Débauchage de cadres de l’opposition, sortie de Bah Oury : les « vérités » du Dr. Zotomou…

CONAKRY-Dr. Edouard Zotomou Kpoghomou ne mâche pas ses mots. Dans un entretien accordé à Africaguinee.com, le vice-président de l’ANAD s’est exprimé sur les derniers développements de l’actualité sociopolitiques. Cet acteur politique donne son analyse sur la « campagne » de débauchage de cadres de l’opposition. Il répond également au Premier ministre sur l’éventuelle candidature du Général Mamadi Doumbouya et la promesse d’un retour à l’ordre constitutionnel cette année. Entretien !!!
AFRICAGUINEE.COM : Le CNRD continue d’affaiblir les forces vives et ses partis membres en allant désormais piocher dans vos rangs. Comment comprenez-vous ces débauchages ?
Dr. ÉDOUARD ZOTOMOU KPGHOMOU : J’ai toujours eu du respect pour les formations politiques avec lesquelles nous sommes dans une coalition. C’est à elles justement de tirer les leçons et de prendre les dispositions. Mais la réalité, c’est que le départ de certaines grosses pointures au sein de ces partis n’a pas été suivi par un départ de militants. Les partis politiques, ce sont les militants. Si les gens quittent, vont d’eux-mêmes pour assouvir leur désir d’appartenir à la structure qui travaille aujourd’hui ou pas, ce qui est certain, c’est que si les militants ne suivent pas, c’est des départs qui sont pratiquement anodins. Ça n’apporte aucun mouvement.
Voulez-vous dire que ces débauchages n’auront pas de répercussions ?
Je ne suis pas en train de flatter quelqu’un : l’ancrage qui est (par exemple) à l’UFDG autour de Cellou Dalein, quand vous allez à l’extérieur avec lui, c’est en ce moment que vous allez vous en rendre compte. L’important pour lui, et c’est un ami, je lui ai dit de garder la tête froide. Parce que ces débauchages, ce sont des choses auxquelles il faut s’attendre. C’est si ces départs étaient suivis de départ de militants qu’il fallait craindre. Mais à partir du moment où, il n’y a pas de militants qui partent à la base, il faut relativiser. Les débauchages n’ont pas commencé aujourd’hui, surtout quand on utilise les ressources de l’État pour acheter la conscience des gens. Nous ne pensons pas que ce soit la façon de faire quand on veut vraiment corriger les erreurs du passé, parce que c’est ce qui se faisait avant.
Le Premier ministre a réitéré la promesse du Président martelant que cette année le retour à l’ordre constitutionnel sera effectif. Vous y croyez ?
On n’y croit pas. Vous ne pouvez pas organiser un référendum si vous n’avez pas de fichier électoral. Qui va voter pour le référendum ? Il faut une liste électorale, il faut un fichier qui servira de base pour confronter l’avis des uns et des autres. On parle des élections, mais dès que le président de la transition avait dit que toutes les élections se feraient cette année, quelques semaines après, il y a eu une contradiction notoire.
Des voix contradictoires au sein du Gouvernement sont venues dire non, il n’y aura qu’une seule élection. D’autres qui disent non, c’est à partir du premier semestre que nous allons organiser un référendum. En somme, qu’est-ce qu’il faut croire ? C’est ça la question. Nous, nous disons en réalité que le CNRD n’a jamais eu la volonté politique de pouvoir organiser des élections parce que ce n’est pas ce qui est en sa faveur.
Et, ils sont en train de tout faire pour que le monde extérieur, et même le monde intérieur, puisse croire qu’ils sont de bonne foi et qu’ils vont organiser des élections. Nous verrons ce qui va se passer, mais nous pensons qu’ils n’ont pas pris des dispositions pour pouvoir organiser des élections. Il y a quelques jours, on parlait de sit-ins dans certaines communes, où les agents du RAVEC sont en train de réclamer leur salaire.
Ça veut dire que le travail ne se fait pas. Et ça, c’est ce que nous connaissons. Et en réalité, puisqu’on est en train d’assujettir le processus de référendum à l’élaboration de ce RAVEC, ça veut dire qu’on ne sait même pas où on va. C’est ça la vérité.
Voulez-vous dire qu’entre les déclarations d’intention et les faits, il y a un fossé ?
Oui un fossé béant. Les intentions, tout le monde a des intentions. Mais quand les intentions ne se traduisent pas en actes concrets, ça veut dire qu’on est en train de pomper simplement de l’air chaud.
Le premier ministre Bah Oury a déclaré que si la constitution permet au Président Doumbouya d’être candidat, il n’y a pas de raison de le lui refuser. Et que s’il décide d’être candidat, il sera en phase avec lui. Comment comprenez-vous ces propos ?
Moi, je crois que ce sont des propos qui ne devraient pas venir du premier ministre. Parce que le général Doumbouya n’a pas juré sur la constitution. Il a juré sur une charte de transition qui élaborait tout, en incluant le processus même électoral. Cette charte avait mis au point effectivement une certaine structure dans l’organisation des élections. Alors, que le premier ministre sorte pour dire que c’est de son choix, moi je crois que c’est en contradiction fondamentale avec les positions qu’il a prises même avant aujourd’hui. Ce qui est contradictoire surtout c’est que nous avons dit : le Général est un officier.
Et en 2009-2010, sous une autre transition, monsieur Bah Oury aujourd’hui, qui s’est déguisé en directeur de campagne officieux de la candidature prochaine de Doumbouya, était catégoriquement opposé. Il ne devrait pas être celui qui fait des déclarations de ce genre. Parce qu’hier, il était opposé fondamentalement et il s’est battu becs et ongles justement pour ne pas que cela ait lieu.
Quand on dit que le contexte a changé, moi je crois que c’est de la mauvaise foi. Sinon, quelqu’un qui est venu au pouvoir par coup d’État et les conditions sont d’ailleurs dramatiquement différentes, on ne devrait pas faire de différences. Nous ne disons pas que le Général ne peut pas être président en Guinée. Nous disons que dans la foulée de cette transition, même si on change de Constitution, il doit honorer sa parole.
Nous disons qu’il faut être conséquent, il faut être cohérent. M. Bah Oury était le coordonnateur de l’organisation de manifestation du 28 septembre 2009, qui a débouché à ce que nous connaissons. S’il ne mesure pas justement la portée d’un tel événement sur des répercussions futures possibles, en ce moment, c’est lui seul qui va répondre. C’est ce que nous disons.
Nous pensons qu’il ne devrait pas le dire et ça ne dépend pas de la volonté du Général d’être candidat. C’est la charte qui a tout prévu. C’est pourquoi nous disons que le militaire, le soldat, c’est sa parole. Lui, il a juré sur la Bible et le Coran. Je crois que c’est textes sacrés avec lesquels il ne faut pas s’amuser. Quand on jure et on donne sa parole, on la respecte. Qui lui dit qu’il ne peut pas revenir après s’il le souhaite ? Personne ! Alors, qu’il respecte d’abord sa parole. Sinon, tout ce qu’ils diront, personne ne croira parce qu’ils n’ont même pas cru à ce qu’ils ont écrit eux-mêmes. La charte de la transition qui est en train d’être foulée au pied à tous les niveaux. Et ça, ça se voit.
Entretien réalisé par Boubacar 1 DIALLO
Pour Africaguinee.com
Créé le 10 mars 2025 09:45Nous vous proposons aussi
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