à sa mauvaise gouvernance. Je vous dirais non et je n’en ai pas besoin.

Merci Mr Teliano !

Je vous remercie !

 

Entretien réalisé par BAH Boubacar Loudah

Pour Africaguinee.com

Tél. : (+224) 655 31 11 13

Créé le 19 septembre 2016 15:12

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