Enquête sur la tragédie meurtrière du 1er décembre à Nzérékoré : Où en est-on ?

NZEREKORE-La ville de Nzérékoré a été frappée par une tragédie meurtrière le 1er décembre 2024. Ce jour, plusieurs personnes ont perdu la vie, au stade du 3 avril, lors de la finale d’un match de football doté du trophée « Général Mamadi Doumbouya ». La majorité des victimes sont des adolescents. Un bilan officiel encore provisoire fait état de 56 morts. Après ces évènements tragiques, le Gouvernement guinéen avait annoncé l’ouverture d’une enquête dont les résultats ne sont toujours pas rendus disponibles par la Justice. Concomitamment, un collectif local d’organisations de défense des droits de l’Homme, mène lui aussi des investigations. Près de deux mois après cet incident tragique où en est-on dans l’évolution de ces enquêtes ? Si les autorités au niveau politique et judiciaire gardent pour le moment le silence, au niveau du collectif, nous avons pu obtenir quelques d’informations.
La hantise de la tragédie et la peur de parler
Interrogé ce mardi 21 janvier 2025, Emmanuel Fassou Sagno, président du collectif des organisations de défense des droits de l’Homme de Nzérékoré soutient que les enquêtes avancent. Cependant, dit-il, certaines victimes sont encore réticentes à la communication.
“Après cette tragédie, il fallait d’abord consoler les victimes, il fallait que les cœurs s’apaisent. A la suite de cela, nous avons déployé des équipes sur le terrain pour rencontrer les victimes, pour en savoir sur ce qui s’est passé, pourvu que les victimes soient rétablies dans leurs droits. Nous sommes en train de faire ce travail qui est en train de bien avancer.
Mais la quête de la justice est un travail personnel de la part des victimes. Parce que l’engagement d’un citoyen d’aller vers la justice est d’abord un engagement personnel. Donc toutes les victimes sont libres d’aller vers cette quête là. Ce qui fait qu’aujourd’hui, certaines victimes sont disponibles à faire ce travail avec nous, d’autres par contre, sont un peu réticentes. Mais c’est de leur droit. A part cela, je crois que tout se passe bien(…)”, confie M. Sagno.
Si le gouvernement guinéen a annoncé un bilan provisoire de 56 morts, ce collectif fait état d’un bilan beaucoup plus lourd avec des cas de portés disparus. Ce bilan a été obtenu grâce aux statistiques reçues près des hôpitaux, des quartiers, des églises et mosquées, mais aussi des familles soutient ce collectif.
“Nous avons déployé nos équipes dans les quartiers, au niveau des hôpitaux, dans des familles, au niveau des sages, des églises, des mosquées pour avoir des informations croisées. C’est ce qui nous a donné ce bilan. La phase dans laquelle nous sommes c’est de confirmer ce bilan. Donc il faut maintenant aller vers les victimes qui sont sur notre base de données, les noms et leurs identifications géographiques pour les rencontrer et voir, effectivement si elles sont victimes ou pas. Est-ce que les listes qui nous ont été remontées sont des listes fiables. Donc ce travail là continue, au moment venu, nous donnerons plus de précisions ”.
Récemment, des avocats de la défense des victimes de cette tragédie a adressé une lettre au ministre de la Santé, dans laquelle ils attirent l’attention du Dr. Oumar Diouhé Bah sur le cas d’un jeune lycéen accidenté pendant les évènements malheureux du stade du 3 avril. Selon le président du collectif des organisations de défense des droits de l’Homme de Nzérékoré, à part Etienne Kolié, d’autres blessés évacués à Conakry rencontreraient des difficultés liées à leurs traitements. Il invite le Gouvernement à prendre des dispositions pour les soulager.
‘’Étienne Kolié a attiré l’attention de tout le monde parce que son cas est si grave. Il est peu plus étonnant d’apprendre que Étienne n’a pas les soins appropriés, d‘autant plus que le gouvernement a pris l’engagement d’apporter les soins nécessaires à toutes les victimes notamment aux blessés évacués du côté de Conakry. Pour nous, le problème ne se posait plus. C’est avec étonnement que l’on apprend que d’autres victimes, n’ont pas de soins appropriés. Donc c’est l’occasion à la suite des avocats de lancer un appel au gouvernement, notamment au ministre de la santé d’honorer les engagements pris par le gouvernement. A savoir, apporter des soins nécessaires à toutes les victimes. Vraiment nous lançons un appel solennel, nous demandons humblement au gouvernement à travers le ministère de la santé, d’apporter les soins qu’il faut à ces blessés’’, lance Emmanuel Fassou Sagno.
Malgré les efforts fournis par ce collectif dans ses enquêtes, il fait face à des difficultés logistiques et financières.
“On a des difficultés logistiques et financières, parce que nous sommes en train de travailler avec nos structures de base. Ce sont nos organisations, qui sont en train de prendre en charge cette enquête qui prendra du temps mais nous voulons avoir vraiment des résultats fiables. Ce n’est pas une question de manque de volonté, le processus qui va aboutir”, soutient le président du collectif.
Monsieur Sagno n’a pas manqué d’interpeller certaines victimes mais aussi le gouvernement à œuvrer pour la manifestation de la vérité.
“Nous invitons les victimes à ne pas rester dans leurs coins, d’accepter de venir vers le collectif à travers ses enquêteurs qui sont déployés sur le terrain pour communiquer avec eux, pour partager leurs versions des faits. Pour voir la situation des cas de blessés et des disparus. Parce que s’ils refusent de communiquer, on ne peut pas avoir un rapport fiable. Et certaines ne seront pas prises en compte dans la base de données que nous devrons mettre ensemble. Et dans la dynamique de la manifestation de la vérité, il faut que les victimes acceptent que l‘on fasse ce travail collégial.
Nous invitons aussi le gouvernement qui a mis en place une commission d’enquête d’aller plus loin. Le travail pour la manifestation de la vérité dans cette tragédie ne s’arrête pas seulement au niveau de la commission d’enquête. Il faut qu’on puisse saisir une juridiction plus ou moins compétente pour qu’un procès ait lieu au plus vite que possible. Et nous invitons les institutions nationales et internationales, les partenaires techniques et financiers d’accompagner ce processus de manifestation de la vérité du collectif. En voyant dans quelle mesure ils peuvent nous appuyer techniquement et financièrement et voir dans quelle mesure aussi on peut apporter des aides aux victimes qui sont laissées pour compte aujourd’hui. Il y a encore des familles qui, aujourd’hui continuent à pleurer, qu’ils n’ont pas encore trouvé leurs proches”, a-t-il lancé.
De leur côté, les autorités judiciaires n’ont pas voulu faire de commentaires sur ce sujet. Rencontré ce mardi 21 janvier 2025, le procureur de la république près le tribunal de première instance de Nzérékoré ne s’est pas prêté aux questions de notre reporter.
A suivre !
SAKOUVOGUI Paul Foromo
Correspondant Régional d’Africaguinee.com
En Guinée Forestière.
Tél. (00224) 628 80 17 43
Créé le 22 janvier 2025 07:30Nous vous proposons aussi
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