Lutte contre les VBG : L’ONG F2DHG renforce les capacités des acteurs de la chaîne de prise en charge à Labé…

LABÉ – Trois jours d’activités intenses ont récemment mobilisé les acteurs de la chaîne de prise en charge des cas de violences basées sur le genre (VBG) à Labé. Deux de ces journées ont été consacrées à la formation de professionnels issus de divers secteurs : santé, justice, sécurité, société civile, ainsi que des leaders communautaires et religieux.
L’initiative est organisée par l’ONG Femmes Développement et Droits Humains en Guinée (F2DHG), avec le soutien financier de IPPF AFRICA (International Planned Parenthood Federation, Région Afrique) à travers l’initiative « Feminist Opportunities Now ». Cette formation visait à renforcer les capacités des participants pour une meilleure prise en charge et prévention des VBG sur le terrain.
La lutte contre les violences basées sur le genre demeure un combat de longue haleine. D’où la nécessité d’outiller les acteurs clés avec des connaissances pratiques et théoriques adaptées aux réalités locales.
Les activités se sont déroulées sous le thème : « Renforcement des capacités des acteurs de la chaîne et organisation d’un dialogue communautaire pour la lutte contre les VBG en milieu communautaire ».
La formation s’est tenue au siège de la FMG, dans le quartier Tata, tandis que le dialogue intergénérationnel s’est déroulé au Musée du Fouta, réunissant différentes couches sociales pour échanger autour des mécanismes de prévention et de réponse aux violences faites aux femmes et aux filles.
« Si vous ne connaissez pas les termes, vous ne maîtrisez pas vos limites dans l’accompagnement des survivantes de VBG, les erreurs seront inévitables. C’est pourquoi nous sommes venus outiller les acteurs de la chaîne de prise en charge à travers cette formation, qui leur a permis de monter eux-mêmes une planification dans un plan d’action qu’ils vont dérouler pendant le reste de l’année 2025.
L’autre objectif est de renforcer les méthodes de collaboration entre ces différents acteurs. Il faut se dire et comprendre qu’il n’y a pas suffisamment de synergie d’actions entre eux. Quand vous prenez, par exemple, la prise en charge médicale, elle peut se faire, mais elle ne se limite pas à cela : il faut aussi un accompagnement judiciaire, psychosocial, ainsi qu’une bonne connaissance des méthodes de référencement. C’est tout ce que nous avons fait pendant les deux jours de formation.

Nous avons terminé par le dialogue intergénérationnel, en réunissant des jeunes, des adultes, des moins âgés et des plus âgés pour un partage d’expériences : comment juguler ce phénomène ? Comment mettre un terme, ou du moins réduire, les violences basées sur le genre que nous vivons au quotidien ?
Le témoignage du procureur de Labé est saisissant : sur 50 dossiers de VBG jugés en deux ans, 30 concernent particulièrement le viol. Cela signifie que le viol représente à lui seul 60 % de tous les jugements rendus. C’est un peu effrayant.
Si vous écoutez les OPJ à propos des cas qu’ils reçoivent, vous comprendrez que nous avons raison d’agir et de former les acteurs. Il y a urgence sur le terrain, à partir du moment où vous rencontrez des cas d’inceste, des parents qui abusent de leurs enfants, ou bien des mineurs qui tentent de violer des personnes plus âgées. Parfois même, ce sont des jeunes qui abusent de leurs parents.
L’urgence, c’est de parler aux communautés pour qu’elles se débarrassent de la violence dans l’éducation des enfants. Parfois, nous exerçons de la violence sur nos enfants en confondant l’éducation avec les coups, alors que le dialogue et la communication peuvent mieux éduquer. La privation de sortie ou de télévision peut parfois éduquer un enfant mieux que la chicotte », déclare Moussa Yéro Bah, présidente de L’ONG Femmes, Développement et Droits Humains en Guinée(F2DHG).
Des experts en la matière, des autorités administratives et religieuses de Labé, des agents de santé, de la justice, des forces de défense et de sécurité ainsi que de nombreux activistes ont pris part à l’atelier.
« Avec cette diversité, nous avons tout de même identifié les différents cas de violences basées sur le genre à Labé. Pour ce travail, nous nous sommes appuyés sur les rapports d’activités, puis nous avons analysé les causes avant d’identifier les solutions permettant de réduire la prévalence. Les actions retenues ont été intégrées dans un plan d’action couvrant les huit mois restants de l’année 2025.
Ma satisfaction est totale, car au départ, je ne m’attendais pas à de tels résultats. J’ai découvert d’excellents cadres et acteurs qui ont partagé leurs expériences, ce qui a facilité le bon déroulement de l’atelier.

Nous avons également formulé des recommandations pour garantir des résultats. Parmi elles figurent la finalisation et la budgétisation des plans d’action élaborés, ainsi que le renforcement des mécanismes de coordination et de collaboration entre les acteurs de la chaîne de lutte contre les VBG. En tout cas, nous sommes confiants quant à l’obtention de bons résultats d’ici la fin de l’année », explique le facilitateur, Docteur Robert Sarah Tambalou, consultant indépendant, spécialiste en santé sexuelle et reproductive, gouvernance des ONG, gestion des projets et santé communautaire.
À l’image de nombreuses femmes, Aissatou Diouldé Baldé a pris part aux activités de renforcement des capacités des acteurs de la chaîne de prise en charge des VBG, ainsi qu’au dialogue communautaire pour la lutte contre ces violences en milieu communautaire. Elle envisage désormais de rejoindre l’ONG « Femmes, Développement et Droits Humains en Guinée (F2DHG) ».

« J’ai appris énormément de choses liées aux violences basées sur le genre. Certes, nous avions quelques notions, mais cet atelier va nous permettre d’agir plus efficacement sur le terrain, en tant que femmes et témoins des VBG. Nous avons notamment découvert des aspects liés à la prise en charge, mais aussi à l’impunité qui entoure souvent ce phénomène. Je compte désormais m’engager pleinement dans cette lutte. C’est pourquoi j’ai décidé d’adhérer à l’ONG F2DHG, afin de travailler avec eux et contribuer activement à la lutte contre les VBG », a-t-elle déclaré.
Parmi les panélistes ayant pris part au dialogue communautaire intergénérationnel tenu au Musée du Fouta figurait Tiguidanké Diallo, membre de l’ONG ARCC (Appui à la Résolution des Conflits Conjugaux) et vice-présidente du Conseil régional des filles de Labé. Elle se dit ravie des échanges qu’elle qualifie d’enrichissants :

« C’était une forme de sensibilisation qui a permis de dresser l’état des lieux des violences basées sur le genre à Labé, dans le but de trouver des pistes de solutions pour freiner ce phénomène. Ces échanges ont été très enrichissants. Grâce à ces partages d’expériences, je compte poursuivre la lutte avec encore plus de détermination, dans l’espoir que les choses évoluent positivement. Même si les cas de violences sont encore fréquents, je garde espoir qu’avec cette mobilisation, des résultats concrets et favorables seront obtenus. »
La police et la gendarmerie, représentées à l’atelier, repartent avec de nouvelles connaissances après avoir partagé leur expérience dans la gestion des dossiers de VBG au sein de leurs unités respectives. Le capitaine Kabinet Keita, en service à l’OPREGEM de Labé, se dit particulièrement marqué :

« Je suis vraiment satisfait de ces échanges. Après cette formation, je repars avec un bagage intellectuel enrichi et des acquis nouveaux. En tant qu’acteurs confrontés à ces fléaux au quotidien, nous savons désormais comment mieux réagir face à une infraction liée aux violences basées sur le genre. Certes, nous faisions déjà beaucoup de choses, mais aujourd’hui, nous disposons d’outils supplémentaires pour mieux mener les procédures. Qu’il s’agisse de viol ou d’autres formes de VBG, ma collègue gendarme et moi sommes désormais capables de mettre en œuvre les méthodes apprises pour une prise en charge plus efficace. Nous commencerons par mettre la victime en confiance, puis nous traiterons son cas avec professionnalisme afin de lui permettre de recouvrer ses droits. Grâce à ces échanges, nous sommes désormais mieux outillés.»
La justice a également été mise à contribution pendant les trois jours d’ateliers et de dialogue communautaire. Me Mariama Alpha Diallo, greffière au Tribunal de première instance de Labé, explique :

« Nous avons échangé autour de plusieurs thématiques, notamment celles liées aux violences basées sur le genre. Pour ce qui concerne le secteur de la justice, nous avons particulièrement abordé les cas récurrents de viol, même si les VBG englobent un champ plus large : violences conjugales, mutilations génitales féminines, etc. Grâce à la collaboration avec la police et la gendarmerie, trois activités ont été planifiées pour les six prochains mois. Il s’agit notamment de la sensibilisation sur les conséquences des viols, de la lutte contre les stupéfiants, et de l’organisation d’audiences foraines pour juger et sanctionner les auteurs d’actes de VBG. »
Lors du dialogue communautaire, les panélistes — composés d’activistes, de juristes et de religieux — ont répondu aux nombreuses questions de l’assistance, portant sur les principales préoccupations liées aux VBG. Chaque participant est reparti avec l’ambition de devenir un maillon fort de la chaîne dans cette lutte de longue haleine.
Alpha Ousmane Bah
Pour africaguinee.com
Tel. (+224) 664 93 45 45
Créé le 14 avril 2025 17:01Nous vous proposons aussi
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