Hommages à Thierno Djaka: l’émouvant témoignage de Mamadou Kaba Souaré

Mamadou Kaba Souaré

CONAKRY-Un symposium a été organisé ce samedi 26 septembre 2020, en l'honneur d'Elhadj Thierno Djaka Souaré, décédé le 23 septembre 20, à Conakry, des suites de maladie. De vibrants hommages lui ont été rendus à cette occasion, à l'hôpital sino-guinéen. Parmi ceux-ci, il y a celui de sa famille, prononcé par Mamadou Kaba Souaré, l'aîné.  

"Je dois vous dire que nous sommes soulagés, nous ne regrettons pas aujourd’hui. C’est vrai qu’on a perdu un père aujourd’hui mais nous avons d’autres papas. Nous avons écouté les différents témoignages qui ont été véhiculés ici, ça nous réconforte. Nous rendons grâce à Dieu et remercions le Tout Puissant Allah de nous avoir donné le privilège et le bonheur d’avoir connu un père, un collègue, un ami et surtout un papa exemplaire comme Elhadj Thierno Djaka Souaré dont j’ai l’immense honneur de prononcer ce message en sa mémoire. Au nom de mes frères et sœurs réunis et au nom de la famille avec votre permission je vais vous raconter une petite anecdote dont je suis très fier aujourd’hui.

C’était un soir de mercredi du mois d’août 1996, j’avais à l’époque plus ou moins 15 ans, j’étais dans un taxi brousse en partance pour Mali, entre Labé et Mali, il était vers 19h. Il y a un des passagers de ce taxi qui a réclamé avec insistance auprès du chauffeur de mettre la radio nationale parce que c’est l’heure de l’émission Balade Musicale en langue nationale poular. Sur son insistance, le chauffeur a allumé la radio et quelle fut ma surprise d’écouter la voix de mon père tout en gardant l’anonymat dans le véhicule. Ce jour-là, mon père, notre père comme d’habitude avait séduit ses auditeurs avec des formules dont il avait le secret. Je vous donne un petit extrait, il avait dit ce jour-là : ‘’Si celui qui perd quelque chose ne pleure pas, celui qui retrouvera cette chose oubliée ne va pas rire’’. Et ça été un fou rire général dans le taxi et tous les passagers ont oublié le petit calvaire qu’ils vivaient sur cette route qui n’était pas facile. C’est ce jour-là que j’ai découvert que notre père était aimé, j’ai découvert que notre père n’était pas seulement notre père mais il appartenait à la Guinée toute entière. Permettez-nous de vous dire un peu qui était cet homme si populaire grâce à la magie des ondes, comment vivait-il avec ses enfants qu’il aimait tant.

Voici quelques mots qui pourraient décrire notre père à la maison. Ce qui caractérisait notre papa c’était d’abord l’exigence, il était extrêmement attentionné pour assurer notre éducation, les témoignages en ont confirmé, il s’est privé de tout pour préparer notre avenir. Il avait un mot gentil pour nous tous mais malheur à celui qui venait avec une mauvaise note à la maison car il sera fouetté tendrement devant ses camarades d’école. Etre premier à l’école n’était pas forcément une garantie pour oublier l’école coranique et les tâches ménagères pour aider les autres. L’autre caractéristique de notre papa à la maison c’était la générosité. Notre père était extrêmement généreux, dans notre maison, il y a avait de la place pour tout le monde, un repas pour tous les invités. Il ne prenait jamais ses repas tout seul et veillait avant sa première cuillerée à vérifier que tout le monde avait sa cuillère pour manger avec lui et que même le chien domestique avait reçu sa part sinon il ne mangeait pas. Mon père c’était quelqu’un de passionné aussi.

Très tôt notre père nous a inculqué cette passion pour le micro et dont je suis fier et dont mes frères et sœurs sont fiers avec des collègues. Cette passion pour le micro nous l’avons vécu avec lui pendant notre enfance. Par exemple, lorsque les personnes venaient à la maison pour un avis de décès ou un communiqué sa réponse était souvent la même, allez voir mon enfant, il va vous aider à écrire le communiqué. Et si par malheur il y avait une faute dedans c’était tout de suite là la correction pour te dire il fallait faire ça et là il fallait faire ça. Nous avons été bercés par cette passion pour la RTG, nous l'accompagnions notamment à la RTG de Boulbinet et à la maison il avait l’habitude d’utiliser son dictaphone pour faire des enregistrements à l’intérieur du pays. Et quel bonheur d’écouter avec lui des musiques pastorales comme Sarsan Ourékaba, Bah Sadjo et tant d’autres.

C’est aussi l’opportunité pour nous avec mes frères et sœurs d’avoir une pensée pour ses amis et nos tontons qui nous ont quittés et qui l'ont devancé. Nous pensons aujourd’hui à Elhadj Alkhaly Mohamed Keïta, à tonton Soridian Cissé qui ne manquaient pas à la maison, à tonton Mouso Koromory Condé qui venait aussi à la maison, à tonton Faouly Sima et tant d’autres que nous n’avons pas l’opportunité de citer. Notre père était caractérisé par ce sens de la justice, il était le défenseur des plus faibles, sa colère était homérique s’il assistait à nos moindres disputes pour défendre le plus faible. C’était aussi quelqu’un qui incarnait un grand amour pour ses enfants, notre père nous aimait profondément comme il aimait les enfants des autres, tous nos cousins, tous nos parents étaient les bienvenus à la maison.

Rien ne manquait et si l’un d’entre nous partait en vacances, les collègues peuvent témoigner, il faisait tout de suite une petite dédicace dans l’émission Galli Landadhi qu’il animait les vendredis pour dire que nous saluons tel qui se trouve à tel endroit. Ce qui fait que quand on revenait à Conakry, tout de suite tous nos camarades savaient où on a passé nos vacances. C’était aussi une certaine fierté par rapport à ses origines à Mali, notre père nous rappelait souvent qu’il faisait des kilomètres entre son village pour aller à l’école. Et dès notre tendre enfance, il nous amenait dans les villages pour vivre le quotidien de nos parents et de nos grands-parents. Entre nos village de Pelli, Falowi, Bambali, Morawel et tant d’autres tout le monde était content de voir les enfants de Thierno Djaka venir apprendre l’école de la vie auprès des leurs loin petit confort de Conakry. Voilà qui était notre père.

Aujourd’hui notre père a rempli sa mission avec mes frères et sœurs avec votre soutien, avec l’aide de Dieu nous prenons l’engagement de continuer son œuvre. Nous allons faire en sorte que ses mémoires soient publiées, nous allons faire en sorte qu’avec votre soutien qu’il y ait une fondation en son nom pour perpétuer ce qu’il a toujours fait. Cette passion pour la protection de la culture et du patrimoine guinéenne. Oui notre père est parti à jamais mais son œuvre reste. Papa nous vous aimons (pleures). Nous vous invitons à sécher vos larmes parce que l’homme dont nous honorons aujourd’hui la mémoire a rempli sa mission. Et comme il le disait avec humilité à la radio pour les familles éplorée ‘’haraye sibbhè e ybbhè on torama yarlagol baaben amen’’. Que Dieu le Tout Puissant Allah vous accorde son paradis, amine".

A suivre…

Oumar Bady Diallo

Pour Africaguinee.com

Créé le 26 septembre 2020 16:43

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