Cellou Dalein Diallo : Pourquoi Alpha Condé a peur des élections ?
CONAKRY- Le chef de file de l’Opposition et président de l’Union des Forces Démocratiques de Guinée se pose bien des questions sur l’enlisement de crise guinéenne. Cellou Dalein Diallo qui a passé en revue les causes profondes de la crise politique actuelle, appelle au concours de toutes forces de nation « la presse y compris » pour sortir de cet imbroglio.
Nous vous proposons en intégralité le discours de l’opposant recueilli chez lui le lundi 4 mai, le jour de la manifestation appelée par l’opposition.
Pourquoi notre Alpha Condé a peur des élections ?
« Personne ne se pose des questions pourquoi M. Alhassane Ouattara (président de la Côte d’Ivoire) a organisé les législatives chez lui sans qu’aucun ivoirien n’ai eu besoin de marcher. Au Niger, M. Issoufou a organisé les communales et les législatives à bonne date, les nigériens n’ont pas eu besoin de marcher pour ça. Au Mali malgré la situation sécuritaire, au Sénégal ça été la même chose. Nous, en Guinée pour obtenir les législatives, on a été obligé de marcher pendant deux ans et demi. Et perdre 57 citoyens guinéens sans qu’aucune enquête ne soit menée, sans qu’aucune sanction administrative ne soit prise à l’endroit des forces de l’ordre qui ont tiré à bout portant sur ces jeunes. Pourquoi notre Alpha Condé a peur des élections ? Les élections législatives auraient dû se tenir au mois mars 2011, la communauté internationale était prête à nous accompagner, il a refusé. Les mandats des élus locaux sont échus depuis 2010, mais il faut encore appeler la communauté internationale, marcher, se faire gazer, tuer, arrêter, emprisonner pour avoir des élections qui ne se tiennent jamais à bonne date.
Bon Dieu, on n’aime pas les marches…
On doit se poser la question de savoir pourquoi tous les pays que j’ai cités n’ont pas eu besoin d’une manifestation de leurs citoyens pour que la loi soit respectée. Nous avons revendiqué, nous avons eu des accords politiques qui ont été signés (3 juillet 2013 et 9 juillet 2014) au terme desquels accords, à chaque fois la Ceni et le Gouvernement se sont engagés à organiser les élections communales. Mais pourquoi notre pays est si spécial au point qu’aujourd’hui encore, il faut un dialogue pour organiser des élections. Est-ce que cela est normal ?On a l’impression que l’Opposition cherche la violence. Bon Dieu, on n’aime pas les marches. Parce qu’on a tout fait pour obtenir le dialogue et aplanir nos divergences. Mais personne n’interpelle Alpha Condé et son Gouvernement sur le pourquoi il n’a pas organisé les élections à bonne date.
Mettons-nous ensemble pour défendre le droit…
Il faut qu’on marche, vous-mêmes les journalistes subissez les violences. Aujourd’hui (lundi 4 mai, jour de manifestations, ndlr), on vous (les journalistes) interdit d’aller sur l’axe pour ne pas que vous couvriez les violences que les forces de l’ordre sont en train d’exercer sur les pauvres citoyens. Les tirs à balles réelles que nous enregistrons à toutes les heures. Aujourd’hui, il y a un citoyen qui est entre la vie et la mort parce qu’on a tiré sur son dos, la balle a traversée pour atteindre ses boyaux. Mais Mettons-nous ensemble (journalistes, société civile, partis politiques) pour défendre le droit. Ce n’est pas normal qu’on soit obligé de faire appelle à la communauté internationale pour organiser des élections.
Mais qu’est-ce qu’Alpha veut pour ce pays ?
Vous avez vu l’arsenal qui est déployé à mon domicile. Les militants souhaitent que je vienne, mais on me prive de mes droits, de ma liberté que je ne peux pas exercer. Parce que c’est ça aussi la nature du régime d’Alpha Condé. L’image que la Guinée donne aujourd’hui, cet état de guerre avec tous ces camions militaires, des bérets rouges sur l’autoroute déployés partout, c’est honteux pour nous, si on ne peut pas s’asseoir autour de la table en adulte, discuter ! Lorsqu’on s’est retrouvé au dialogue présidé par le ministre de la justice on est tombé d’accord. Mais les engagements pris n’ont pas été respectés. Le lendemain, Alpha Condé a dit qu’il n’est pas question de signer le relevé des conclusions, alors qu’il était représenté là par cinq ministres et tout l’Etat-major du RPG. En Guinéens, on s’est mis d’accord, sauf lui. Mais qu’est-ce qu’il veut pour ce pays ?
Quelle malédiction s’abat sur nous comme ça ?
Lorsque nos ministres rivalisent d’ardeurs pour nier ce qu’ils ont fait, alors que toute la communauté internationale et le médiateur qu’ils ont désigné ont confirmé ce qui a été signé, mais c’est une honte pour la Guinée! On a discuté pendant 3 heures, on a décidé qu’il faut organiser les communales avant le 31 mars 2014, rien n’a été fait. Lors du dialogue sous la présidence du ministre de la justice, la CENI a reconnu qu’elle n’a pas pu appliquer cette disposition de l’accord mais qu’elle ferait tout pour l’appliquer avant la fin de l’année 2014. Rien n’a été fait. Mais on est dans quel Etat ? Quelle malédiction s’abat sur nous comme ça ? On a des gens qui ne veulent pas la paix !
Le calendrier de la CENI viole cinq textes essentiels…
Aujourd’hui, ce calendrier de la CENI viole cinq textes essentiels. La Constitution dit que les collectivités sont administrées par des élus. Mais aujourd’hui, elles sont administrées des gens nommés. Deuxièmement le code des collectivités dit qu’une délégation spéciale a un mandat de six mois. Le code électoral, l’accord du 3 juillet 2013, l’accord du 9 juillet 2014, le protocole de la CEDEAO sur la bonne gouvernance et les élections sont tous violés. La CENI viole toutes ces dispositions. Elle n’a pas le droit de violer un accord politique. Si elle ne peut pas l’appliquer, elle expose les motifs et les contraintes auxquels elle est confrontée pour qu’ensemble on modifie l’accord politique, dans le cadre d’un autre dialogue politique.
Les manifestations nous coûtent chères…
Mais ici on ne veut ni appliquer les accords du dialogue ni appliquer les lois. On dit que c’est l’opposition qui est violente, qui envoi les enfants dans la rue. Soyons objectif. Les manifestations nous coûtent chères, nous perdons des âmes, la vie des citoyens guinéens, des gens sont blessés, emprisonnés, des gens sont handicapés à vie. Mais lors qu’on est avec un gouvernement irresponsable comme celui-là, qui ne veut pas de dialogue et qui ne veut pas appliquer les accords politiques signés, qu’est-ce qu’on fait ? Je vous remercie ».
Propos recueillis par Diallo Boubacar 1
Pour Africaguinee.com
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Créé le 5 mai 2015 23:05Nous vous proposons aussi
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