Transformer la croissance en développement inclusif: La Banque Mondiale fait des recommandations au Gouvernement guinéen…

CONAKRY – Ce mardi 1er juillet 2025, le Groupe de la Banque Mondiale, en partenariat avec le gouvernement guinéen, a organisé à Conakry la deuxième édition de l’atelier de dissémination du Rapport de suivi de la situation économique en Guinée. L’événement, placé sous le thème « Mobilisation et gestion des ressources intérieures pour un développement inclusif et durable », a mis en lumière une réalité économique complexe : malgré une croissance robuste, la Guinée peine à traduire cette dynamique en réduction de la pauvreté et en création d’emplois.
Le rapport de cette année offre une analyse approfondie de l’évolution macroéconomique du pays, examinant comment la Guinée peut accroître la mobilisation et la gestion de ses ressources intérieures pour atteindre ses objectifs de développement. Il se penche également sur les tendances économiques récentes, les perspectives à moyen terme et propose des réformes concrètes pour renforcer la capacité de l’État à financer son propre développement.
Au cours de l’atelier, il a été souligné que la croissance du PIB (produit intérieur brut) de la Guinée a été en moyenne de 5,2 % de 2019 à 2024, principalement tirée par l’industrie minière. Cette croissance devrait même se renforcer à moyen terme avec l’entrée en production du minerai de fer de Simandou.
Cependant, comme l’a expliqué Issa Diaw, représentant pays de la Banque Mondiale en Guinée, cette croissance robuste du PIB de la Guinée ne s’est pas automatiquement traduite par une création d’emplois ou une réduction de la pauvreté. “La croissance n’a pas été aussi inclusive qu’on aurait pu l’espérer et le taux de pauvreté reste élevé », a-t-il constaté. C’est ce que M. Diaw a appelé le « paradoxe guinéen”, c’est-à-dire une croissance économique robuste, mais une pauvreté persistante, une transformation structurelle lente et une dépendance au secteur extractif.
Mobilisation des ressources intérieures
Un message clé de ce rapport est l’impératif pour la Guinée de satisfaire ses besoins de développement par une mobilisation accrue et une gestion optimisée de ses ressources intérieures. Actuellement, les recettes fiscales ne représentent que 13% du PIB, un niveau inférieur au seuil de 15% jugé nécessaire pour soutenir une croissance à long terme, et bien en deçà de l’objectif de convergence de 20% de la CEDEAO. Cette faiblesse limite considérablement la capacité de l’État à financer des services publics de qualité.
« Le paradoxe guinéen est donc clair : Une croissance économique robuste, mais une pauvreté persistante, une transformation structurelle lente et une dépendance au secteur extractif. L’un des messages clés de ce rapport est que la Guinée ne pourra satisfaire ses besoins de développement sans une mobilisation accrue et une gestion optimisée de ses ressources intérieures. Aujourd’hui, les recettes fiscales représentent seulement 13% du PIB. Un niveau inférieur possède 15% considéré comme nécessaire pour soutenir une croissance à long terme, mais bien en-dessus de l’objectif de convergence de 20% de la CEDEAO. Cela limite fortement la capacité de l’État à financer des services de qualité (…). Le déficit budgétaire s’est creusé en 2024. Tandis que la dette publique a augmenté avec une croissance de dette intérieure moins concessionnaire, les marges de manœuvre budgétaire sont donc sous pression« , a expliqué Issa Diaw, représentant pays de la Banque mondiale en Guinée.

Face à ce constat, le rapport insiste sur l’urgence de mettre en œuvre un ensemble cohérent de réformes, notamment :
- Renforcer la coordination et l’échange d’informations entre les parties prenantes impliquées dans la fiscalité.
- Moderniser l’administration fiscale pour accroître son efficacité, sa transparence et sa gestion des dépenses publiques.
Issa Diaw a rappelé l’importance de ces mesures : « »Je pense que c’est une priorité, vu l’évolution géopolitique mondiale, de pouvoir compter sur ses propres ressources. Le développement économique durable de la Guinée dépendra en grande partie de sa capacité à tirer pleinement parti de l’opportunité que représente son secteur minier en pleine croissance, en particulier avec la mise en production prochaine de Simandou, tout en évitant les pièges classiques liés aux ressources naturelles. Il faudra pour cela combiner stabilité économique, bonne gouvernance, réformes fiscales courageuses et investissement stratégique dans les infrastructures, le développement humain en général, donc la santé, l’éducation et la protection sociale, tout en améliorant le climat des affaires. Cela permettra évidemment de réaliser la diversification de l’économie tant attendue qui devrait permettre d’impacter réellement le niveau de pauvreté et d’avoir une croissance inclusive« , a préconisé le représentant pays de la Banque mondiale en Guinée.
M. Issa Diaw a réaffirmé l’engagement de la Banque Mondiale à soutenir la Guinée à travers des projets structurants, des analyses stratégiques et un dialogue politique constructif, avec un prochain rapport sur le climat et le développement qui viendra compléter cette vision.
Recommandations
Le rapport propose plusieurs pistes pour améliorer la mobilisation et la gestion des ressources intérieures. Il invite les autorités à accélérer les réformes dans des domaines clés :
- Renforcer les capacités de la Direction Générale des Impôts pour augmenter les recettes fiscales par l’application complète du Code des impôts.
- Renforcer le dispositif guinéen en matière de prix de transfert, notamment en adoptant le principe de pleine concurrence.
- Améliorer la gestion des investissements publics en facilitant la mise en œuvre du décret récemment adopté.
- Optimiser l’efficacité des dépenses et la viabilité financière des secteurs de l’électricité et de l’eau en appliquant des tarifs couvrant les coûts d’exploitation (avec un tarif social pour les plus vulnérables).
- Envisager la création d’un fonds pilote de développement et de stabilisation avec des critères clairs de financement et d’utilisation.
Dr. Mamoudou Touré, Secrétaire Général du ministère de l’Économie et des Finances, a salué le partenariat stratégique avec la Banque Mondiale.
Il a souligné que « le groupe de la Banque Mondiale est le premier portefeuille en termes d’engagement dans notre pays. » M. Touré a également mis en évidence la nécessité d’efforts supplémentaires pour mobiliser des ressources internes, surtout compte tenu de la raréfaction des financements internationaux.
Ahmed Kanté, ancien ministre des Mines et de la Géologie et Vice-président du patronat guinéen, a abondé dans le même sens, insistant sur le rôle du secteur privé comme moteur du développement. Il a évoqué le concept de « contenu local », qui vise à assurer que les entreprises privées guinéennes bénéficient d’une part significative des investissements dans les grands projets, notamment miniers.
Dansa Camara
Pour Africaguinee.com
Créé le 2 juillet 2025 10:05Nous vous proposons aussi
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