Guinée : La Cité des Sciences organise la première conférence sur les Données Numériques et l’Intelligence Artificielle « DounIA »

CONAKRY – « Co-construire une stratégie nationale en données numériques et en intelligence artificielle (IA) ancrée dans nos réalités et nos priorités », c’est autour de ce thème que la Cité des Sciences et de l’Innovation de Guinée (CSIG), en partenariat avec l’Académie des Sciences de Guinée (ASG), organise ce mercredi 30 avril 2025 la première conférence sur les Données Numériques et l’Intelligence Artificielle, baptisée DOUNIA.

Cette initiative intervient alors que l’Afrique amorce progressivement son entrée dans l’ère du numérique, des données et de l’IA, tout en demeurant trop souvent cantonnée au rôle de simple consommatrice de technologies conçues ailleurs.

En Guinée, cette ambition s’inscrit dans le cadre des objectifs stratégiques du programme Simandou 2040, qui vise une transformation structurelle du pays à travers le renforcement des compétences, l’industrialisation, la souveraineté technologique et la valorisation des talents locaux. Dans ce contexte, les données numériques — notamment celles issues des services publics — apparaissent comme des leviers clés de pilotage, d’optimisation et de redevabilité.

Cependant, plusieurs défis majeurs subsistent : déficit d’infrastructures numériques robustes, faible niveau de compétences digitales, absence de cadre de gouvernance des données, ou encore accès limité aux données publiques stratégiques. Ces obstacles freinent l’appropriation nationale de l’IA et limitent son potentiel au service des priorités de développement : éducation de masse, santé communautaire, agriculture intelligente, ou encore efficacité des politiques publiques dans les régions minières comme celles du Simandou.

C’est dans cette vision ambitieuse et tournée vers l’avenir que s’inscrit la conférence DOUNIA. Elle se veut immersive, participative et stratégique. Pour cette première édition, des intervenants venus de plusieurs pays africains, des représentants d’institutions nationales (dont le recteur de l’AUF, Professeur Slim Khalbous), des entreprises technologiques, innovateurs, chercheurs, étudiants et décideurs politiques sont attendus pour initier une dynamique inédite de co-création autour des enjeux liés aux données et à l’IA.

L’objectif est  d’initier une réflexion collective en vue de l’élaboration d’un document de recommandations préliminaires pour jeter les bases d’une Stratégie Nationale des Données Numériques et de l’Intelligence Artificielle en Guinée, en s’inspirant des expériences africaines existantes et des bonnes pratiques en matière de régulation, de gouvernance, d’éducation et d’innovation.

Dans son discours de bienvenue, le professeur Ibrahima Baniré Diallo, coordinateur de la Cité des Sciences de Guinée, a exprimé, au nom de toute l’équipe qu’il dirige, sa joie d’accueillir les nombreux invités de la conférence DOUNIA. Parmi eux, des ministres, des responsables d’universités, d’instituts, réunis au sein d’une institution dont les travaux ont été lancés il y a seulement neuf mois.

« Dounia, dont le nom évoque la vie dans l’une de nos précieuses langues guinéennes, prend aujourd’hui une dimension nouvelle dans cette conférence. Dounia pour Données Numériques et Intelligence Artificielle. Car les données et l’IA sont devenues des enjeux majeurs de notre monde moderne et représentent le chemin vers notre souveraineté technologique », a déclaré le Pr Ibrahima Baniré Diallo.

Il a saisi l’occasion pour exprimer toute sa gratitude envers la première personne ayant cru au projet de la Cité des Sciences : le président Mamadi Doumbouya, dont le décret présidentiel a officialisé la création de cette structure comme direction générale relevant du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation.

Un moteur scientifique au service de la transformation nationale

Le Professeur Abdoulaye Baniré Diallo a présenté la Cité des Sciences comme bien plus qu’un simple centre de recherche. Elle constitue un espace collaboratif, réunissant plusieurs centres et entités d’innovation, œuvrant ensemble pour apporter des solutions aux défis auxquels la Guinée est confrontée.

« Elle est le moteur scientifique de la vision Simandou 2040, portée par le chef de l’État pour faire de ce projet minier stratégique un véritable levier de transformation nationale et panafricaine. Il ne s’agit pas seulement d’extraire le minerai, mais de faire naître un écosystème d’intelligence. Pas seulement artificielle, mais une intelligence tournée vers la souveraineté économique et un leadership technologique régional », a-t-il souligné.

Dans cette dynamique, il a mentionné la Simandou Academy, une plateforme de formation d’élites guinéennes et africaines rattachée à plusieurs institutions. La Cité des Sciences y joue un rôle central.

« Elle constitue l’une des armes stratégiques de la Simandou Academy. Elle formera les talents de demain dans des domaines clés comme l’intelligence artificielle, la cybersécurité, les sciences des données et les sciences environnementales, au service des besoins de l’industrie minière, agricole et économique guinéenne », a-t-il ajouté.

Une conférence qui marque un tournant

Prenant la parole à son tour, le professeur Mamadou Aliou Baldé, président de l’Académie des Sciences de Guinée, a souligné l’importance de cette conférence, qu’il ne considère pas comme un simple colloque.

« Elle incarne une ambition : faire de la Guinée un laboratoire d’innovation où les technologies de pointe dialoguent avec les savoirs ancestraux pour construire une société de savoirs authentiques », a-t-il déclaré.

Il a salué la collaboration fructueuse entre l’Académie des Sciences et la Cité des Sciences de Guinée, rappelant que l’Académie est une institution créée par la loi, placée sous la haute protection du chef de l’État et sous le parrainage du ministère de l’Enseignement supérieur. Elle est également intégrée à plusieurs réseaux scientifiques continentaux, dont le NASAC (réseau panafricain des académies des sciences) et le HANAS (réseau ouest-africain).

Savoirs traditionnels et IA : une synergie à construire

Le professeur Baldé a insisté sur l’importance de préserver les savoirs traditionnels africains, qui englobent des pratiques agricoles, des connaissances médicales, des techniques de gestion des ressources naturelles et un patrimoine immatériel fondé sur les langues locales. Il a toutefois déploré plusieurs défis menaçant leur transmission : l’usage dominant de langues étrangères, l’érosion intergénérationnelle, ou encore l’absence de systèmes d’écriture pour certaines langues.

« L’essor de l’intelligence artificielle ouvre des perspectives nouvelles. Mais son utilisation doit s’appuyer sur une éthique rigoureuse, pour éviter la décontextualisation des savoirs, les biais algorithmiques, et préserver la transmission humaine », a-t-il averti.

Parmi les actions envisagées par l’Académie figurent :
– des initiatives éducatives pour sensibiliser aux enjeux culturels,
– des partenariats nationaux et internationaux,
– l’intégration des savoirs traditionnels dans les programmes de formation liés à l’IA.

« Nous sommes convaincus qu’en combinant technologie et sagesse ancestrale, nous pouvons bâtir une mémoire culturelle durable, sans trahir l’âme de nos civilisations. Que cette conférence soit l’aube d’une ère nouvelle où chaque algorithme raconte notre histoire, chaque donnée chante nos langues, et chaque innovation magnifie notre identité », a-t-il conclu.

IA et souveraineté numérique : un impératif pour l’Afrique

« Si l’Afrique ne définit pas aujourd’hui ses propres règles de l’intelligence artificielle, demain, nos enfants n’auront d’autre choix que de suivre celles des autres. Cette vérité est au cœur même de notre engagement et justifie notre présence ici : écrire ensemble une nouvelle page de notre histoire, celle de notre souveraineté numérique », a déclaré la ministre des Postes, Télécommunications et de l’Économie numérique, Rose Pola Pricemou.

S’exprimant également au nom du ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation, la ministre a rappelé que selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le volume mondial des données double toutes les douze heures, et près de 40 % des activités économiques sont déjà façonnées par l’IA.

Pour Rose Pola Pricemou, il est impératif que l’Afrique prenne la parole, décide et innove. « La Guinée refuse d’être en marge. Elle veut compter, innover, et surtout rayonner. Sous la conduite éclairée du chef de l’État, le Général Mamadi Doumbouya, et du chef du gouvernement, notre pays s’est engagé dans une vision claire à travers le programme Simandou 2040, notre feuille de route pour le développement », a-t-elle affirmé.

Ce programme repose sur trois piliers fondamentaux : l’industrialisation, la souveraineté numérique, et le développement du capital humain.

« Notre politique scientifique et d’innovation prévoit, à travers la Cité des Sciences et de l’Innovation, la mise en place de laboratoires spécialisés en numérique et en IA, un centre de données souverain, ainsi que plusieurs centres de recherche. Ces structures porteront des projets innovants, générant des données de qualité qui pourront être traitées grâce au projet de supercalculateur », a précisé la ministre.

Cette infrastructure permettra également l’analyse de données satellitaires pour la gestion environnementale, la surveillance des mines, la préservation de la biodiversité, la cartographie sociale, la lutte contre les épidémies, ou encore la modélisation des impacts miniers et agricoles.

« Autant de défis que nous ne pourrons relever qu’ensemble. La conférence DOUNIA s’inscrit pleinement dans cette dynamique. Elle vise à écouter, valoriser les savoirs et les talents africains, et construire une stratégie nationale de données et d’intelligence artificielle ambitieuse, réaliste et profondément enracinée dans nos priorités », a-t-elle insisté.

Rose Pola Pricemou a conclu en annonçant le lancement du Manifeste de Conakry pour l’IA, une déclaration solennelle pour une intelligence artificielle éthique, souveraine et audacieuse.

Cette journée devrait aboutir à l’élaboration d’un document de recommandations préliminaires vers une stratégie nationale guinéenne en intelligence artificielle.

Nous y reviendrons

Siddy Koundara Diallo

Pour Africaguinee.com

Créé le 30 avril 2025 16:37

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