Cas Aliou Bah : « Ses droits seront respectés… » assure Fallou Doumbouya

Alors que le procès en appel d’Aliou Bah, leader du parti MoDeL, a été renvoyé ce mercredi dans un climat de tension, le procureur général près la Cour d’appel de Conakry s’est exprimé sur les événements du jour devant un groupe de journalistes, dont un reporter d’Africaguinee.com. Le magistrat Fallou Doumbouya a apporté des explications sur cette audience particulièrement agitée marquée surtout par le retrait des avocats de la défense. Il promet que les droits de l’accusé seront respectés.

AFRICAGUINEE.COM : Monsieur le Procureur, l’audience de ce mercredi a été marquée par l’expulsion de journalistes et de militants d’Aliou Bah de la salle d’audience. Que s’est-il réellement passé ?

FALLOU DOUMBOUYA : Merci pour l’opportunité que vous nous offrez de nous exprimer sur l’actualité qui prévaut actuellement en Guinée, notamment dans le secteur judiciaire.

Vous vous souviendrez que lors des audiences précédentes, notamment celles du 26 mars et du 9 avril 2025, dans le cadre de la procédure opposant le ministère public à Monsieur Mamadou Aliou Bah — condamné pour diffamation et offense au chef de l’État —, la défense et le parquet avaient respectivement demandé, d’un côté, la médiatisation du procès, et de l’autre, la tenue du huis clos. La cour n’a accédé à aucune de ces requêtes.

Cependant, elle a interdit l’introduction de tout appareil permettant de capturer, transmettre ou diffuser des images ou du son, conformément aux dispositions de l’article 399 du Code de procédure pénale. Il s’agit d’un arrêt insusceptible de recours. L’article 41 dudit Code confère au parquet général près les cours d’appel de Conakry ou de Kankan la responsabilité de veiller à l’application stricte des décisions de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. C’est dans cette logique que nous avons pris des mesures pour empêcher toute introduction d’appareils dans la salle d’audience.

Il n’y a donc rien d’illégal. Et je tiens à vous rassurer : tous les droits de Monsieur Mamadou Aliou Bah seront respectés. La Guinée a souscrit aux grands instruments juridiques internationaux. Elle est membre de l’ONU, a ratifié la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966, ainsi que la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples de 1981. Elle dispose aussi d’une Charte de la transition, et l’article préliminaire du Code de procédure pénale garantit un certain nombre de droits à toute personne poursuivie par la justice.

Certes, nous sommes en position de poursuite, mais nous avons l’obligation légale de veiller au respect des droits des prévenus. Nous avons d’ailleurs été surpris de constater que, dès avant le début de l’audience, les avocats de la défense ont refusé d’entrer dans la salle pour que le débat se tienne de manière publique et contradictoire, avant de se retirer. Qu’à cela ne tienne, l’affaire est renvoyée au 22 avril pour la poursuite des débats, avec, éventuellement, les réquisitions et les plaidoiries.

Mais je vous le dis déjà : les droits de Monsieur Mamadou Aliou Bah seront respectés, dans leur esprit comme dans leur lettre.

Monsieur le Procureur, on a vu dans la salle une cinquantaine de jeunes. Lorsqu’ils sont sortis après l’audience, ils proféraient même des menaces à l’extérieur. On a aperçu certains en train de percevoir de l’argent. Qui sont-ils ?

Rassurez-vous, ce que je peux vous dire, c’est que lorsque vous parlez de paiements, vous l’apprenez de la même manière que nous. L’accès à la salle d’audience est public. Certes, nous avons pour mission de garantir la sécurité et la sérénité dans l’enceinte du palais de justice.

Mais affirmer que telle ou telle personne a été payée, ou que telle autre a fait venir des individus, nous l’ignorons totalement. C’est une audience publique. Nous avons simplement demandé que la sérénité des débats soit assurée. Si une personne entre calmement et sans attitude menaçante, nous n’avons légalement aucun motif de l’empêcher d’y assister.

C’est vous, journalistes, qui me rapportez qu’un paiement aurait eu lieu. Je n’en sais rien. C’est donc à vous de mener l’enquête et de m’apporter les preuves, puisque cela relève de votre travail.

Monsieur le Procureur, pourquoi le huis clos à ce stade du procès ?

J’avoue que le huis clos a été demandé par le ministère public. La cour a tranché. La décision est devenue définitive et insusceptible de recours. C’est tout.

 Qu’est-ce qui explique le changement de salle d’audience ?

Le changement de salle d’audience s’explique par des raisons d’organisation interne. La Cour d’appel de Conakry constitue, en quelque sorte, le centre névralgique des juridictions de la Basse et de la Moyenne-Guinée. Nous y tenons un grand nombre d’audiences chaque semaine.

Nous avons estimé qu’il fallait que le procès se tienne dans une salle exclusivement dédiée à cette affaire. Pendant que ce procès se tenait, d’autres audiences avaient lieu dans la même grande salle. Nous disposons de trois salles d’audience ici. L’organisation interne nous impose de répartir les dossiers en fonction de leur nature et de la disponibilité des espaces.

Actuellement, le tribunal du travail n’a pas de local propre. Le tribunal pour enfants non plus. À la Cour d’appel, nous avons onze chambres : une chambre criminelle, deux chambres correctionnelles, cinq ou six chambres civiles, la chambre présidentielle, et les procédures de référé.

Avec seulement trois salles, nous devons nous organiser de manière à ne pas pénaliser les justiciables qui viennent parfois de très loin — Koundara, Mali, Mamou, Boké, etc. Il ne serait pas acceptable qu’ils fassent tout ce chemin sans que leur dossier ne soit examiné.

C’est donc pour cela que nous avons décidé que l’affaire de M. Bah soit jugée dans une salle dédiée. Et quand nous avons constaté que cette salle était trop exiguë pour accueillir tout le monde, nous avons finalement ouvert toute la salle.

Monsieur le Procureur, est-ce que vous tendez la main aux avocats de la défense, puisqu’ils ont décidé de se retirer de l’audience ?

Officiellement, nous n’avons pas été informés de leur retrait. Donc je ne peux pas me prononcer sur ce point.

À quoi faut-il s’attendre le 22 avril ?

Je répète : officiellement, nous n’avons pas été saisis d’une quelconque information sur ce sujet. En ce qui concerne la suite, c’est à la cour de décider. Nous représentons le ministère public dans ce procès, mais c’est à la Cour qu’il revient de trancher.

Cela signifie-t-il que le procès va se poursuivre à cette date ?

Naturellement, nous serons présents pour jouer notre rôle. Mais affirmer que le procès va effectivement se poursuivre dépendra de la décision souveraine de la cour, pas du ministère public.

Le même dispositif sécuritaire sera-t-il reconduit pour l’audience du 22 avril ?

 La loi relative au maintien de l’ordre public donne aux autorités judiciaires le pouvoir de prendre toutes les dispositions nécessaires pour garantir la sécurité dans l’ensemble des cours et tribunaux. C’est une loi votée en 2015, publiée au Journal officiel, et elle s’applique à tous sans exception.

Propos recueillis par Ouma Bady Diallo

Pour Africaguinee.com

Créé le 16 avril 2025 21:26

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