Érosion et pollution : ‘‘La mer avance, les terres reculent’’, prévient Dr Papa Abdoulaye Fall à Bossimyah

KABACK – C’est un paysage de désolation que décrit le Dr Papa Abdoulaye Fall, après une visite dans le village côtier de Bossimyah, situé dans la sous-préfecture de Kaback, au sud-ouest de la Guinée. Cet environnementaliste tire la sonnette d’alarme face aux effets dévastateurs du changement climatique dans cette localité menacée par l’érosion côtière, la disparition de la mangrove et l’invasion des déchets plastiques.

« La mer avance, les terres reculent et l’Homme devient impuissant… », alerte le Dr Papa Abdoulaye Fall. Au micro d’Africaguinee.com, il dresse un constat alarmant, illustré par l’échec de la digue installée jadis pour protéger les périmètres rizicoles de la zone. Malheureusement, cette digue n’a pas résisté à la pression des vagues de l’océan Atlantique, laissant les populations de Bossimyah démunies face à un phénomène de plus en plus incontrôlable.

La mangrove en péril : une menace écologique majeure

La disparition progressive de la mangrove est l’une des conséquences les plus dramatiques observées par le Dr Fall. Pourtant, ces forêts côtières, véritables poumons écologiques, jouent un rôle crucial dans la régulation du climat, la séquestration du carbone et la préservation de la biodiversité.

AFRICAGUINEE.COM : Nous sommes dans la sous-préfecture de Kaback, précisément à la plage de Bossimyah. Quel est votre constat sur les effets du changement climatique dans cette localité ?

Dr PAPA ABDOULAYE FALL : Le constat est assez général, dans la mesure où pratiquement toutes les zones côtières, y compris ici à Bossimyah, sont aujourd’hui confrontées à l’érosion côtière. C’est un spectacle malheureusement récurrent, face auquel l’Homme se retrouve impuissant.

Ici, on observe encore les vestiges d’une digue qui avait été construite pour protéger une zone rizicole très importante pour la Guinée. Malheureusement, elle n’a pas tenu face à la pression des vagues. Ce qui avait été fait n’a pas résisté à la mer.

Aujourd’hui, on sait que c’est un phénomène qu’on ne pourra pas arrêter. Il faut donc penser en termes d’adaptation. Et c’est là que le danger devient plus grand : la mangrove, juste derrière moi, risque à son tour de disparaître. Pourtant, la mangrove a besoin d’eau saumâtre pour survivre. Si toute cette zone est progressivement submergée par l’eau salée de la mer, il est clair qu’on perdra une grande partie de ces forêts côtières.

Or, la mangrove joue un rôle écologique fondamental, à la fois comme niche de biodiversité et comme système de séquestration du carbone. Sa disparition pourrait avoir des conséquences environnementales très graves pour cette région.

Et puis, au-delà de l’aspect écologique, il y a l’impact social. Ce périmètre rizicole, vital pour les communautés locales, risque tout simplement de disparaître. On se retrouve donc ici face à une situation alarmante, à la fois sur les plans environnemental et social.

On remarque ici la présence importante de déchets plastiques. Quel impact peuvent-ils avoir sur l’environnement ?

Ces déchets plastiques sont malheureusement la preuve que la mer est en train de devenir la poubelle du monde. On y rejette tout, et elle nous le renvoie comme un boomerang. Tout ce que nous déversons dans l’océan, il finit par nous revenir.

Ces déchets que vous voyez ici viennent probablement de Conakry, mais comme me l’a rappelé un professeur, Freetown n’est pas loin non plus. Cela signifie que ces ordures peuvent aussi provenir de là-bas. En fin de compte, ils viennent perturber un écosystème déjà fragile. C’est un milieu de mangrove, une zone de reproduction et de développement pour de nombreuses espèces. La présence de ces déchets le dégrade fortement, avec des conséquences sérieuses : perte de biodiversité, disparition de la mangrove, et pollution de l’air.

Quelles sont les conséquences sanitaires de ces déchets plastiques pour l’Homme ?

Les risques sont bien réels. D’abord, sous l’effet de l’eau de mer, les plastiques se fragmentent en microparticules, qu’on appelle micro-polluants. Ces particules peuvent être ingérées par les poissons, et donc se retrouver dans nos assiettes. C’est le premier danger.

 

Ensuite, ces déchets peuvent étouffer certains petits poissons. Et dans les zones où il y a des tortues – j’espère qu’il n’y en a pas ici – ces dernières prennent souvent les plastiques mous pour des algues et les avalent, ce qui les tue. Donc oui, ces déchets constituent une menace directe pour la biodiversité marine, mais aussi pour la santé humaine. Une fois que ces plastiques se dégradent, si les poissons les consomment, nous consommons ensuite des poissons potentiellement toxiques.

Quelles sont les solutions envisageables à court et à long terme ?

À court terme, la priorité, c’est la sensibilisation et l’information. Il faut comprendre que ces déchets ne sont pas produits ici par les maraîchers ou les agriculteurs de la zone. Ils viennent d’ailleurs.

Il est donc crucial que des villes comme Conakry améliorent significativement la gestion de leurs déchets. Il ne faut plus que les plages de la capitale soient traitées comme des dépotoirs, car ce sont ces déchets qui finissent ici, à Bossimyah.

À plus long terme, il faut aussi repenser la protection de la digue. Il est important d’envisager des infrastructures mieux adaptées, conçues pour répondre aux besoins de la zone, notamment la sauvegarde des périmètres rizicoles restants.

Entretien réalisé par Oumar Bady Diallo 

Par Africaguinee.com 

Tel : (00224) 666 134 023 

Créé le 5 juin 2025 14:00

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