Coopération, visas, retour à l’ordre constitutionnel, disparition d’activistes, Médias : John Marshall, Ambassadeur du Royaume-Uni en Guinée, se confie à Africaguinee.com

CONAKRY- En marge d’un séjour de travail à Mali (Moyenne Guinée), John Marshall, Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire du Royaume-Uni en Guinée, a accordé un entretien à Africaguinee.com. Dans cette interview exclusive, le diplomate anglais, en poste en République de Guinée depuis fin Mars 2023, a abordé des sujets brûlants de l’actualité en Guinée. Avec Son Excellence John Marshall, nous abordons entre autres des questions de Coopération, de droits humains, de démocratie et du processus du retour à l’ordre constitutionnel en Guinée.

AFRICAGUINEE.COM : Vous êtes l’Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire du Royaume-Uni en Guinée. Dans quel cadre êtes-vous à Mali Yembering, dans la région du Fuuta ?

SE JOHN MARSHALL : Merci beaucoup, nous soutenons un projet à Mali, nous travaillons avec une association, dénommée « Mali Chez Moi » qui m’a vraiment impressionné. Ils sont très professionnels, très actifs et très dynamiques. Donc, nous avons décidé de financer un projet de formation d’une centaine de jeunes et femmes à peu près dans l’entreprenariat. La raison de notre séjour c’est de rendre visite à l’équipe qui a organisé ce projet, et voir ce qu’ils font sur le terrain.

Les ambassades défendent les intérêts de leurs pays et s’intéressent beaucoup aux questions de coopération. La Guinée étant en transition actuellement, quels sujets abordez-vous souvent avec les membres du gouvernement ?

 J’ai le plaisir de rencontrer des ministres du gouvernement assez régulièrement. Tout récemment, j’étais à Londres pour un forum sur le commerce et l’investissement entre le Royaume-Uni et 9 pays francophones d’Afrique de l’Ouest et du Centre. Des Ministres guinéens ont pris part à cette rencontre notamment la ministre du commerce, de l’industrie et des PME, le ministre du plan et de la coopération internationale et le ministre secrétaire à la primature. Nos discussions, c’est souvent comment renforcer les relations économiques et sociales à travers nos deux pays à partir de nos institutions de financement pour le développement. Nous avons aussi échangé sur comment aider la Guinée à exporter vers le Royaume-Uni. Après notre sortie de l’Union Européenne, nous avons mis un cadre réglementaire très propice aux exportations de la Guinée et des autres pays en voie de développement, un mécanisme qui leur permet d’exporter des produits agricoles.

En marge de cet évènement nous avons travaillé avec L’AGUIPEX (Agence Guinéenne de Promotion des Exportations) pour faire connaître aux participants à ce forum, le Fonio. Il y a des produits guinéens qui sont très connus dans le monde, parce que certaines espèces sont cultivées partout, c’est comme le Café, le Cacao, les mangues, les ananas, mais  le fonio, la Guinée est le premier producteur de fonio mais ce n’est très connu surtout dans les pays occidentaux mais il sera bien connu parce que le fonio est très nutritif, il est très résilient aussi au changement de climat, ça va être très important dans l’avenir. Je pense que nous allons voir comment développer le fonio au Royaume-Uni.

Au-delà des questions de commerce et d’investissements, est-ce que vous abordez des sujets politiques et des droits de l’homme ?

Bien évidemment avec quelques ministres comme celui des affaires étrangères, de l’intégration africaine et des guinéens établis à l’étranger. Je soulève des questions internationales mais aussi la situation politique ici en Guinée et des questions des droits de l’homme.

La transition se prolonge en Guinéee. De quelle manière encouragez-vous les autorités à franchir ce moment ?

Sur la situation politique, nous sommes, comme vous le savez, un pays (Le Royaume-Uni NDLR) démocratique. La démocratie est la meilleure forme de gouvernance. Je pense que les guinéens ont la même pensée, c’est évident que beaucoup de guinéens attendent avec impatience le retour à l’ordre constitutionnel ; les autorités y travaillent. Il y a eu un glissement de calendrier sur lequel ils se sont mis d’accord avec la CEDEAO. On voit que maintenant la première étape sera un référendum sur l’avant-projet de la constitution. Nous avons un avant-projet qui a été vulgarisé dans toutes les préfectures de la Guinée. Je ne sais pas exactement ce qui se passe maintenant, mais je pense que bientôt cet avant-projet sera finalisé et sera prêt pour le référendum. Après il faut un fichier électoral. Je le dis souvent au gouvernement guinéen, c’est une bonne idée de donner un peu plus de visibilité au calendrier électoral. Nous avons beaucoup de guinéens à l’intérieur du pays qui se demandent : à quand le référendum constitutionnel ou les élections présidentielles ? Il y a beaucoup de gens aussi à l’extérieur du pays qui posent la même question.

Souvent ce sont des investisseurs potentiels surtout les banques, des acteurs économiques internationaux très importants. Ce sont des investisseurs étrangers que les autorités guinéennes veulent attirer. Toutes ces entités se demandent ce qui se passe, quel est le calendrier en cours ? Ils ont des conseils d’administration, beaucoup sont dans les bourses principales du Monde, il faut qu’ils justifient les investissements à leurs actionnaires, à leur conseil d’administration. Ils discutent beaucoup sur les questions de risque. De nombreux facteurs contribuent au risque, des facteurs économiques, des facteurs politiques. Les investisseurs sont beaucoup rassurés par l’ordre constitutionnel, des gouvernements qui sont élus, ils sont aussi rassurés par un Etat de droit. Je pense que c’est une bonne chose que les préparations que le gouvernement guinéen, les autorités guinéennes font en ce moment pour boucler la transition. Que le processus avance efficacement afin que la transition soit finie avant la fin de 2025 au plus tard.

Africaguinee.com : Les enlèvements sont fréquents ces derniers temps en Guinée. Le cas Foniké Mengue et Billo Bah bientôt 5 mois sans aucun signe de vie et récemment c’est un journaliste, Habib Marouane Kamara qui a enlevé.  Quel est votre regard sur cette situation ?

Nous venons de célébrer la journée internationale des droits de l’homme. Bien évidemment, c’est un moment pour réfléchir sur la situation, les défis pas seulement en Guinée mais partout dans le Monde. C’est vrai qu’en Guinée, il y a eu la disparition de quelques individus, quelque chose qui est préoccupant. J’ai beaucoup d’émotions pour les familles des disparus, leurs épouses, les enfants qui ne savent pas où est papa. Foniké Mengue et Billo Bah, je les connais personnellement ; si vous connaissez quelqu’un et qu’une situation difficile lui arrive on s’inquiète vraiment. J’ai entendu les explications du gouvernement guinéen, il rassure qu’il n’est pas du tout impliqué, les autres membres de la communauté internationale ont eu la même préoccupation, j’espère qu’il y aura une enquête approfondie qui va révéler où ils sont. Nous espérons qu’ils se seront retrouvés pour être à nouveau aux côtés de leurs familles respectives.

Avant ces disparitions des médias privés qui couvrent tout le territoire ont été fermés. Au-delà du chômage, c’est un coup dur pour la liberté d’expression. Quelle est votre lecture ?

La liberté d’expression est quelque chose qui est très important. Vous savez sans doute que nous avons au Royaume-Uni un monde médiatique qui est très dynamique, qui pose des questions ouvertes, qui lance le défi à tout le monde, le gouvernement, le secteur privé, la société civile. C’est bon d’avoir ces genres de débats. A mon avis, la liberté d’expression est quelque chose qui donne la vie à la démocratie, un environnement sain et propice pour le développement et la croissance.  Bien évidemment il faut que les médias soient responsables mais il y a beaucoup de façons de gérer. A mon arrivée en Guinée, j’ai été impressionné par les débats qu’on pouvait écouter sur plusieurs chaînes de télévisions et de radios, moi-même j’ai participé pas forcément dans les débats politiques mais d’autres programmes aussi importants, nous parlions de notre programme de bourses, j’ai eu à parler souvent des évènements au Royaume-Uni notamment sur le couronnement de notre nouveau roi au pays. Donc un média libre et vibrant c’est une bonne chose pour un pays.

Nous allons aborder les procédures de demande de visa qui sont longues et éprouvantes. Beaucoup de demandes sont rejetées. A l’Ambassade d’Angleterre en Guinée, à combien pouvez-vous estimer le nombre de demandes de visas ?

Je sais que les guinéens ne sont pas satisfaits, ils vont jusqu’à Freetown pour donner la biométrie. Notre système, l’application se fait en ligne, une société privée gère la prise de la biométrie suite à des décisions venues des agents de l’immigration au Royaume-Uni. Ce n’est pas un cas particulier à la Guinée, c’est propre à tous les pays. Sur les 54 pays de l’Afrique, nous couvrons la moitié. Comme vous venez de le dire, c’est plutôt lié à la demande. C’est vrai aussi, le fait qu’il faut aller à Freetown pour donner la biométrie, cela fait que la demande baisse un peu en Guinée mais il y a de plus en plus de guinéens qui voyagent au Royaume-Uni. La semaine dernière, je pense qu’il y a une soixantaine de guinéens qui ont participé au Forum dont je viens de parler, il parait que la demande augmente là où les centres sont figés pour toujours, il y a la possibilité dans l’avenir qu’un centre soit ouvert ici à Conakry. Mais ce n’est pas dans le court terme, je travaille aussi de mon côté pour que le projet se réalise. 

A suivre !

Entretien réalisé par Alpha Ousmane Bah

Pour Africaguinee.com

Tel : (+224) 664 93 45 45

Créé le 16 décembre 2024 10:10

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