Exigences des forces vives vis-à-vis du Général Doumbouya : « C’est de bonne guerre », selon Dr. Faya Milimouno

Dr Faya Milimono, président du Bloc Libéral

CONAKRY-Alors que les Forces vives de Guinée menacent de ne plus « reconnaître » le CNRD (Comité National du Rassemblement pour le Développement) à compter du 31 décembre 2024, Dr. Faya Milimouno soutient que c’est « bonne guerre ».  Dans un entretien accordé à Africaguinee.com, le leader du Bloc Libéral (BL) dit avoir des doutes sur la volonté des autorités de la transition à respecter leurs engagements.

Cet acteur politique s’exprime aussi sur l’annonce faite par le Premier ministre Bah Oury concernant le glissement du calendrier du retour à l’ordre constitutionnel. Sans ambages, M. Milimouno désapprouve la démarche qui selon lui, a été faussée. L’ancien candidat à la Présidentielle de 2015 dénonce aussi avec vigueur la « bâillonnement » de certaines entreprises de presse par l’Etat. Dans cette entrevue, le président du BL lève un coin du voile sur les actions que sa coalition entend déployer pour faire pression sur les autorités de la Transition. Entretien exclusif!!!

AFRICAGUINEE.COM : Comment réagissez-vous à l’annonce du Premier ministre Bah Oury concernant le glissement du calendrier de la Transition ?

DR. FAYA MILIMOUNO : Nous avons tous suivi cette sortie du premier ministre Amadou Oury Bah. Elle est en soi un constat objectif, mais elle n’a pas été faite dans les règles de l’art. Ce n’est pas travers les ondes d’une radio que la question devrait être abordée. Il aurait fallu revenir à la CEDEAO parce que le gouvernement dont il est maintenant héritier, a négocié l’accord avec celle-ci sans impliquer aucun acteur politique. S’il s’avère impossible selon le constat du premier ministre que cet accord soit respecté à la lettre, il aurait fallu d’abord commencer par revenir autour de la table avec la CEDEAO pour expliquer et convaincre que les conditions ne sont pas réunies pour que la période transitoire se termine en décembre 2024.

Le Général Doumbouya et le médiateur de la Cedeao Boni Yayi

La deuxième étape, il aurait fallu également après cette première démarche revenir devant les acteurs politiques et sociaux de la République de Guinée pour expliquer pourquoi selon son constat les délais contenus dans l’accord ne peuvent pas être respectés et si un glissement va s’avérer indispensable, c’est pour combien de temps. Tout cela aurait pu se discuter autour de la table mais la sortie en elle-même n’était pas prudente.

Les Forces Vives de Guinée exigent du gouvernement et du CNRD le respect strict du chronogramme. Si à la date du 31 décembre 2024, la présidentielle ne se tenait pour permettre un retour à l’ordre constitutionnel, elles ne reconnaitront plus le CNRD. Qu’en pensez-vous ?

C’est de bonne guerre. Même pas eux, même nous qui avons été autour de la table de dialogue, qui avons discuté avec le CNRD et le gouvernement, nous n’avons pas été consultés pour signer cet accord. Mais une fois que l’accord est signé, pour la crédibilité de notre pays naturellement il va falloir respecter les termes de l’accord. Encore une fois, si on est dans une situation d’impossibilité de respecter les termes de l’accord, il faut avec une meilleure pédagogie, revenir aux acteurs avec qui on a signé l’accord et d’autres que nous sommes. C’est-à-dire les acteurs politiques et sociaux pour renégocier. Sinon je comprends la position des Forces Vives de Guinée qui exigent que les termes de l’accord soient respectés à la lettre.

Des acteurs politiques membres des forces vives de Guinée

Face à ce flou que comptent faire le BL et la coalition pour la rupture ?

Au moment où nous parlons, il y a des contacts en cours pour d’abord réunir la conférence des coalitions et faitières afin de discuter de cette question et c’est d’ailleurs la question centrale qui sera discutée à l’occasion de cette rencontre. Il sera question également de ce qui va naturellement avec cette préoccupation le fait que l’avant-projet de constitution ne puisse apparaitre. Parce que selon le même accord dont on  parle, l’avant-projet de constitution devait être rendu public en juillet 2023, ça n’a pas été possible, on nous a promis sa sortie en septembre, ça n’a pas été possible, on a reporté à décembre, ça n’a pas été possible et c’est à Dubaï que le président du CNT devant tous les partenaires a annoncé que le contenu du document  serait rendu public avant la fin du premier trimestre de 2024 et là nous sommes le 6 avril 2024 aujourd’hui.

Alors toutes ces questions feront l’objet de discussion autour de la table lors de la conférence des coalitions et faitières. Et nous exprimerons ce que nous allons entreprendre pour que la lisibilité que nous souhaitons tous dans la gestion de cette période transitoire soit de mise.

Cas des médias

Dans les échanges également une des questions qui pourrait être abordée c’est notamment la situation actuelle des médias privés dans notre pays. La situation des médias privés en République de Guinée commence vraiment à inquiéter plus d’un. Pour nous, en République de Guinée, nous devons cesser d’être un cimetière des intelligents et un cimetière des réussites. On devait compter nos réussites dans le domaine des médias et là-dessus je crois qu’on avait toute la fierté de voir des médias comme Espace, Djoma, Evasion et tous les autres. C’était une fierté de voir des jeunes guinéens partis de nulle part mettre en place des entreprises de médias et réussir. L’Etat a le devoir de les accompagner vers un rayonnement international et non de travailler à les éteindre. Cela commence à inquiéter plus d’un.

Des médias brouillés

Quelles seront vos exigences là-dessus parce qu’à date il y a une centaine de journalistes au chômage depuis maintenant plusieurs mois ?


Oui, j’ai vu des journalistes de CIS Médias réclamer 18 mois d’arriérés de salaire. Et pourtant, tout le monde sait que Antonio Souaré a été un grand investisseur dans le domaine des médias et dans le domaine des sports, mais aujourd’hui on a l’impression qu’il est éteint parce que lorsque les jeunes de CIS Médias se plaignent de n’avoir pas reçu de salaire depuis 18 mois, ceux de Djoma et d’Espace il y a des mises à pied pour des raisons financières, c’est parce que tout simplement ces médias-là ne fonctionnent plus correctement. C’est la Guinée qui est en train de perdre.

Je crois que là-dessus, nous allons exiger que l’on prenne un chemin complètement différent de celui sur lequel on est actuellement ce n’est que faire du bien à notre pays parce que si nous voulons construire un Etat de droit en République de Guinée et si nous voulons construire une démocratie ça va avec des médias responsables et professionnels. On ne dit pas que le métier de journalisme se fait sans dérapages dans notre pays mais s’il y a dérapages on peut sanctionner celui qui a dérapé mais on ne peut pas prendre ainsi la décision d’éteindre tous les médias.

Avec le recul, pensez-que ceux qui ont douté de la volonté du CNRD ont eu raison ?

En tout cas la lenteur que nous constatons commence à donner raison à beaucoup qui doutent qu’effectivement il n’y a aucune volonté politique d’aller à un retour à l’ordre constitutionnel. C’est pour cette raison que vous entendrez dans les jours et semaines qui vont suivre les différents acteurs s’exprimer sur la question pour exiger plus de lisibilité par rapport à cette question.
L’agenda qui est encore d’actualité, que nous avons soutenu et que nous continuons à soutenir c’est un agenda important pour notre pays parce qu’on ne peut pas développer en ce 21ème siècle un pays dans lequel nous vivons une pagaille comme ce que nous vivons dans notre pays.

Nous ne connaissons pas qui est qui, qui est né quand, qui est mort, qui ne l’est pas, qui est marié, qui ne l’est pas ? Tant aussi longtemps que nous continuerons dans cette pagaille nous ne pouvons pas développer ce pays. Depuis combien de décennies on est en train de faire semblant de connaitre il y a combien de fonctionnaires dans cette petite fonction publique guinéenne de moins de 100 mille travailleurs ou à peine 40 ou 50 mille travaillent véritablement sans en arriver parce que nous n’avons pas de base pour cela ? Donc l’agenda est d’actualité mais nous ne voyons pas effectivement la volonté politique s’affirmer pour sa mise en œuvre.

Les Forces Vives de Guinée hésitent toujours de venir autour de la table de dialogue parce que non seulement leurs préalables n’ont pas été pris en compte par le CNRD mais aussi et surtout parce qu’elles émettent des doutes sur la bonne volonté des autorités de respecter les accords signés comme cela était le cas durant le défunt régime. Qu’en pensez-vous ?

Nous avons tous signé des accords avec le défunt régime de monsieur Alpha Condé dont d’ailleurs la formation politique fait partie aujourd’hui des Forces Vives de Guinée. En fait, s’il y a aujourd’hui ceux qui ont consacré le non-respect des accords dans notre pays c’est bien le RPG et aujourd’hui ce RPG veut qu’il y ait un respect des accords. Nous sommes d’accord aujourd’hui avec le RPG sur le respect des accords signés parce que c’est ce qu’on a toujours réclamé. Ce que nous pouvons demander à nos collègues des Forces Vives de Guinée c’est d’être autour de la table.

Dr Faya Milimono, président du Bloc Libéral
Dr Faya Milimono, président du Bloc Libéral

Depuis le début c’est ce que nous avons dit, ‘’venez autour de la table, nous allons discuter de cela, nous comprenons la nécessité de travailler à un retour rapide à l’ordre constitutionnel mais il faudrait que chacun de nous ait la volonté d’être autour de la table pour en discuter’’. Mais le vœu de nos amis des Forces Vives de Guinée c’est d’être en dehors de la table et continuer à réclamer des choses auxquelles ils n’ont pas pris part eux-mêmes.

Interrogé par la rédaction d’Africaguinee.com, le porte-parole du gouvernement, Ousmane Gaoual Diallo a réitéré la main tendue du gouvernement aux Forces Vives de Guinée, il a même affirmé qu’il y a des possibilités d’accord à tout point de vue. Croyez-vous-en cette promesse ?

Nous ne doutons pas de la volonté d’inviter les acteurs autour de la table. Ce que nous commençons à douter c’est la volonté de mettre en œuvre ce qui est obtenu autour de la table. Parce qu’en écoutant le porte-parole du gouvernement il y a cette volonté, ça n’a pas changé. Depuis le début on n’a dit à personne de ne pas être autour de la table c’est d’ailleurs ce qui avait retardé le début du dialogue. Alors, que le gouvernement répète la même chose aujourd’hui. Pour nous ce n’est pas nouveau, ça ne nous apprend rien. Ce dont on a besoin ce que si nous nous retrouvons et nous décidons de quelque chose que l’on mette cela en œuvre, qu’il y ait une volonté politique affichée pour mettre en œuvre cela et dans les délais qu’on a accepté de façon responsable et volontaire.

Interview réalisée par Oumar Bady Diallo

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 666 134 023

Créé le 9 avril 2024 09:42

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